[Affaire Duhamel] – Paula, Évelyne, Camille, trois générations de féministes, trois expériences de l’amertume

Je viens de me positionner totalement à rebours de la majorité sur l’affaire Duhamel (janvier 2020), refusant de participer à une curée pilotée par une clique de néoféministes poussant un agenda que je ne connais que trop.

Le livre de Camille Kouchner, La familia grande, instrumentalise en effet la vie intime de son frère jumeau – quand celui-ci a toujours demandé à ce qu’on le laisse avancer dans sa vie sans le ramener sans cesse à cette affaire et sans l’enfermer dans un statut de victime à vie dont il n’a que faire (lire « Peggy Sastre – Affaire Duhamel : au bout du malaise » (Le Point, 08/01/2021). Il n’a, de plus, jamais souhaité s’exprimer publiquement sur les faits et il maintiendra probablement cette position. Camille Kouchner elle-même reconnait dans son livre, et laisse filtrer en interview, que son frère ne souhaitait pas rendre l’affaire publique. D’emblée, il y a donc ici pour moi une forme de viol de l’intimité qu’aucune forme de croisade ne devrait justifier. Je le dis d’autant plus sereinement que je sais très bien que la résilience existe et que l’ON PEUT se remettre d’un viol (je ne dis pas « toujours », je dis « PARFOIS », merci de ne pas déformer mes propos).

Car l’objectif est ici, avec l’appui de Muriel Salmona, l’inventrice de la « mémoire traumatique » (une imposture scientifique, cf. Julie Brafman, « L’amnésie traumatique, concept «séduisant» mais controversé », Libération, 20/12/17), d’obtenir à terme l’imprescriptibilité de toutes les affaires de sexe. Autrement dit, de mettre en place le régime juridique de la « République Morale du Féministan », une république féministe où la chasse aux sorcières (enfin, aux hommes) et la justice immanente des réseaux sociaux et des médias mainstream tiendraient lieu de justice tout court ; le tout au nom d’une morale anti-sexe de chaisières d’église. Nous avons déjà un pied dans cette République :

Entendons-nous bien : dans le cas présent, l’agression sexuelle, voire le viol sont, selon toute vraisemblance, avérés (aucune décision de justice n’ayant à ce jour été prononcée, et respectant la présomption d’innocence, je ne m’avancerai pas plus sur ce sujet). Mais quand bien même l’homme serait-il coupable, cela ne justifierait en rien le lynchage public auquel il a droit. La justice n’est pas la vengeance ; la justice n’est pas le pilori médiatique, la justice n’est pas le lynchage sans possibilité de se défendre – d’autant que certains protagonistes, telles les soeurs Pisier, ne sont plus là pour empêcher qu’on parle à leur place : cette mise à mort sociale par une foule chauffée à blanc n’est pas digne d’une civilisation avancée.

La vengeance. C’est bien ce qui se dégage de cette entreprise éditoriale conduite par Camille Kouchner, épaulée par Ariane Chemin du Monde et par L’Obs, dont le vice-président, Louis Dreyfus, est le mari de Camille Kouchner, – avec, donc, en arrière-plan comme mentionné plus haut, Muriel Salmona. Tou(te)s incarnent ce néo-féminisme vindicatif et vengeur qui ne recule devant aucun procédé, même le plus vil, pour faire avancer « la Cause » – et purger au passage leurs vieilles rancoeurs (ici, Camille Kouchner ne supportait tout simplement pas que Duhamel soit dans la lumière et pas elle, comme elle l’a elle-même reconnu).

Au-delà de ses ruminations contre Duhamel (bien plus importantes que celles de son frère, semble-t-il), Camille Kouchner règle aussi dans ce livre ses comptes avec sa mère avec laquelle elle a un énorme contentieux, et elle en profite pour lancer ses boules puantes sur tout le milieu au sein duquel elle a grandi – sorte de crise d’adolescence tardive mais tout à fait caractéristique de ces néoféministes qui ont toujours beaucoup de mal à quitter l’enfance. Pauvre petite fille riche, cela a dû être si dur de passer ses vacances à Sanary-sur-Mer avec le gratin de la gauche, ou de rejoindre son people de père avec Christine Ockrent qui, mais quelle horreur, était parfois distante le soir… Plutôt que de s’en prendre à C. Ockrent, peut-être devrait-elle plutôt questionner l’éclatement de la cellule familiale voulue par le féminisme, avec les relations habituellement conflictuelles avec les beaux-parents que cela engendre (on sait même que les crimes commis sur les enfants sont le fait des beaux-pères à une proportion écrasante par rapport aux pères biologiques; voir « L’effet Cendrillon »). Camille et son frère sont justement bien placés pour le savoir… mais ce serait moins politiquement correct de regarder ces choses en face, n’est-ce pas.

Je n’ai pas non plus voulu suivre dans ce lynchage les contempteurs de Mai 68 qui, comme les QAnon, ont tendance à voir des pédophiles partout et à faire de la lutte contre une pédophilie fantasmée leur cri de ralliement [comme l’explique Tristan Mendès-France, le combat contre la supposée pédocriminalité des élites est l’hameçon qui a permis aux complotistes de QAnon de se développer rapidement en France]. D’autant qu’ici, la pédophilie est rien moins qu’avérée (la victime avait 14-15 ans et n’était plus un enfant : il s’agit en réalité d’éphébophilie). Même la notion d’inceste reste contestable d’un point de vue anthropologique, malgré les récents changements de la loi. « Détournement de mineur par adulte ayant autorité » devrait donc suffire. Mais on conviendra que c’est moins racoleur que « inceste » ou « pédophilie » sur les réseaux sociaux et cela, les médias l’ont bien compris.

J’ajoute, sans vouloir pour cela défendre les hypocrisies et les inconséquences de Mai 68, que même si une poignée d’illuminés ont imprudemment défendu la pédophilie dans les années 70, ils n’ont en aucune manière provoqué une vague de pédophilie dans ce pays. La réprobation a été immédiate et générale et a au contraire amené une intransigeance encore plus grande envers ces comportements déviants. La pédophilie est un trouble pathologique du comportement qui n’a ni couleur politique ni couleur sociologique et qui est malheureusement un invariant de l’espèce humaine sous toutes les latitudes. Même les formidables bonobos cités en exemple par le féministe Pascal Picq… sont pédophiles, c’est dire !

Trois générations de féministes amères

Parmi le flot d’articles souvent crapoteux publiés par la presse people, où Gala, Closer, Voici, Public, etc. ont rivalisé d’obscénité, allant jusqu’à accuser Olivier Duhamel d’être responsable de la mort de Marie-France Pisier (j’espère qu’il les attaquera en diffamation, de même que Camille Kouchner pour ses insinuations comme quoi il serait également responsable de la mort de sa mère Evelyne), j’ai été interpellée par cet article de Gala :

« Qui est Paula Caucanas, la mère d’Évelyne Pisier, qui s’est suicidée ? »

Paula Caucanas, la grand-mère, était donc une féministe de la première heure. Gala glorifie Camille de parler d’elle en ces termes : « Lorsqu’elle me racontait ma grand-mère, ma mère soulignait ses idéaux. » En quittant son mari à la fin des années 1950, cette femme, Paula Caucanas de son vrai nom, a fait « exploser les conventions bourgeoises ». Résolument libre et peu soucieuse du qu’en-dira-t-on, elle ne semblait pas non plus avoir de tabou avec sa fille Évelyne, à qui elle a raconté très tôt « comment avoir un orgasme à cheval ou à vélo » alors que celle-ci était « à peine pubère. » (…) À ses filles, elle a aussi appris la liberté sexuelle. Très jeunes, Évelyne et Marie-France Pisier ont fait preuve « d’une arrogance sexuelle stupéfiante »a rappelé Camille Kouchner dans son ouvrage. On y apprend en effet qu’Évelyne incitait sa fille à la précocité sexuelle en lui disant qu’elle-même avait fait l’amour à 12 ans, ou qu’elle invitait une amie à « déniaiser » son fils adolescent.

Évelyne, très proche de sa mère, a construit à son tour toute sa vie et toute sa carrière sur le féminisme militant et un comportement de vamp (pourquoi pas…). Mais « Paula Caucanas a mis fin à ses jours alors qu’elle n’avait que 64 ans, deux ans après le suicide du père de ses filles par arme à feu, à l’âge de 75 ans. « Ils avaient toujours dit qu’ils ne voulaient pas vieillir. J’arrive à cet âge. Mais je ne comprends toujours pas », avait confié Évelyne Pisier à Libération en 2005. »

En se suicidant, Paula plonge sa fille Évelyne dans les affres de l’alcool et d’une « dépression abyssale », un gouffre dont elle ne remontera jamais. Malheureuse et à côté de sa vie, elle n’apprendra que 20 ans après les faits ce qui est arrivé à son fils. Vouée aux gémonies par sa fille Camille et par les foules écoeurées qui viennent cracher sur sa tombe, elle paie aujourd’hui très cher sa réaction (pourtant explicable d’un point de vue psychologique) de minimisation des faits.

Deux générations de femmes brisées, donc, dont la jeunesse flamboyante s’achève dans la noirceur et même la fange pour Évelyne. Comment en est-on arrivé là ? Pourquoi personne ne semble voir la part du féminisme dans leurs destins tragiques ? Aujourd’hui, en 2021, le néoféminisme victimaire aigri et puritain de Camille demande des comptes au féminisme laxiste en matière de moeurs de sa mère. Un féminisme qui n’était pourtant pas dénué de qualités, car Évelyne Pisier avait su ne jamais sombrer dans la pleurnicherie victimaire – avec Élisabeth Badinter, elle s’était même opposée à la parité, cette manière sexiste de préférer les femmes sur le critère de leurs ovaires en lieu et place de leur matière grise. Mais reprenons l’enchainement des faits.

Dans les années 1960, Évelyne et Marie-France Pisier sont biberonnées au féminisme tout puissant et soi-disant libérateur de leur mère. Celle-ci, à la limite de l’abus psychique (mais les féministes militantes ne s’encombrent pas avec ce genre de détails) explique à ses filles comment se masturber alors qu’elles sont « à peine pubères » (probablement un euphémisme, elles devaient être plus jeunes). Eh bien moi, si à 11 ou 12 ans, ma mère avait fait ça, je l’aurais maudite ! Je l’aurais vécu comme un viol de mon intimité ! Mais Camille ne voit pas le problème ; mieux même, elle semble trouver cela admirable. Ces féministes n’ont décidément plus beaucoup de repères. On notera au passage que dans les années 1950, c’était donc déjà le règne du clitoris tout puissant (comme quoi les néofems et autres #tasjoui ne savent que réinventer l’eau tiède).

On notera aussi une forme de narcissisme et d’immaturité dans les mots rapportés de Paula, refusant de vieillir et choisissant, par son suicide mis en scène de manière sordide, d’abandonner sa fille : « En 1988, lorsqu’à son tour leur mère, sidérant tout le monde, se suicide sans raison apparente à 66 ans et s’arrange, avec un égoïsme inouï, pour que ses trois enfants découvrent eux-mêmes son corps abîmé, c’est une déflagration pour le clan Pisier » (« Splendeurs et misères des soeurs Pisier », Le Point, 12/01/21). La descente aux enfers d’Évelyne est clairement précipitée par le double suicide de ses parents, principalement celui de sa mère puisque, tout comme sa soeur Marie-France, elle avait vécu dans la haine totale de son père, refusant de le voir et même d’aller à ses funérailles.

Paula avait souffert d’un double cancer du sein suivi d’une ablation mammaire, terrible diagnostic qui a pu influencer sa décision – ce qui peut s’entendre. Je dois ajouter une chose terrible, mais malheureusement exacte, au sujet du cancer du sein : l’allaitement prolongé protège de ce cancer. Or le féminisme d’après-guerre a lutté âprement contre l’allaitement maternel, supposé réduire les femmes au statut de vaches laitières et préférant les renvoyer bien vite à l’usine. J’ose donc dire que ce féminisme a du sang sur les mains. Pour Paula, ses filles étant nées dans les années 40, j’ignore si elles les a allaitées, je suppose que oui, donc ceci ne la concernerait pas a priori.

Évelyne est une jeune femme belle et brillante à qui le monde déroule un tapis rouge, accumulant les succès masculins et personnels et menant avec sa soeur une vie de jet-setteuse dans les hautes sphères de la gauche féministo-révolutionnaire (option caviar). Les photos de sa relation avec Fidel Castro témoignent de son succès international.

De 1964 à 1968, Évelyne, installée à Cuba, est la maîtresse de Fidel Castro

Camille K. dépeint ensuite une mère de famille moins reluisante, décrivant un univers familial glauque et malsain et ce, bien avant l’arrivée d’Olivier Duhamel dans leurs vies. Évelyne a certainement beaucoup souffert de l’échec de son mariage avec Bernard Kouchner. Mais à aucun moment, Camille ne semble questionner l’idéologie féministe de sa mère, ni comprendre la manière dont son féminisme a pu influencer son comportement, de la jeune femme arrogante et toute puissante à la mauvaise mère. Il y a pourtant des choses qui moi, me sautent aux yeux. Ce n’est pas seulement de sa mère, mais du féminisme de la seconde vague, dont il aurait fallu faire le procès, puisque la première n’est que l’expression du second. Sans l’éducation méprisante de Paula – et de tout le féminisme – envers le rôle maternel, peut-être Évelyne se serait-elle comportée différemment avec ses enfants.

Je relève aussi le côté typiquement « féministe » d’Évelyne : « Castro sonnait Évelyne quand il voulait, raille un vieux camarade de Marie-FranceÀ Paris, elle emmerdait tout le monde en donnant des leçons de féminisme, mais à Cuba, elle était vraiment le prototype de la femme soumise. » Évelyne s’est ensuite couchée devant Olivier Duhamel, son despote domestique préféré. Ses amis ont été surpris, mais pas moi, car toutes les féministes sont comme ça, hier comme aujourd’hui, crachant sur leurs pères et les hommes normaux, mais faisant la queue pour se faire détruire par des « pervers narcissiques » et autres prédateurs à peine masqués (lire Féministes et pervers narcissiques : les liaisons dangereuses). L’emprise, on pleure après, mais sur le coup, qu’est-ce que c’est excitant (eh oui)…

Quoiqu’il en soit, les curseurs de la morale sexuelle s’étant déplacés et rigidifiés – aujourd’hui un film comme Beau-Père de Bertrand Blier, sorti en 1984 et qui raconte le désir amoureux et sexuel d’une fille de 14 ans (14 ANS !) envers son beau-père joué par Patrick Dewaere (34 ans à l’époque) provoquerait un scandale national, ou plus exactement ne pourrait même plus être tourné et son réalisateur se verrait jeté en pâture sur #MeToo –, on mesure face à quel âge de glace on se trouve désormais. Je ne suis pas en train de dire que l’histoire de La Famila grande ait quoi que ce soit à voir avec celle de Beau-Père, puisque le frère ici n’était pas consentant. Je dis juste que pour les besoins de « la Cause », on fait feu de tout bois, prenant à témoin les foules qui ne demandent que ça, sans se soucier de l’exactitude des faits allégués – rappelons qu’on parle ici d’un « roman autofictionnel » et non d’un témoignage sous serment, et que la justice ne s’est pas prononcée. De plus, on peut se demander comment, dans un milieu d’intellectuels où tout le monde savait trouver les mots, un adolescent de 15 ans – qui n’était pas visiblement pas le dernier des abrutis, au vu de son futur parcours de vie – ait été incapable d’envoyer paître son beau-père. Il y a des choses qui restent à clarifier car elles sont à la limite de la crédibilité.

Les dénonciations, vraies ou fausses, mais invérifiables, de « viols » à 30 ou 40 ans de distance faisant sans doute moins recette – après Haenel, Springora, les affaires Polanski, etc., la formule est devenue un peu éventée –, on s’est peut-être dit qu’avec « inceste » et « pédophilie » dans le plan de com’, ça claquerait plus fort et que le succès éditorial serait garanti.

Je suis frappée en tout cas par cette propension des bien-pensants à brûler furieusement ce qu’ils adoraient jusqu’à peu. Hier encore icône du féminisme libérateur, Évelyne Pisier incarne du jour au lendemain, « grâce » à sa fille, l’abomination faite femme. Eh bien, toute antiféministe que je suis, j’ai de la peine pour elle. Je pense qu’elle ne méritait ni de représenter une libération qui n’en a pas été une pour elle, ni son contraire. Je considère qu’elle a tout simplement vécu une vie de féministe du XXe siècle, écartelée par des injonctions contradictoires qui ne pouvaient que la faire chuter. Ainsi va le féminisme… et paix à son âme.

En attendant, à travers ce tweet très classe, c’est lui qui mange ses morts, à commencer par Évelyne Pisier.

[à suivre…]

  • Voir aussi :

. Une recension de La Familia Grande par Aristide Renou qui pointe lui aussi l’idéologie féministe d’Évelyne et sa désastreuse influence sur son comportement :

https://aristidebis.blogspot.com/2021/07/la-familia-grande-le-feminisme-en-action.html

. Comme elle l’a montré lors de son passage dans l’émission « La Grande Librairie » (13/01/20), Camille Kouchner fait malheureusement partie de ces néoféministes en croisade qui défendent la pseudo « mémoire traumatique » de Muriel Salmona et dénient à toute victime la possibilité de se remettre un jour d’un viol. Je prends le contrepied exact de ces salades manipulatrices dans ce témoignage :

  • Sur l’imposture Muriel Salmona, grande manipulatrice victimaire devant l’Éternel :

. Peggy Sastre, « Muriel Salmona: la psy qui traumatise » (Causeur, 10/03/21). La promotrice de la notion d’amnésie traumatique est une femme dangereuse.
. Erwan Seznec, « Les liaisons dangereuses de Muriel Salmona » (Causeur, 20/03/21). Enquête sur une psy aussi médiatique que dangereuse.
. « N’enfermons pas l’enfant victime d’inceste dans son traumatisme ! Relevons le défi de mieux l’entendre, le protéger, l’accompagner » (Le Monde, 24/03/21)
. « Inceste: une tribune publiée dans Le Monde dénonce à son tour le « message délétère » de Muriel Salmona », (Causeur, 25/03/21)
. Voir aussi : Démystifier les mythes à propos de la « mémoire traumatique » (Brigitte Axelrad).

. Les féministes médiatiques et éditoriales ont toujours raffolé des histoires de « viôôôl », parce que c’est tellement vendeur… ne l’oublions pas.

. Évelyne Pisier était une maîtresse-femme, une féministe influente au caractère trempé qui a fait valser les hommes autour d’elle une bonne partie de sa vie. Elle s’est pourtant inclinée devant des personnalités masculines autoritaires telles Fidel Castro ou Olivier Duhamel. Pourquoi ? =>

[Mythologie féministe] – Les Suffragettes et le droit de vote des femmes

« Oui, mais, gna gna gna, sans les Suffragettes, tu ne voterais même pas, han ! »

Bien. Je crois qu’il est temps de remettre les pendules à l’heure.

  • En France comme partout dans le monde, les femmes n’ont obtenu le droit de vote que quelques années (au pire décennies) après les hommes – et à l’échelle de l’histoire, c’est peanuts de peanuts !

J’avais déjà rappelé quelques faits historiques dans cet article : « La glossolalie féministe ou le syndrome du hamster ».

– Les féministes : « Hiiiiin, les Fâââmes ont dû attendre le XXsiècle pour pouvoir voter, c’est honteux ! Patriarcâât !!! »

Déjà, c’est faux : « Avant le XXe siècle, quelques pays accordent partiellement ou provisoirement le droit de vote aux femmes (…). Le Royaume de France introduit un droit de vote restreint pour les élections consulaires (gouvernements urbains) depuis le XIIe siècle selon les régions. Pour les États généraux depuis le XIVe siècle jusqu’en 1789. » (Source: Wikipedia). Comme on le voit d’emblée, les Suffragettes n’ont pas pesé pour grand chose…

Ensuite, les hommes français ont attendu le milieu du XIXe siècle pour accéder au suffrage universel, et encore, pas tous. Les conditions étaient restrictives et seule une partie des hommes votait.

Au XXe siècle, c’est la gauche qui s’est opposée au vote des femmes car elle savait qu’il serait conservateur. C’est le gouvernement de Vichy qui le premier, en rédige le projet, en 1941. Le vote sera acté en 1944. Par rapport aux hommes et à l’échelle de l’histoire et de la longue durée, cela reste cependant un délai très court. Les militaires français ont quant à eux dû attendre 1945 pour avoir le droit de vote, soit un an après les femmes ! Ils ne font pourtant pas autant de raffut… Et il faudra encore attendre 1956 pour que les français d’Outre-Mer, hommes et femmes, aient le même droit de vote que les métropolitains. Ils ne nous rebattent pas non plus les oreilles comme les pleureuses professionnelles, comme c’est bizarre…

  • Les femmes n’ont pas eu besoin des Suffragettes pour que les hommes leur donnent le droit de vote

Aux États-Unis, « les femmes pouvaient voter dans l’État du New Jersey de 1776 à 1807 sous la condition, comme pour les hommes, d’êtres elles-mêmes propriétaires », etc. On pourra trouver sur cette page Wikipedia de nombreux autres exemples du vote des femmes dans le monde avant les Suffragettes (par exemple en Suède de 1718 à 1771). Le droit de vote est définitivement accordé aux femmes dans la majorité des pays à partir du tournant du XXe siècle : dès 1893 en Nouvelle Zélande, 1901 en Australie, 1906 en Finlande, 1910 dans l’état de Washington, 1911 en Californie, 1912 en Arizona, Kansas et Alaska, 1913 en Norvège, 1915 au Danemark, 1916 au Manitoba, 1917 en Russie, etc.

Je ne vais pas tous les citer, puisque tous les pays occidentaux y viennent les uns après les autres – et ils n’avaient pas de Suffragettes ! De plus, les féministes sont aveugles et borgnes car ce sont des hommes qui, partout, ont réclamé et donné le droit de vote aux femmes… tout simplement parce que c’était la marche de l’histoire et de la civilisation occidentale et que l’égalité juridique des sexes était en germe depuis des décennies, pour ne pas dire des siècles ! Au Royaume-Uni, c’est le philosophe John Stuart Mill qui, à partir de 1867, bataille pour cette réforme. Comme à leur habitude, les féministes ont pris le train en marche et brandi leur petit poing rageur pour revendiquer un combat depuis longtemps porté et remporté par des hommes. Les féministes sont toujours les spécialistes des faux combats et des fausses victoires. C’est tellement plus facile de se poser en David terrassant un Goliath (le patriarcat) mort depuis longtemps !

Pour rappel, les femmes obtiennent le droit de vote en 1919 au Royaume-Uni… quand les hommes eux-mêmes ont attendu 1918 pour avoir tous le droit de voter ! « Il faut attendre 1918 pour que le droit de vote soit étendu à tous les hommes de plus de 21 ans – ou presque- et aux femmes de plus de 30 ans ». Bref…

Petit tableau récapitulatif
  • Les Suffragettes, et tout particulièrement l’une de leurs chefs de file, Mary Richardson, avaient déjà toutes les caractéristiques des hystériques misandres

Comme je l’avais évoqué dans cet autre article, « Punir, censurer, interdire, les féministes au musée », les Suffragettes anglaises se sont surtout illustrées par leur folie destructrice : le 10 mars 1914 à la National Gallery de Londres, la suffragette Mary Richardson attaquait au hachoir la Vénus au miroir de Velázquez (v. 1650), occasionnant sept entailles dans le tableau et endommageant fortement la zone entre les deux épaules. Elle a été condamnée pour cet acte de vandalisme à six mois de prison, le maximum prescrit pour destruction d’œuvre d’art.

Vénus au miroir de Velázquez lacérée par Mary Richardson, 10 mars 1914

Mary Richardson inaugurait ici la figure de la féministe puritaine et misandre ne supportant pas le regard des hommes porté sur la nudité féminine – elle a expliqué plus tard « qu’elle n’aimait pas la façon dont les visiteurs masculins regardaient bouche bée toute la journée » cette peinture. Mary s’en était prise à l’image d’une femme alors même qu’elle prétendait défendre « les femmes ». Qu’est-ce que son inconscient ne supportait donc pas chez cette Vénus ? Eh bien qu’elle soit érotique, bien sûr, offerte au désir des hommes et qu’elle ait le pouvoir de les émoustiller. Et c’est toujours aujourd’hui le problème majeur des féministes qui s’intéressent à l’art.

Les Suffragettes anglaises se sont également signalées par la destruction de dix autres tableaux dans les musées anglais entre mai et juin 1914 et il aura fallu pas moins que la première guerre mondiale pour mettre un terme à ces exactions.

  • Les Suffragettes, reines du terrorisme, du vandalisme et de l’agitation névrotique

Les Suffragettes posent des bombes, allument des incendies, envoient des colis piégés et inaugurent un « règne de la terreur » féministe. Je cite simplement la page Wikipedia qui leur est consacrée :

« Les suffragettes ont parfois eu recours à des méthodes assimilées par certains historiens à du terrorisme. Si certains réfutent ce terme et lui préfèrent le qualificatif de « vandalisme », arguant du fait que les propriétés et bâtiments que des suffragettes ont détruits ou incendiés étaient vides (il y en eut 250 en 6 mois en 1913), l’historien Simon Webb rappelle que Mary Leigh et d’autres suffragettes ont mis le feu à un théâtre, avant d’y faire exploser une bombe, alors que des gens étaient à l’intérieur. Elles ne furent cependant pas accusées de terrorisme, car ce crime n’existait pas à l’époque, et furent poursuivies pour avoir « causé une explosion de nature à mettre en danger la vie d’autrui ». Les suffragettes britanniques placèrent une série de bombes (la plupart explosant avec succès, certaines parfois défectueuses) dans plusieurs lieux, par exemple dans l’abbaye de Westminster, la cathédrale Saint-Paul, la banque d’Angleterre, la National Gallery, des gares, ou encore au domicile du chancelier David Lloyd George. Cette dernière fut placée par la militante Emily Davison. La bombe ayant soufflé les vitraux de la cathédrale de Lisburn en 1914, attribuée aux suffragettes, représente à la fois la première explosion de bombe du XXe siècle en Irlande, précédent celles de l’IRA, et la dernière bombe posée par les suffragettes : elle explosa le jour de l’entrée en guerre du Royaume-Uni, après quoi l’essentiel des suffragettes stoppèrent leurs activités et s’impliquèrent dans l’effort de guerre.

L’historienne Fern Riddell découvrit qu’en plus des bombes, les suffragettes envoyèrent des courriers piégés (méthode dont elles sont les inventrices, selon Simon Webb) contenant des flacons de phosphore qui se brisaient lorsqu’ils étaient manipulés, occasionnant de sévères brûlures chez les postiers. Fern Riddell affirme qu’en 1913, les suffragettes étaient un « groupe terroriste très organisé », et selon elle « il ne fait aucun doute que tout ceci a toutes les caractéristiques de ce qu’on définirait aujourd’hui comme du terrorisme ». Elle cite aussi les propos de la police et des suffragettes, employant tous deux l’expression de « règne de terreur » pour qualifier la campagne menée par les suffragettes, ou les journaux de l’époque titrant sur le « terrorisme suffragette ». Pour Fern Riddell, certains détails indiqueraient qu’au cours de leurs dernières années, il y eut une tentative coordonnée des suffragettes pour effacer leurs actions les plus violentes des ouvrages de mémoires publiés. »

1913: Incendie de l’église Sainte-Catherine d’Hatcham par les Suffragettes

Comme on le peut le voir, c’est tout à fait édifiant. On notera la manipulation typiquement féministe consistant, comme à leur habitude, à réécrire l’histoire à leur avantage – on appelle aussi cela du révisionnisme historique, manoeuvre pour ainsi dire devenue leur marque de fabrique et raison pour laquelle il ne faut en aucun cas abandonner le champ de l’histoire aux féministes.

On relèvera aussi cet aspect significatif : à partir de l’entrée en guerre (1914), les Suffragettes se calment et se consacrent à l’effort de guerre. Car c’est toujours la même histoire : le féminisme hystérique ne peut se développer qu’en temps de paix, une fois que des hommes, au prix de leur sang, ont offert à ces femmes un pays suffisamment pacifié pour qu’elles puissent se livrer à leurs épanchements et hurlements revendicatifs. Mais que la situation se tende et que la guerre soit à nos portes… et elles se rangent aussitôt derrière les hommes. Il en sera évidemment de même avec nos féministes actuelles en cas de future guerre de civilisations (même si beaucoup ont déjà décidé de se ranger derrière les hommes du camp adverse).

En conclusion, on retiendra que les Suffragettes ne sont qu’une imposture féministe de plus, un groupe terroriste d’agitées du bocal qui se sont contentées de prendre le train de l’histoire en marche tout en sabotant gratuitement le patrimoine artistique. Quasiment nulle part, les hommes n’avaient dans leur totalité accès au suffrage avant qu’elles-mêmes y accèdent. La mythologie féministe a fait des héroïnes de ces excitées surtout douées pour hurler, saccager ou étaler leurs névroses. Sans elles, la marche du monde aurait été exactement la même. Tous les pays développés auraient donné le droit de vote aux femmes, les uns après les autres, comme ils l’ont fait bien avant elles – ou bien après, comme la France (1944) ou la Suisse (1971), en fonction de leurs évolutions culturelles et historiques propres. Les Suffragettes, ou l’art féministe de faire du vent et de tirer à soi la couverture, as usual

1959. Affiche Suisse en faveur du vote des femmes.
Parce que c’était la marche de l’histoire et que les hommes aussi l’ont voulu !
  • Et aujourd’hui, l’abstention est majoritairement féminine, ici aux élections européennes de 2019, mais c’est valable pour toutes les élections, en France et dans la plupart des pays d’Europe ! Tout ça pour ça… (soupir).

Nathalie Heinich – La « cancel culture » n’a rien à faire sur notre territoire (Le Monde, 8/08/20)

Nathalie Heinich : « La « cancel culture » n’a rien à faire sur notre territoire » (article également publié sous le titre « La “cancel culture” est la conséquence du sous-développement juridique nord-américain », Le Monde, 07 et 08 août 2020)

Ce conformisme idéologique, issu de la nouvelle gauche américaine, n’a rien de progressiste, estime la sociologue. En France, la liberté d’expression est encadrée par la loi

La cancel culture, qui nous vient des campus nord-américains et des réseaux sociaux, normalise les tentatives pour faire taire littéralement, pour « annuler » – les opinions considérées comme illégitimes. On la voit aujourd’hui défendue, non seulement outre-Atlantique par des militants radicaux, qu’ils soient féministes, anti-homophobes, anticolonialistes, antiracistes ou anti-appropriationnistes (refusant que des productions culturelles soient reprises par d’autres que les membres des « communautés » dont elles sont censées être issues), mais aussi par des sympathisants français des causes ainsi défendues. En face, ce sont jusqu’à présent les conservateurs qui tiennent le haut du pavé dans la dénonciation de ces pratiques tel, hélas, un certain Donald…

Il est temps de sortir de cet affrontement « trumpeur » entre censeurs « de gauche » et anti-censeurs « de droite », car la censure que promeuvent et pratiquent ces nouveaux « annulateurs » n’a rien de progressiste, en dépit du crédit que leur confère la légitimité de leurs causes aux yeux d’une partie de la gauche. Et elle n’a rien à faire sur notre territoire, pour une raison que semblent ignorer les partisans de la cancel culture.

Ce qu’ils ignorent, en effet, c’est que son ancrage dans la société nord-américaine n’est pas l’effet de la prégnance dans leurs pays des maux contre lesquels luttent souvent à juste titre ces militants; il est avant tout le produit d’un système juridique spécifique : le premier amendement de la Constitution américaine, tout comme l’article premier de la Charte canadienne des droits et libertés, fait de la liberté d’expression un « droit fondamental positif », rendant a priori anticonstitutionnelle toute entrave à ce droit.

Or, tout autre est le système juridique français, où la liberté d’expression est d’emblée contenue dans des lois qui la restreignent, en interdisant, par exemple, l’incitation à la haine raciale, l’appel au meurtre, l’encouragement à la discrimination en raison du sexe ou de l’orientation sexuelle, ou encore le négationnisme.

Au risque de l’arbitraire

La différence est patente : là où, en France, la liberté d’expression est encadrée par la loi, en Amérique du Nord elle ne peut guère être bridée que par la mobilisation publique. Ce n’est plus le droit qui la régit, mais les simples citoyens, au risque de l’arbitraire et de la guerre civile larvée. D’où ce qu’on a appelé à partir des années 1980 les culture wars, avec les manifestations massives contre des expositions artistiques ; et d’où, aujourd’hui, les mobilisations sur les campus et les réseaux sociaux pour priver de parole, voire de poste, ceux dont les propos sont jugés déplacés, offensants ou simplement déplaisants.

Les appels au lynchage médiatique se donnent libre cours, au mépris de la liberté académique et de la liberté de la presse, aboutissant à empêcher les enseignants, les chercheurs et les journalistes de faire, tout simplement, leur métier. Soit on intime aux « mal-pensants » l’ordre de se taire, soit on se tait soi-même pour éviter de se retrouver dans la prochaine charrette.

La cancel culture n’étant rien d’autre que la conséquence du sous-développement juridique nord-américain en matière de liberté d’expression, son importation en France est absurde et ne témoigne que de l’ignorance ou du déni de notre culture juridique. Car c’est la loi qui protège les libertés beaucoup plus sûrement que l’absence de loi.

Que personne dans notre pays n’ait le droit de s’instituer censeur, ni juge à la place des juges ni policier à la place des policiers, parce que l’encadrement de ce qui est licite ou illicite relève de la représentation démocratique par l’intermédiaire du législateur, de l’institution judiciaire et de la police : voilà ce qu’ignorent, ou feignent d’ignorer, les partisans français de la cancel culture, qui ne s’autorisent que d’eux-mêmes lorsqu’ils s’arrogent le droit d’empêcher une représentation théâtrale parce qu’elle leur paraît irrespectueuse des droits des minorités, une projection cinématographique parce que le réalisateur a fait l’objet de plaintes en justice ou une conférence parce que son auteur serait « homophobe » – sans autre forme de procès.

Ainsi, ce qui se nomme ailleurs cancel culture devrait être clairement désigné, chez nous, par le seul terme adéquat : « culture de la censure ». C’est pourquoi, quelle que soit la justesse des causes défendues, l’on ne peut se contenter de condamner les « excès » de ces militants radicaux tout en suggérant que la fin justifie malgré tout les moyens.

L’on doit poser fermement la seule question qui vaille : quelles sont la légitimité et la légalité des méthodes utilisées par ces nouveaux censeurs ? Faute de quoi la gauche risque de sombrer à nouveau dans les tentations totalitaires qui en ont assombri l’histoire, depuis la Terreur révolutionnaire jusqu’aux horreurs staliniennes. Et faute de quoi aussi nous ne vivrons plus dans un Etat de droit, ni dans une démocratie, mais dans l’équivalent, à l’échelle des réseaux sociaux, de ce que fabriquait naguère le ragot de village : le contrôle social sans appel, sans merci, sans recours.

« Entre le fort et le faible, c’est la liberté qui opprime et c’est la loi qui affranchit », affirmait magnifiquement Lacordaire (1802-1861). Est-ce à croire que ceux qui, aujourd’hui, prétendent à la liberté sans limites d’interdire la parole à leur prochain voudraient en revenir à la loi du plus fort la loi de la meute ?

Note(s) :

Nathalie Heinich est sociologue. Chercheuse au CNRS, elle a publié de nombreux ouvrages et articles sur le statut d’artiste, l’art contemporain, la question de l’identité, l’histoire de la sociologie et les valeurs. Elle vient également de publier un article intitulé « Nouvelles censures et vieux réflexes totalitaires » dans le n° 82 de la revue Cités

[Patriarcat imaginaire] – Pascal Picq ou la paléoanthropologie façon MadMoiZelle

Depuis que les préhistoriens ont le cerveau mangé par le féminisme, je ne donne plus très cher de leur évolution.

Le Collège de France est-il devenu l’arrière-boutique du forum féministe MadMoiZelle ? C’est à ce constat tragique que conduit la découverte de la bouillie victimaire répandue ces jours-ci par Pascal Picq sur les canaux habituels de la propagande néoféministe : « Domination masculine, violences faites aux femmes… Pascal Picq fait parler les singes et la Préhistoire », France Inter (FI), « Pascal Picq, une préhistoire du patriarcat », France Culture (FC), « Comment les hommes ont-ils inventé le patriarcat ? », L’Obs », etc. Ou comment un chercheur réputé en arrive à se saborder intellectuellement pour complaire au conformisme ambiant et se faire adouber par les forums de la « cancel culture ». Que la honte s’abatte sur lui.

Même s’il ne s’agit que de pures élucubrations, d’authentiques divagations sans aucune base scientifique et sans la moindre possibilité de vérification, celles-ci nous sont présentées comme le changement paradigmatique du Grand Soir. « Plus que d’apporter des réponses, il s’agit de poser des questions et proposer des hypothèses autour d’un sujet encore en chantier » (FC), prend-on pourtant la peine de nous préciser.

De simples hypothèses, donc. Mais en l’occurrence ici, de l’idéologie et de la sociologie bourdieusiennes à l’état chimiquement pur : « Nous, les Homo sapiens, (…) nous rajoutons en plus, avec notre évolution culturelle, les formes symboliques dont avait déjà parlé Pierre Bourdieu sur « la domination masculine », gneu gneu gneu (FI). Revoilà donc encore saint Bourdieu et sa « domination masculine », comme c’est original ! Mais avez-vous envisagé un seul instant que vos hypothèses soient fausses et que vos bourdieuseries soient un jour balayées comme les prurits déconstructivistes et néo-marxistes qu’ils sont ?

Et que faites-vous du doute, dont vous parlez du bout des lèvres au détour d’une phrase ? « Nous sommes sans doute l’espèce la plus violente et coercitive entre hommes et femmes aujourd’hui » (FI). « Sans doute », oui, vous faites bien d’être prudent ! La vérité, c’est que vous n’en savez rien ! D’autant que c’est FAUX et que votre maître à « penser », Françoise Héritier, plus idéologue et militante que scientifique, racontait déjà n’importe quoi sur le sujet ! Car non, bien sûr que non, les hommes ne sont pas les mâles les plus violents de la création : tous les mâles sont violents et tuent leurs femelles, absolument tous, y compris les singes, et vous êtes bien placé pour le savoir ! Alors pourquoi colporter encore et toujours ces sornettes ?

Sous la désolante influence du féminisme radical et de son mentor Françoise Héritier, Pascal Picq en est donc réduit à ravaler toute la paléoanthropologie à cette phraséologie victimaire éculée, cette pleurnicherie professionnelle qui veut « questionner le machisme » : « Toute l’archéologie a été marquée par cette culture extraordinairement machiste du XIXe siècle, qui s’est inscrite dans l’université et qui n’a jamais été questionnée », haan… (FC). Eh oui, l’université française aux mains des féministes n’est plus que ce pitoyable défilé d’intellectuels en carton qui « questionnent le machisme » à plein temps depuis que c’est devenu obligatoire. Une collègue féministe de P. Picq, la grande intellectuelle Camelia Jordana, « questionne » au même moment « les peurs » qui font que « les hommes blancs sont, dans l’inconscient collectif, responsables de tous les maux de la Terre » (il y a du niveau, comme on le voit). Le plus drôle est que Pascal Picq se croit novateur et original quand il n’est qu’un parangon du conformisme féministe le plus convenu : « J’ai voulu m’extraire des stéréotypes ou des idéologies propres à une partie des sciences sociales par un regard neuf, une approche scientifique évolutionniste » (Le Monde). Ha ha.

Pascal Picq va même jusqu’à nous inventer le « féminicide » préhistorique : « Le féminicide est le propre de l’homme. Le pire ennemi de la femme, c’est l’homme et aujourd’hui les chiffres sont là », ouin…. (FC). Alors que ce concept, qui n’a aucun sens, n’est validé ni par la langue, ni par le droit : « Le terme de ‘’féminicide’’ contrevient à l’universalisme du droit français ». Quant aux chiffres, ils nous disent en réalité que les hommes sont toujours et partout davantage victimes de la violence que les femmes (lire : L’exploitation féministe des violences conjugales). Mais le verbiage victimaire ne s’arrête pas là : « Car l’histoire des femmes est longtemps restée invisible » ; « l’idéologie patriarcale domine », han, snif… Le chapelet nous sera égrené dans son intégralité : Pascal Picq est un élève très scolaire qui a bien appris sa leçon.

Cette manière consternante de réviser toute l’histoire de l’humanité à l’aune du prisme victimaire d’obsessions anachroniques – très marquées à l’extrême gauche qui plus est – est une faute épistémologie très grave, indigne d’un véritable intellectuel. Ceci nous dresse en tout état de cause un tableau affligeant de ce à quoi le coeur de la vie intellectuelle française est désormais réduit : un galimatias néoféministe pour obtenir des subventions, des viatiques, des postes à vie ou des micros qui se tendent dans les médias de gauche. Quelle que soit la discipline, on retrouvera toujours exactement la même grille d’analyse et exactement les mêmes conclusions écrites à l’avance : tout est toujours de la faute du « patriarcat » ; lequel « patriarcat » ne s’incarne naturellement que dans le mâle blanc occidental, personnification du mal absolu. Autrement dit, n’importe quelle contributrice de MadMoiZelle pourrait rédiger en quelques secondes les conclusions de tous les ouvrages de Pascal Picq : « Ouin ouin, nos zhoms, y sont vrément tro méchaaants !! Patriarcâââât !!!! ».

Pascal Picq avec des cheveux rouges

L’art pariétal et le jargon victimaire

Pascal Picq nous ressert également tous les lieux communs de l’inculture féministe, ce qui est aussi surprenant qu’impardonnable venant d’un préhistorien : « Car il existe très peu de représentations de l’évolution humaine où figurent des femmes » (FC). On se pince ! Tous les historiens et historiens de l’art savent parfaitement que les femmes sont omniprésentes dans les artefacts préhistoriques ou l’art pariétal et que les plus anciennes figurations anthropomorphes, dont les célèbres Vénus préhistoriques (environ 30 000 ans avant J.-C.), sont toutes des femmes ! De même qu’il est parfaitement de mauvaise foi de les accuser de dire que « c’est toujours l’homme qui peint la fresque et la femme qui empile les pigments » (FC) quand cela fait des lustres que l’on sait que les femmes sculptaient l’ivoire des défenses de mammouth et que leurs mains en négatif ou en positif étaient soufflées au pochoir au même titre que celles des hommes ! Ce charabia féministe victimaire sur « l’invisibilisation » des femmes n’en est que plus ridicule : « Ce thème [de la femme] a toujours été invisibilisé » (FI), mais n’importe quoi ! P. Picq doit pourtant concéder que « certes, on connait Lucy, la femelle singe australopithèque », oui mais gna gna gna, ouin ouin, y a pas de fââââmes à la préhistoire, bouhouhou… Quand ce cinéma s’arrêtera-t-il ? Les femmes de la préhistoire, on ne représentait qu’elles et on ne parle que d’elles depuis que l’archéologie existe !

« L’Origine du monde » de la Préhistoire (Paléolithique supérieur, environ 20 000 ans avant J.-C.). Bloc de grès gravé situé dans la forêt de Fontainebleau (France).

Le modèle des singes et des bonobos

Pour vendre son livre avec l’appui du marketing féministe, Pascal Picq établit une hiérarchie implicite au sommet de laquelle il place la « Fââââme », cette précieuse victime hautement sacralisée, immédiatement suivie par le modèle idéal du bonobo ; et il place tout en bas, comme il se doit, l’homme de sexe masculin, véritable et unique rebut de l’évolution.

Force lui est d’abord de concéder que « les chimpanzés sont très coercitifs, et traduisent un antagonisme sexuel très fort où tous les mâles dominent toutes les femelles. C’est un rapport qui reste assez violent » (FI). Bigre… Alors qu’il venait tout juste d’expliquer que la domination masculine n’était qu’un produit de la culture humaine, c’est ballot ! (« Les causes principales de notre malheur sont d’ordre culturel »). Alors les causes du malheur de la femelle chimpanzé, notre cousine, elles sont de quel ordre ? Leurs maris regardent trop de porno, eux aussi ? La « culture du viol » est trop prégnante sur leurs campus universitaires ? Qu’à cela ne tienne, la logique et la cohérence ne sont de toutes façons que des oripeaux rationalistes dont le féminisme a appris à se passer depuis fort longtemps.

Le bonobo bien couillu, nouveau gendre idéal.

« Mais l’existence des bonobos, dont les sociétés sont égalitaires, bla bla bla »… On nous présente derechef l’archétype parfait de cette gynocratie tant fantasmée, le fameux bonobo : « Puis vous avez les bonobos qu’il faudrait presque inventer s’ils n’existaient pas car, chez eux, le rapport mâles/femelles, au contraire, est plutôt sympa. Ils vivent en une espèce de gynocratie (le pouvoir est exercé par des femelles). Les mâles restent ensemble toute leur vie, les femelles migrent à la naissance et trouvent le moyen d’installer un équilibre des pouvoirs, ce qui est une exception » (FI). Lol ! Comment peut-on être plus caricatural…

Surtout quand on sait que la vie chez les bonobos est en réalité loin d’être aussi idyllique : « La violence existe aussi dans cette société «égalitaire et tolérante», en témoignent les fréquentes mutilations physiques dont ils sont victimes. » De même, « ces cousins de l’homme au caractère pourtant pacifique et coopératif semblent privilégier les personnalités dominatrices et brutales, selon une nouvelle série d’expériences. » Ou encore : « En 2014, l’équipe de Michael Wilson (université du Minnesota, États-Unis) a montré, pour 22 communautés de chimpanzés et bonobos, que 92 % des attaques sont provoquées par des mâles, qui constituent également les trois quarts des victimes » (cf. « Les grands singes sont-ils violents ?« ). Encore pire que chez les humains, donc. Soupir…

Il est inutile de multiplier les exemples, on a tous compris que cette idéalisation puérile des bonobos n’était là que pour satisfaire le féminisme séparatiste et revanchard et salir la masculinité ; procédés idéologiques fort bien connus, très peu reluisants et bien peu scientifiques.

Cet angélisme rousseauiste frise encore le ridicule : « Il n’y a pas de fatalité naturelle et universelle prédisposant à la violence » (FI). Mais c’est bien sûr, voyons, la violence n’est que culturelle ; d’ailleurs il suffira de venir prêcher le féminisme sur France Inter pour faire disparaître les crimes, tout le monde le sait. Comme le dit Camile Paglia, « l’université moderne ne comprend rien au mal », mais vraiment rien… Le plus grave étant que ce féminisme béat de gauchistes niais continuera encore longtemps à mettre les femmes en danger.

« L’évolution créa la femme », c’est cela, oui…

Le titre même de l’ouvrage dont Pascal Picq vient faire la promotion (« L’Évolution créa la femme ») est lui-même tout-à-fait ridicule, puisque si la biologie a créé les différences sexuelles, les deux sexes ont ensuite évolué tous les deux ! Comme si la femme seule était tributaire de l’évolution, comme si l’homme de sexe masculin était resté ad vitam un chimpanzé arriéré ou un sous-produit de l’évolution… Comment peut-on afficher une telle misandrie sans que personne ne réagisse ?

Et surtout quand toute l’histoire de l’évolution nous apprend au contraire que ce n’est pas la femme mais l’homme qui s’est le plus détaché de la nature ! En effet, comme nous le rappelle Eugénie Bastié (par exemple dans cette conférence), le masculin est beaucoup plus construit que le féminin. Camille Paglia insistait sur la même chose : avec les cycles menstruels, la grossesse, l’accouchement, l’allaitement, le soin des enfants, etc., la femme est, par ses fonctions biologiques, bien davantage soumise que l’homme aux cycles naturels et aux pouvoirs « chtoniens », comme elle dit. Même ses humeurs dépendent de ses cycles menstruels, sur lesquels elle a toujours bien peu de prise, malgré la contraception – la contraception elle-même modifiant sa nature ou l’altérant.

La masculinité est essentiellement une construction sociale, quoi qu’en pense Pascal Picq. On naît femme, mais on devient homme ; Beauvoir avait tort et elle aurait mieux fait de laisser en paix la formule bien plus égalitaire et humaniste d’Erasme, « On ne naît pas homme, on le devient » (‘‘Homines non nascuntur sed finguntur’’) – il parlait du genre humain. Ainsi, contrairement aux femmes, les hommes ont toujours eu besoin de rites de passage pour devenir des hommes. Inversement, la féminité va tellement de soi qu’il n’y jamais eu de « crise de la féminité » – alors que de la masculinité, oui, et nous sommes en plein dedans. L’évolution a beaucoup plus modelé et transformé les hommes que les femmes – et particulièrement la civilisation. Mais ce n’est pas parce qu’une chose est « construite » qu’elle doit nécessairement être « déconstruite » ! C’est ici à nouveau l’occasion de répéter que le concept de « patriarcat » au sens de « domination masculine », dont Pascal Picq se gargarise, n’est qu’une chimère 100% idéologique qui ne sert qu’à faire tourner le business néoféministe :

Comme le rappelle également Eugénie Bastié, le « patriarcat » n’a d’autre raison d’être que biologique et évolutionnaire. Les hommes étaient bien obligés de déléguer la grossesse aux femmes et de fait, pour garantir leur paternité, de surveiller et privatiser le corps des femmes (vers 1h13). Il est quand même facile de comprendre qu’aucun homme n’a envie de risquer sa vie pour ramener au foyer des ressources pour élever les enfants du voisin ! Et c’est encore et toujours la principale raison qui déclenche la jalousie ou la violence masculines. La pleurnicherie féministe n’a donc ici aucune raison d’être : « l’auteur montre à quel point le contrôle de la production et de la reproduction de la femme a été un enjeu dans l’histoire de l’humanité » (L’Obs). Évidemment, ça tombe sous le sens ! Mais il n’y a pas de quoi aller s’inventer une oppression imaginaire ou partir dans des délires paranoïaques pour cela…

De même, pendant des siècles, la force physique des hommes était à la fois une menace, une nécessité pour les travaux quotidiens et une sécurité pour défendre sa famille ou sa communauté. Aujourd’hui, elle n’est plus d’aucune utilité sociale; raison supplémentaire qui fait que le patriarcat n’existe plus. Par ailleurs, les hommes n’ont certainement pas « inventé le patriarcat », comme le titre l’Obs, sans le concours actif des femmes, qui l’ont toujours plébiscité à égale hauteur (pour la protection qu’il leur apportait, notamment). Et parce que c’est ce « patriarcat » qui a bâti toute la civilisation humaine, tout simplement !

Assez de male bashing et d’attaques contre la civilisation !

Il y en a plus qu’assez de lire ce genre de choses : « D’après Pascal Picq, c’est l’évolution culturelle de l’homme qui doit être mise en cause » (FI), alors que c’est l’inverse qu’il faut comprendre : c’est l’évolution culturelle qui pendant des millénaires a civilisé et réduit la violence naturelle ! Assez de ce rousseauisme benêt ! Le « patriarcat » n’est dans les faits rien d’autre que la civilisation. Cette vieille lune gauchiste et déconstructiviste de la « tabula rasa » qui n’a d’autre but que de démolir la culture et la civilisation pour les livrer stupidement à la barbarie islamique (par exemple) est de plus en plus insupportable en ces temps de guerre.

Pascal Picq va même jusqu’à souscrire au féminisme intersectionnel : « la première classe des opprimés, ce sont les femmes » (FI). Ben voyons. Tous les mâles massacrés par la compétition intrasexuelle ou les guerres n’étaient pas opprimés, eux… Mais c’est normal de mourir assassiné quand on naît du mauvais sexe, pas vrai ? (lire :  « La vie d’un homme vaut-elle moins que celle d’une femme ? » (Le Point, juillet 2019). Jusqu’où cette débandade intellectuelle va-t-elle aller ? Qu’est-ce que cette politisation délirante d’extrême gauche peut bien apporter à la paléoanthropologie ? Il en va de même quant à sa compromission dans la rhétorique de la « guerre des sexes » : « A quand remonte cette guerre constante faite aux femmes par les hommes ? » (L’Obs), gnéé…. On se croirait décidément sur le forum de MadMoiZelle… Toutes ces études pour en arriver là, à sangloter comme une nunuche qui ne se remettrait pas de son premier échec amoureux, c’est bien triste.

Je note encore les discours incohérents des préhistoriens, entre ceux qui prétendent abusivement que le « patriarcat » serait né en même temps que l’agriculture et ceux qui réfutent ces billevesées : « Les sociétés où il y avait des équilibres de pouvoir entre les hommes et les femmes ont existé même avec l’émergence des agricultures » (L’Obs). Tout et son contraire, donc. Alors maintenant, le mieux serait peut-être que vous cessiez tous de vous (et de nous) saouler avec votre « patriarcat », ce concept insane qui ne sert plus qu’à vous estampiller pour la postérité comme des benêts. J’avais déjà abordé ces questions ici :

Je constate donc avec consternation que Pascal Picq vient encore de remettre une pièce dans la machine (à sornettes). « Entre biologie et culture, les sciences humaines ont du mal à s’y retrouver », conclut France Inter et en effet, comme on vient de le voir, les noyades corps et âmes sont nombreuses !

[à suivre…]

  • Voir aussi :

… Et parce qu’on peut encore rêver d’une préhistoire qui ne soit pas polluée par le féminisme, quelques images mises en musique de la Guerre du feu de Jean-Jacques Annaud :

Thérèse Hargot : « Moi, les hommes, je les aime ! »

Thérèse Hargot : « Moi, les hommes, je les aime ! », in Le Figaro, 13/10/2020.

La sexologue et essayiste* répond aux livres d’Alice Coffin et de Pauline Harmange, qui font l’apologie de la détestation des hommes. Forte de son expérience de thérapeute, elle éclaire la complexité des relations entre les sexes.

*Auteur de plusieurs ouvrages, Thérèse Hargot a notamment publié Qu’est-ce qui pourrait sauver l’amour, Paris, Albin Michel, 2020 (208 p., 17,90 euros).

Moi, les hommes, je les aime ! Oui, tous. Je veux le clamer haut et fort. Je ne vous parle pas de certains hommes, de mon père, mes quatre frères, mes amis, mes deux fils, ni de l’amour de ma vie. D’ailleurs, je ne suis pas de celles qui auraient eu une enfance merveilleuse peuplée d’hommes admirables, ce qui justifierait, peut-être, une telle déclaration en pleine guerre des sexes. J’avouerais même avoir été profondément déçue par eux, et l’être encore souvent aujourd’hui. Et pourtant, je veux déclarer publiquement mon amour pour les hommes, les hommes en général. J’aime la gent masculine, j’aime le masculin. Les hommes me sont indispensables, je ne souhaite en aucun cas me passer de leur présence, de leur regard, de leur amour, de leur corps. Ni de leurs livres, leurs films, leurs musiques.

Les hommes nous donnent beaucoup de raisons de les aimer. Prenons par exemple ce que l’on nomme souvent l’« égoïsme masculin » qui s’évalue désormais au travers d’une notion sociologique imposée par les féministes : « la charge mentale », ce « poids psychologique » que représente l’ensemble des tâches domestiques et éducatives, reposant principalement sur les femmes. J’aime les hommes parce qu’ils sont capables de dire « J’ai pas envie », et de ne pas le faire. D’abord, c’est vrai, ça m’a révoltée. « Moi non plus, j’ai pas envie de faire les machines, les repas, les courses. On s’en fiche de nos envies, tu entends ça ? On doit le faire, c’est tout. Et il faut bien que quelqu’un s’y colle ! » , ai-je pu si souvent crier. Jusqu’au jour où j’ai compris la raison de mon énervement : ils s’autorisent ce que je ne m’étais jamais autorisé à faire, m’écouter, vivre mes envies. Quitte à dépérir intérieurement, quitte à m’épuiser littéralement. Imaginer ce que les autres attendaient de moi, imaginer ce qui leur ferait plaisir, imaginer ce qu’il serait bien moralement de faire et m’y conformer, pour tout ça, j’excellais. Dans les faits, j’attendais toujours un « merci », un « tu es formidable » et de mes enfants, un « tu es une super maman ». Je me pensais généreuse, dans le don de moi-même, « femme-courage », « femme-dévouée », « femme-aimante », alors que j’étais totalement centrée sur ma quête de reconnaissance, mon besoin de validation : « Dites-le que je suis quelqu’un d’aimable ! », parce que dans le fond, la seule à en douter, c’était moi. « Si tu changes, si tu t’investis davantage dans les tâches ménagères, si tu me remercies et si tu reconnais tout ce que je fais pour nous, alors moi j’irai mieux », penser cela était mon erreur.

Vivre avec un homme à l’état d’esprit différent du mien m’a permis de comprendre que le changement, c’est à moi de l’opérer. C’est à moi d’arrêter de culpabiliser, à moi de lâcher-prise, à moi d’accepter l’imperfection, à moi de me rassurer quant au fait que je suis aimable. En vérité, la « charge mentale », c’est une création de l’esprit dont souffrent les femmes « control freak », angoissées par l’idée de mal faire, ne supportant pas que les choses soient faites autrement qu’elles les avaient pensées, empêtrées dans leur besoin de réassurance narcissique empêchant, de ce fait, à l’homme de s’investir à part égale dans le foyer. Ce n’est pas une création d’un patriarcat, le problème n’est pas chez les hommes, il est à résoudre chez les femmes.

Prenons, pour autre exemple, le rapport des hommes à la sexualité, qu’il est devenu commun d’appréhender, quant à lui, au travers des « violences sexuelles » . Je passe mes journées à écouter la vie sexuelle des Français dans le cadre de mes consultations et, depuis mon poste d’observation, mon amour pour les hommes ne cesse de grandir. Ce que l’on dit d’eux est faux. Premièrement, les garçons sont aussi nombreux que les filles à avoir été victimes d’agressions sexuelles alors qu’ils étaient mineurs, sans compter l’exposition massive bien qu’illégale de la quasi-totalité des garçons à la pornographie, souvent dès l’enfance, et qui conduit aux mêmes conséquences psychologiques, relationnelles et sexuelles désastreuses. Les corps, les coeurs, les imaginaires des hommes sont aussi blessés, voire certainement plus encore que ceux des femmes.

Deuxièmement, la sexualité masculine est considérablement plus psychologique que nos mères et nos éducatrices n’ont cessé de nous le faire croire : « Les garçons ne pensent qu’à ça, eux ! », « Ils ont besoin de ça, eux ». Ce sont des femmes qui perpétuent des idées fausses sur la sexualité masculine et des stéréotypes sexistes qui bloquent l’évolution de la sexualité au sein des couples. Leur besoin de tendresse, de sensualité, d’amour est aussi important que celui des femmes. Troisièmement, les hommes souffrent d’être sans cesse sollicités sexuellement par la publicité pour provoquer l’acte d’achat nécessaire à la société de consommation. Biberonnés à la culture porno, ils sont parfois rendus esclaves de leurs pulsions sexuelles. C’est un fait. Un fait qui n’excuse en rien leurs comportements irrespectueux. Seulement, les hommes ne sont pas des « porcs », certains le deviennent.

Je pourrais vous parler de mauvaise foi, de paresse, de médiocrité, d’humour vulgaire, d’orgueil, de volonté de puissance, de violence… Les hommes sont des êtres fondamentalement imparfaits, c’est indéniable. Et voilà pourquoi ils sont infiniment aimables. Ceux qui se targuent d’embrasser la cause féministe, ce sont des hypocrites. Moi, les hommes imparfaits, je les aime ! C’est leur humanité que j’aime car elle me permet d’accueillir la mienne. Sur ce terrain-là, nous sommes parfaitement égaux.

Le problème fondamental des féministes postmodernes est de penser que les hommes sont responsables de la souffrance des femmes et de leur situation au sein de la société. Chacun de leurs défauts ou graves manquements au respect des femmes est alors monté en épingle pour prouver leur culpabilité. Elles se pensent victimes d’une domination masculine et agissent en fonction de cette grille de lecture manichéenne, infantile. Dire « Les hommes tuent les femmes. Sans relâche. Ils les violent. Sans cesse. Ils les agressent, les harcèlent, les enferment, les exploitent » et placarder dans la ville « Papa a tué maman » est à la fois une généralisation mensongère et une stratégie perdante.

Le féminisme revanchard, vengeur et justicier nous condamne à percevoir dangereusement les relations entre les hommes et les femmes, à être en perpétuelle alerte. Et la peur, justement, provoque l’agressivité. Ce pseudo-féminisme ne produit rien d’autre qu’une surenchère de violence. La vengeance ne résout rien, jamais. C’est pourquoi la justice existe.

C’est à chacune et à chacun que revient la responsabilité de son bonheur. Les femmes ne s’aiment pas assez, voilà pourquoi elles éprouvent tant de ressentiments envers les hommes. Le changement, c’est d’abord en soi-même qu’il faut l’opérer pour l’incarner. « Nous ne pourrons pas corriger quoi que ce soit dans le monde extérieur, que nous n’ayons d’abord corrigé en nous » , disait Etty Hillesum : les hommes nous suivront. Car être adulte, c’est quitter sa posture de petite fille, celle de dépendante affective, de victime, de donneuse de leçon, de rebelle. Nul besoin de rabaisser l’autre pour trouver sa juste place, il suffit d’avoir confiance en soi. Être adulte, c’est admettre la différence et y voir une opportunité de croissance. L’acceptation de l’altérité, c’est elle qui permettra à l’amour d’exister et la guerre des sexes de cesser, enfin.

  • Voir aussi :
  • Dans le même ordre d’idées, quel plaisir de voir la belle et talentueuse Maïwenn prendre la défense du cinéma de qualité et envoyer paître les féminystériques, au grand dam du politburo de l’Église de la Pleurnicherie Universelle : Maïwenn tacle les féministes et prend la défense de Roman Polanski. Elle le fait à l’occasion d’une interview au sujet d’ADN, son dernier film qui traite de son grand-père algérien, mais pour le coup, je trouve que son quart de gènes bretons s’exprime drôlement bien aussi : bienvenue au club des bretonnes rebelles ! 🙂

. Sur Maïwenn, voir aussi cet échange avec l’inquisitrice Laure Adler qui veut lui faire cracher de force qu’elle est féministe :

https://twitter.com/Mehdi_Aifa_AJR/status/1397782381180948481

Laetitia Strauch-Bonart – Pourquoi « patriarcat » ne veut plus rien dire (Le Point, 15/09/20)

Laetitia Strauch-Bonart, « Pourquoi « patriarcat » ne veut plus rien dire », Le Point, 15 septembre 2020

ÉDITO. Récemment, le secrétaire général de l’ONU expliquait que la pandémie de Covid-19 était le révélateur de « millénaires de patriarcat ». Vraiment ?

« La pandémie ne fait que démontrer ce que nous savons tous : que des millénaires de patriarcat ont produit un monde dominé par les hommes avec une culture dominée par les hommes qui nuit à tous – les femmes, les hommes, les filles et les garçons. » Cette phrase prononcée par le secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres le 31 août 2020, lors d’un discours à de jeunes femmes de la société civile, n’a pas été tirée de son contexte pour ridiculiser son auteur, mais tweetée par les Nations unies elles-mêmes. Elle défie pourtant les lois de la logique : à première vue, faute d’arguments à l’appui, on ne comprend guère en quoi la pandémie a un quelconque rapport avec le patriarcat, on ne saisit pas non plus comment on peut affirmer la prééminence en tous lieux de la « domination masculine », et on ne voit pas pourquoi cette « culture masculine » nuirait forcément « à tous ». Bref, Guterres a peut-être raison, mais rien ne permet, dans cette affirmation, de le savoir.

Quand on lit le discours dans son entièreté, on comprend mieux ce que Guterres veut dire : que les femmes ont été particulièrement impliquées dans la lutte contre la pandémie, puisqu’elles sont majoritaires dans le secteur du soin; qu’elles ont souffert économiquement, car elles sont aussi majoritaires, dans le monde entier, dans le secteur informel, et qu’elles ont endossé une part plus grande encore du travail non rémunéré; que la fermeture des écoles et le repli sur le foyer les ont exposées à davantage de violence. Mais on ne voit toujours pas en quoi c’est une preuve convaincante que le monde entier est patriarcal. En effet, d’un côté, comme l’ont montré de nombreuses études de psychologie comportementale, les femmes sont majoritaires dans le secteur du soin car elles sont plus intéressées par les professions liées aux « personnes » qu’aux « choses ». Le mot « intéressées » est important : il ne s’agit pas de compétences, mais de préférence. D’un autre côté, la discrimination et la violence à l’égard des femmes – bien plus forte dans certains pays en développement que chez nous – sont une manifestation évidente de systèmes patriarcaux. Le cas de l’activité économique est, lui, plus ambigu : que les femmes s’occupent davantage du foyer et des enfants que les hommes peut être autant le résultat d’un choix authentique que d’une contrainte.

Le danger des formules toutes faites

La pandémie de Covid-19 n’a donc pas révélé l’existence d’un omniprésent patriarcat, mais celle d’une division des tâches millénaires entre les deux sexes, qu’on peut ensuite discuter, voire contester. Pour certains, elle est une organisation archaïque à démanteler. Pour d’autres, comme le chercheur en psychologie devenu superstar Jordan Peterson, il s’agit d’une stratégie conjointe de survie face à l’adversité du monde. Pour d’autres encore, elle est à conserver quand elle relève du libre choix des individus, et à combattre quand elle revient à discriminer et violenter les femmes.

Ce tweet et plus généralement les affirmations de ce genre, qui sont récurrentes, ne posent pas problème en raison des idées qu’ils suggèrent, mais parce que leurs auteurs s’estiment dédouanés de justifier leurs dires par des arguments. Ils se contentent de répéter des formules toutes faites sans jamais les interroger, préférant l’automatisme de la parole à la compréhension du monde réel. Selon la dernière étude du Monde avec Ipsos-Sopra Steria sur les « Fractures françaises », 69 % des Français sont ainsi convaincus de « vivre dans une société patriarcale » où « patriarcal » signifie « une société où le pouvoir est détenu par les hommes. » Il est pourtant évident que le terme « patriarcat » n’a pas le même sens en Iran qu’en France, et même qu’il décrit bien mieux le premier pays que le second.

La prévalence de la parole automatique n’est pas seulement un problème intellectuel, c’est un obstacle à l’action, car quand on pense de travers, on agit rarement droit. Il suffit de constater que l’autoflagellation de Guterres est en totale contradiction avec ses actes : si la domination masculine dans les lieux de pouvoir le gêne tant, pourquoi ne laisse-t-il pas sa place à une femme ?

  • Voir aussi, sur la baudruche idéologique du « patriarcat » :

[Bigotes féministes] – Évidemment, que les seins ont une fonction érotique !

Si les féministes étaient un peu moins nulles en biologie (ou bossaient un peu mieux leur programme de SVT de quatrième), elles sauraient que chez la femme, les seins constituent un « caractère sexuel secondaire ». Puisqu’il faut sans cesse rappeler des évidences : « L’œstradiol et les autres hormones féminines engendrent le développement des seins chez la femme. Ce processus dépend aussi des taux d’hormones sexuelles au stade fœtal« , etc. Bref, les seins ont directement à voir avec le corps sexué, les hormones sexuelles – sans parler de leur rôle futur dans la sexualité – et surtout, pour ce qui nous intéresse ici, avec la différence des sexes, en particulier ce qu’on appelle le « dimorphisme sexuel »

Aussi, quand j’entends les féministes pleurnicher à longueur de journée que « Ouiiin, le « male gaze » (le regard des hommes) nous sexualise, c’est affreux !! Les zhoms, y regardent nos seins et ça les fait bander, ces cochons, on comprend paaas !! Il faut tous les rééduquer, c’est de la culture du vioool !! On veut pouvoir se promener torse nu dans la rue comme les zhoms, nos seins sont des torses, c’est exactement pareil !! », je me dis que ce féminisme est vraiment un trouble mental

Pour rappel, les seins ont deux fonctions principales : 

  • la fonction érotique invitant, par l’excitation qu’ils procurent, à la reproduction sexuelle, laquelle a pour finalité la perpétuation de l’espèce. Il est même connu que la vision des seins érotise également les femmes, hétérosexuelles aussi bien qu’homosexuelles (elles n’en ont pas forcément conscience, mais leur clitoris réagit fortement à leur vue). C’est la raison pour laquelle Titien, au XVIe siècle, peignait des Vénus dénudées que l’on plaçait dans la chambre des époux afin de les érotiser tous les deux (voir : Le plaisir féminin en peinture). D’aucuns (du type « gauchistes culturels ») contestent le rôle érotique universel des seins, ramenant cela à une construction culturelle purement occidentale (en clair : « patriarcale à abattre »). L’évolution nous confirme cependant que « dans l’ordre des primates, la femelle d’Homo sapiens est la seule à conserver une poitrine rebondie en dehors des grossesses et des périodes d’allaitement » et qu’il y aurait là un avantage évolutif : les seins seraient un signal de maturité sexuelle et de fécondité. A moins que ce ne soit la bipédie et la copulation frontale qui aient poussé les hommes à sélectionner les femmes avec des seins. Quoi qu’il en soit : les seins attirent les mâles pour faire du sexe depuis toujours, n’en déplaise aux fâcheux !
  • la fonction nourricière qui permettait l’allaitement et la survie des enfants dans les sociétés traditionnelles. Tout le monde sait aujourd’hui que les anticorps spécifiques du colostrum, de même que les acides aminés à longue chaîne contenus dans le lait humain, n’ont aucun équivalent dans les laits animaux. Mais pendant des décennies, les féministes ont violemment combattu l’allaitement maternel sur le thème « Ouais, on n’est pas des vaches ! » ; première des raisons pour lesquelles je les déteste depuis toujours. Je n’ai jamais oublié les propos de Marcela Iacub assimilant le lait maternel à du sperme et, dans la droite ligne des délires de la psychanalyse freudienne, comparant l’allaitement maternel à une fellation incestueuse. Certains des nouveaux courants féministes semblent toutefois revenir sur ces  postures et défendre l’allaitement maternel (un des rares points sur lesquels je suis d’accord avec elles).

Précisons que dans la vie d’une femme, ces deux fonctions peuvent se succéder en des temps différents, s’excluant alors l’une l’autre : un sein nourricier n’est (en principe) pas un sein érotique, pas plus pour la femme qui allaite que pour l’homme qui regarde.

Chez certains groupes traditionnels en Afrique ou ailleurs, certains observateurs occidentaux ont pu avoir l’impression que la fonction érotique des seins n’existait pas. Ceci s’explique vraisemblablement parce que la fonction nourricière, très prégnante, supplante la seconde et l’exclut momentanément. D’autre part, la fonction érotique des seins est globalement le propre de la femme jeune, puisque le vieillissement n’est jamais tellement l’ami des seins. Mais les seins frais aux tétons dressés des jeunes femmes nubiles est un signal universel (même si inconscient) de fertilité. Et c’est ici que l’on retrouve nos féministes et leur déni : les néo-féministes étant essentiellement des femmes jeunes en délicatesse avec le commerce amoureux et en lutte contre l’hétérosexualité et la maternité, le pouvoir érotique de leurs seins les met inévitablement en porte-à-faux. Il leur faut alors se persuader (et tenter de persuader les autres) que leurs seins sont des torses et le désir masculin un péché à déconstruire… encore plus s’il est le fait de l’homme blanc !

Manipulation et bigoterie, les deux mamelles du néo-féminisme

L’actualité regorge de ces postures néofem en pleine dissonance cognitive dès qu’il s’agit de leurs seins. La toute dernière est l’affaire du musée d’Orsay : « Son décolleté est jugé trop plongeant, le musée d’Orsay lui refuse l’accès » (09/09/20).

La miss du musée d’Orsay

Celui-ci fait suite à un épisode similaire survenu au cours de l’été 2020 où une fille en bustier imprimé serpent s’était fait interdire l’accès à une supérette du Var en raison de son décolleté.

La miss de la supérette du Var

Dans les deux cas, suite au tollé, les vigiles ont été réprimandés et ces femmes unanimement défendues. Moi-même, mon premier réflexe, dans le contexte actuel de burkinisation rapide de nos villes, a été de me dire que nous ne vivions pas sous la charia, que l’injonction sévère à la pudeur ne faisait pas encore partie de nos moeurs vestimentaires publiques et que c’était heureux. Toutefois, au vu des éléments dont on dispose, l’islam ne serait pour rien dans ces affaires – mais le féminisme bigot, oui, tout particulièrement à Orsay.

Car personne ne semble comprendre que nier l’érotisme des seins et faire mine de confondre une poitrine féminine avec un torse masculin est le summum du puritanisme. Et de l’hypocrisie, comme le confirment les milliers de sites internet à la gloire des seins féminins, largement fréquentés, on n’en doute pas une seconde, par les mêmes menteurs qui se rincent l’oeil devant les stupides Femen venues défendre la miss d’Orsay tout en déblatérant que « Ah mais non, les seins ne sont pas érotiques, pas du tout, on s’en fout, on ne les regarde même pas »… C’est cela, oui… Alors que personne ne s’intéresserait aux Femen et à leurs discours de communistes moisies s’ils étaient servis par de vieilles mochetés habillées de pied en cap – et elles le savent parfaitement, évidemment, que leurs seins sont leur seule force de frappe.

Ceci dit, les décolletés en question ne sont pas franchement indécents, tout au plus légèrement vulgaires ou déplacés. Objectivement, ces deux poitrines sont tout à fait agréables à regarder et on devine que leurs porteuses seraient plutôt à ranger dans la catégorie des narcisses vaguement hypocrites du type « m’as-tu-vu » avec leurs airs de pas y toucher : « J’ai de beaux seins, prends ça dans ta gueule. Hein, quoi ? Mes seins provoquent l’émoi ?! Mais gnééé, comment c’est possiiible ?!? Vraiment, je vois pas ! ». Non, bien sûr… continuez à prendre tout le monde pour des cons, faites comme si on ne vous voyait pas.

Néo-féministe et islamophile

Détail intéressant, la miss du musée d’Orsay, qui s’appelle Jeanne, est – quelle surprise – une de ces néo-féministes 2.0 anti-patriarcales et pro-voile (tout ce que j’aime…) ; le genre qui utilise sa poitrine pour provoquer sciemment tout en jouant les effarouchées, ce genre de coincée du cul qui va prétendre que ses seins n’ont rien de sexuel (« et pis, c’est ma liberté de les imposer à la vue de tout de monde si je veux »), mais qui va trouver normal que les cheveux d’une femme (et qui sait, d’une petite fille, puisque l’un ne va plus sans l’autre) soient pudiquement dissimulés – concédant donc implicitement un impact érotique aux attributs féminins, même les plus innocents.

Tweet de Jeanne en défense du voile islamique

Car Jeanne est une néofem bigote pro-voile et pro-islam ; ce qui, contrairement aux apparences, est parfaitement en phase avec son militantisme « d‘hyperfemelle » : dans tous les cas, l’idée est d’interdire aux hommes de regarder les attributs d’une femme, d’en penser quoi que ce soit ou d’être érotisés à leur vue. Naturellement, tous les bobos nudistes et faussement décoincés vont la défendre, lorgnant dans son décolleté comme des affamés tout en prétendant que ça n’a rien d’érotique – sans même comprendre qu’elle les prend tous pour des cons et qu’elle n’attend que de les traiter de sexistes et de machistes primaires si jamais ils faisaient le moindre commentaire sur ce qu’elle leur met sous le nez.

Un tweet de Jeanne :

Un retweet de Jeanne :

« On me sexualise »… Sans blague ?

En bonne militante, Jeanne nous place en interview sa rhétorique néoféministe bien rodée : « Je n’ai pas envie de mettre ma veste parce que je me sens vaincue, obligée, j’ai honte, j’ai l’impression que tout le monde regarde mes seins, je ne suis plus que mes seins, je ne suis qu’une femme qu’ils sexualisent ». Lol ! Il ne manque rien : la pleurnicherie, la fausse victimisation, la mauvaise foi, le déni, l’hypocrisie absolue et naturellement, le tour de passe-passe de l’abominable « sexualisation » des seins.

« Je ne suis qu’une femme qu’ils sexualisent » : la formule est d’autant plus malhonnête que c’est une femme qui lui a demandé de se couvrir : « La vue de mes seins et de mon apparat tout dépoitraillé choque une agente chargée du contrôle des réservations. (…) Je fais remarquer qu’il est profondément antidémocratique de me discriminer sur la base d’un décolleté, la même responsable pouffe de rire », avouait-elle dans son témoignage en ligne. Où est le patriarcat là-dedans ? Et pourquoi masculinise-t-elle ses interlocuteurs dans l’interview ? On connaît la réponse : une néofem qu se respecte doit toujours accabler le sexe masculin, toujours, partout, tout le temps. Même quand les responsables sont des femmes (en l’occurrence ici, elle et l’agente).

C’est ensuite l’occasion dans l’article de La Dépêche de réactiver le combat actuel des néofem contre les nus féminins dans l’art (l’objet même de ce site, voir « De l’art ou du cochon: les féministes au musée ») : « Et de faire remarquer que le musée comprend des tableaux de femmes nues et des sculptures de femmes nues… ». Ben voyons !

Les choses deviennent encore plus claires quand on lit les soutiens néo-féministes de la pseudo-victime d’Orsay :

« Rhabillez vos oeuvres ! » On les voit venir, avec leurs gros sabots, les néo-bigots qui s’en prennent aux représentations du corps féminin, à Manet et à Courbet, qu’ils ne supportent pas… Je ne connais que trop la chanson :

Les féministes et leurs seins (bis) : le mouvement Nobra (ou no bra)

Le mouvement #Nobra (une resucée du militantisme féministe des années 1960 qui encourageait les femmes à se débarrasser de leur soutien-gorge) ressortit de la même naïveté et du même déni du réel. Dans une vidéo Kombini qui circule actuellement, on voit une néofem dans la vingtaine s’extasier que ses seins « ne tombent pas du tout », après quatre ans d’arrêt du soutif… Mais encore heureux qu’elle ne les ait pas dans les chaussettes à son âge, il ne manquerait que ça !

Gala ne comprend pas du tout pourquoi « il ne fallait pas qu’on voie mon téton, alors que c’est le même que chez les hommes, je ne vois pas où est le problème », gnéé… On reste toujours sans voix devant de telles oies blanches. Même dans les couvents anciens, les filles étaient capables de comprendre le pouvoir érotique de leurs seins. Gala ne supportait pas non plus la forme bombée de sa poitrine avec un soutien gorge et il fallait qu’elle se « réapproprie son corps ». Bah oui, le male gaze, c’est du viooool ! Si quelqu’un remarque vos seins, votre corps ne vous appartient plus ! Puritanisme, quand tu nous tiens… Elle déroule ensuite tout le déni que je dénonce plus haut, et gna gna gna, faut pas sexualiser la poitrine, et gna gna, elle n’a rien à voir avec l’érotisme ou l’allaitement… Mais bien sûr…

À titre personnel, je ne crois pas un instant à la propagande comme quoi les seins ne tomberaient pas sans soutien-gorge. Il suffit de regarder les femmes amazoniennes ou africaines qui n’en portent pas :

Les images parlent d’elles-mêmes, et il n’y a même pas besoin d’invoquer le traditionnel « repassage » des seins. Si je pouvais apporter mon seul témoignage (mais qui pèse après tout aussi lourd que celui de la seule néofem de Kombini), je dirais que pour ma part, avec une poitrine de 90 passée à plus de 100, je ne supporte pas un instant de ne pas de porter de soutien-gorge (mais pas n’importe lesquels, j’ai banni les armatures et les choses inconfortables depuis fort longtemps) et qu’en ayant toujours pris soin, malgré plusieurs enfants et allaitements longue durée, ma poitrine ne tombe pas et n’a aucune vergeture. Je ne suis pas sûre du tout qu’il en serait de même sans avoir jamais porté de soutien-gorge… et j’aimerais bien voir les seins de la donzelle de Kombini dans 20 ans, qu’on compare ^^

De toutes façons, le soutien-gorge n’est pas un accessoire érotique

Gala a tout faux en s’imaginant que porter des soutiens-gorges revient à jouer le jeu des hommes et de leur regard sexualisant sur les femmes (l’abominable « male gaze » qui les pétrifie tant). La « libération » du soutien-gorge n’est en réalité qu’une obsession purement féministe et un combat dont les hommes se soucient comme d’une guigne. Ce qui les fait bander, les hommes, ce sont le galbe d’un sein ou d’un téton, de préférence sans soutien-gorge, devinés sous une étoffe : le ressort même de l’érotisme depuis toujours… Ils seraient donc plutôt favorables au délaissement du soutien-gorge, puisque c’est beaucoup plus érotique sans. Dans les années 60, sous l’impulsion du mouvement hippie, les hommes étaient même carrément contents de voir leurs copines jeter leur soutien-gorge aux orties. D’ailleurs, les féministes ont réalisé un peu plus tard qu’elles s’étaient peut-être un petit peu fait rouler dans la farine sur les bords avec cette histoire de libération sexuelle… d’où le tournant revêche et puritain qu’a pris le féminisme universitaire à partir des années 1980. Les féministes sont toujours de grandes naïves, ou plus exactement des petites filles qui refusent de devenir adultes.

Woodstock, 1969. Les seins n’ont rieeen d’érotique, on vous dit !

Une preuve que le soutien-gorge n’est pas un accessoire érotique ? Il n’existe aucune paraphilie, à ma connaissance, liée exclusivement au soutien-gorge, même chez les japonais, pourtant champions hors catégorie en matière de fétichismes invraisemblables. Les hommes qui fantasment sur les petites culottes féminines sont légion sur toute la planète, mais bien rares sont ceux qui adorent se branler dans un soutien-gorge. En tout cas, je n’en ai jamais entendu parler.

Ceci pour dire et redire que le pouvoir érotique est bien dans les seins, qu’on ne les désexualisera pas de sitôt et que renoncer au soutien-gorge mènera surtout à se désérotiser à coup sûr en transformant expresso ses seins en gants de toilette… ce qui est probablement le but recherché, consciemment ou inconsciemment, de ces féministes. On va donc les laisser à leurs chimères de monde sans sexe et à leur combat désespéré pour ruiner toute forme de dialogue érotique avec les hommes. Combattre les moulins à vent sera toujours leur grande spécialité.

Mais dans le fond… Pourquoi les féministes et leurs soutiens s’obstinent-ils à ce point à nier le pouvoir érotique des seins ?

C’est parce qu’ils savent bien que le sein érotique et la civilisation occidentale ont partie liée depuis des siècles. Que nos musées sont remplis de nus féminins et de seins érotiques. Qu’en Occident, les hommes ont toujours sculpté, peint, célébré… bandé sur les seins féminins. Le sein, c’est la pomme du péché de l’homme blanc. Alors tout cela, il faut le balayer, le nier, l’annihiler…

Image de couverture : Antonio Corradini, La Pudeur, 1752, marbre blanc de Carrare (Naples, chapelle Sanseverino)

La Pudeur (ou La Modestie) nous permet de mesurer à quel point l’Italie post-baroque était capable d’aborder avec humour et légèreté le corps érotique. Il ne fait aucun doute que le corps et les seins sculpturaux de cette allégorie, avec ses tétons fièrement dressés sous un léger voile moulant et transparent, seraient aujourd’hui qualifiés d’impudiques par les nouvelles mères-la-pudeur qui veulent « rhabiller les oeuvres » du musée d’Orsay.

Leur terreur du « male gaze » fait de ces dindes hurlantes perpétuellement effarouchées les pires puritaines que cette terre ait jamais porté. Le grotesque numéro des Femen à Orsay ne trompe que les naïfs et les masochistes car, tout comme celui de la manipulatrice d’Orsay, leur seul discours est : « Nous vous interdisons de jeter le moindre regard désirant sur les seins d’une femme ! Puisque les seins ne sont pas érotiques ! ». Quand les gens comprendront-ils ce que sont réellement ces féministes qu’ils défendent aveuglément ? Que ces khmers roses n’ont rien à envier aux khmers verts qu’ils découvrent en ce moment même à Bordeaux ou Lyon ?

  • Voir aussi :
  • Clitoris, vulve, règles, cellulite, pisse et merde : pour découvrir l’univers complet néo-féministe :
  • Sur le féminisme et la bigoterie :

Benjamin Edgard, « Féminisme : la bigoterie 2.0 ? », Marianne (25/06/2019) 

Élisabeth Badinter : Les outrances du néoféminisme guerrier

Élisabeth Badinter, « Les outrances du néoféminisme guerrier », Le Journal du Dimanche, 5/09/2020

Opinions & controverses

VOILA TROIS ANS que la déferlante MeToo a ouvert la voie à la parole des femmes. Elles ont pu dénoncer publiquement toutes les agressions sexuelles dont elles se disent victimes. Grâce à elles, la honte a changé de camp. Depuis lors, le néoféminisme a durci le ton et les méthodes. On ne se contente pas des agressions, on « balance » les agresseurs présumés. Ce faisant, les plus radicales qui se proclament activistes ont tourné le dos au féminisme d’avant MeToo. Elles ont déclaré la guerre des sexes, et, pour gagner, tous les moyens sont bons, jusqu’à la destruction morale de l’adversaire,

Armées d’une pensée binaire qui ignore le doute, elles se soucient peu de la recherche de la vérité, complexe et souvent difficile à cerner. A leurs yeux, les êtres humains sont tout bons ou tout mauvais. Les nuances n’existent plus. C’est le mythe de la pureté absolue qui domine.

À ce premier dualisme s’en ajoute un second, tout aussi discutable : les femmes, quoi qu’il arrive, sont d’innocentes victimes – et bien souvent elles le sont, mais pas toujours – les hommes, des prédateurs et agresseurs potentiels, y compris parfois à l’égard d’autres hommes. Ce qui autorise l’activiste Alice Coffin à déclarer : « Ne pas avoir de mari, ça m’expose plutôt à ne pas être violée, ne pas être tuée, ne pas être tabassée… Ça évite que mes enfants le soient aussi ». Et d’inviter les femmes « à devenir lesbiennes et à se passer du regard des hommes »…*

* Ces deux citations sont extraites d’interviews accordées à RT France en 2018 pour la première, et à National Geographic en 2019 pour la seconde.

En se fondant sur les statistiques des violences conjugales, on essentialise femmes et hommes dans des postures morales opposées : le bien et le mal, la victime et l’agresseur. Les perverses, les menteuses et les vengeresses n’existent pas. Il n’y a plus qu’à conclure au séparatisme, puisque l’homme est la plus dangereuse menace pour la femme.

Evoquer la violence féminine est interdit. Quand on insiste, on a toujours droit à la même réponse : si violence des femmes il y a, c’est pour se défendre de celle des hommes. La violence physique n’est pas inscrite dans le génome des femmes. La violence psychologique non plus. C’est peut-être oublier un peu vite les violences conjugales faites aux hommes, qui font l’objet d’un déni de réalité collectif**. Parler de ces dernières paraitrait relativiser celles dont les femmes sont victimes, et par conséquent trahir leur juste cause. Pour les mêmes raisons, on feint d’ignorer la part des mères dans les violences infligées aux enfants. Si la pédophilie est essentiellement masculine, les coups et autres maltraitances, y compris sexuelles, s’opèrent souvent avec la complicité de la mère**. Tout au plus parle-t-on de non-assistance à personne en danger.

** Selon l’enquête « Cadre de vie et sécurité » de l’Insee de 2019, plus du quart -28%- des victimes de violences conjugales physiques ou sexuelles auto-déclarées sont des hommes.

*** Voir le rapport de l’Igas (2018) et celui de l’Observatoire national de la protection de l’enfance (2020).

Si la violence féminine ne peut être qu’une réaction à la violence masculine et si la parole des femmes est sacrée, à quoi bon le doute et une enquête sérieuse avant de condamner ? On peut passer outre au filtre de la justice. Le lynchage médiatique et la mise au pilori s’appliquent sur-le-champ. Les accusatrices, solidement appuyées sur les réseaux sociaux, jugeant à la vitesse d’un clic, déclenchent un maelström surtout quand une personne publique est visée et que la presse s’en empare. Les conséquences sont accablantes pour l’accusé mis sur la sellette. C’est une mise à mort sociale, professionnelle et parfois familiale. On ne vous regarde plus de la même façon, vous êtes devenu suspect et toute tentative d’explication et de défense s’avère vaine. La seule solution est la plainte pour diffamation, qui peut attendre parfois des années avant d’être jugée ; et même blanchi, l’on continue longtemps de porter la marque de l’infamie. On dira que les femmes violées attendent elles aussi des années pour voir leur agresseur condamné et pouvoir se reconstruire. Mais l’un ne justifie pas l’autre.

En l’espace d’une année au moins, trois hommes en France ont été jetés aux chiens avant que la justice les lave des accusations portées contre eux : un journaliste, un ancien ministre et un trompettiste. Ce dernier a même été d’abord condamné à quatre mois de prison avec sursis, avant d’être blanchi quand on s’aperçut que la plaignante avait menti. Aujourd’hui c’est un ministre en exercice et l’adjoint à la culture du Conseil de Paris qui sont dans la tourmente. Les manifestantes qui réclament la « tolérance zéro » pour ceux accusés d’agression sexuelle n’ont rien à dire de celles qui ont menti, ou affabulé. Ces deux poids, deux mesures sont les conséquences d’une logique oppositionnelle et d’une méconnaissance stupéfiante des êtres humains. En soupçonnant les uns de tous les vices et en couvrant les autres du manteau de l’innocence, les activistes néoféministes nous mènent tout droit à un monde totalitaire qui n’admet aucune opposition.

Quant à la solution proposée de devenir lesbiennes et de se détourner du regard des hommes, elle ne peut que déclencher un immense éclat de rire. Cela ne vaudrait pas la peine d’être mentionné si ce n’était l’expression abrupte d’une haine des hommes que certaines ne sont pas loin de partager. Ce néoféminisme guerrier risque bien de déshonorer la cause du féminisme, voire de la rendre inaudible pour un bon moment. Tout le monde y aura perdu, et d’abord les femmes.

  • Voir aussi :

[Désespoir féministe] – Incelles et vénères, les néofems nous font visiter leur enfer

« Vous qui entrez ici, abandonnez toute espérance », Dante Alighieri (Auguste Rodin, Porte de l’Enfer, 1880sv).

L’affiche du week-end des féministes rurales (12-13 septembre 2020 entre Laval et Le Mans) nous a bien fait rire – il faut reconnaître à leur décharge que cette auto-caricature semble une manière plutôt drôle et efficace de couper l’herbe sous le pied aux persifleurs du camp d’en face.

Il est intéressant tout de même de relever que cette présentation apparemment second degré n’en est pour autant pas moins parfaitement premier degré. Le post-scriptum sous l’affiche nous éclaire sans ambiguïté sur l’extrémisme radical (à la limite du totalitarisme) de leur idéologie :

La dernière phrase baragouinée en inclusive est l’expression même de la profonde bêtise raciste et sexiste du néoféminisme contemporain. Et chez elles, ce n’est même plus de l’humour, c’est 100% premier degré :

Elles vont même encore plus loin que ce panneau, puisqu’elles font des féministes contemporaines uniquement des laiderons en surpoids de type punk à chiens, agressives et repoussantes, crachant leur venin sur tout ce qui ne leur ressemble pas : hétérosexuels des deux sexes, femmes qui s’épilent ou s’entretiennent physiquement et plus que tout, hommes et femmes blancs bien dans leur peau. Ceux-là n’auront pas droit à la parole et devraient même rendre des comptes. Il est amusant tout de même de voir l’inclusive leur servir à porter le fer contre les femmes blanches (« Le racisme anti blanc-he-s n’existe pas ») : n’oublions pas que ce nouveau féminisme communautariste et ségrégationniste a aussi comme ennemi les femmes (et les féministes) blanches.

Panneau du groupe Facebook « Sans blanc de rien », groupuscule néo-féministe et néo-raciste (mars 2021).

Désormais, le féminazisme ne se cache plus : si vous travaillez pour gagner votre vie, que vous êtes né blanc et de sexe masculin, que vous ne justifiez pas d’un handicap mental ou physique (et même si c’était le cas, vous resteriez de toutes façons un sous-homme car blanc, hétérosexuel et cis-genre; idem pour les gays qui resteront quoi qu’il arrive des hommes blancs), vous serez de facto interdits de séjour et fustigés comme des criminels. Car ici, on pratique l’exclusion pour mieux prouver qu’on est inclusifs. Ces féministes ont décidément des fils qui se touchent – je vais être traitée de psychophobe si je le fais remarquer, mais j’assume ! (et je compte bien continuer encore longtemps à dénoncer ces bêtises).

Bon, en vérité… quel homme blanc cis-genre ou même quelle femme blanche bien dans sa peau aurait envie d’aller se triturer les poils des mollets tout un week-end chez des hôtesses aussi revêches et mal embouchées ? À part pour sous-mariner (j’espère d’ailleurs que quelques taupes s’infiltreront pour nous raconter ce qu’ils ont vu et entendu), je ne vois pas grand monde pour aller sortir ces pauvres féministes de leur solitude et de leur entre-soi.

Car qu’est-ce que tout cela nous dit, dans le fond ?

Le néo-féminisme, faux-nez du désespoir affectif et du reflux du pouvoir féminin

Il m’apparaît de plus en plus évident que ces élucubrations, toujours plus intolérantes, ne sont finalement qu’une façade pour ne pas nommer le vrai problème des néo-féministes : elles se sont exclues elles-mêmes du champ de la séduction et de tout espoir de vivre un jour une vie amoureuse satisfaisante.

Enfermées dans leurs revendications toujours plus extensives, leurs anathèmes et leurs jérémiades, croyant « s’empouvoirer », comme elles disent (traduction pitoyable de l’empowerment des radicales américaines), elles ont en réalité perdu les fondements mêmes du pouvoir féminin : elles savent très bien qu’elles ont perdu la bataille de la compétition intra-sexuelle. De plus, ces féministes se vouent elles-mêmes à la disparition puisque leur nihilisme les empêche de se reproduire (même si, bien sûr, elles essaient en contrepartie de diffuser leur désespoir par contagion idéologique).

Le « dépouvoirement » néo-féministe

Le néo-féminisme victimaire, pleurnichant H24 pour extorquer le pouvoir absolu – les larmes féminines étant une tactique bien connue pour obtenir tout et n’importe quoi – est volontairement aveugle sur le pouvoir réel des femmes tout au long de l’histoire. Non seulement le sexe féminin a livré des femmes de pouvoir à la pelle (impératrices, reines, régentes, abbesses, mères supérieures… et même maîtresses ou courtisanes); les femmes de l’ombre ont toujours tiré les ficelles du pouvoir (Brigitte Macron a par exemple son mot à dire sur la composition du gouvernement, bien plus que certains conseillers masculins en poste – c’est elle, notamment, qui a imposé le maintien de Marlène Schiappa); mais plus encore, d’un point de vue anthropologique et du fait de l’hétérosexualité qui, doit-on le rappeler, a permis la survie de l’espèce et l’évolution, les femmes disposent naturellement d’un pouvoir considérable sur la gent masculine – ce que les travaux de l’évo-psy ou du darwinisme démontrent jour après jour. Seules les néofems victimaires, autodestructrices ou lesbiennes semblent l’ignorer totalement (sur le partage des pouvoirs sur le marché de la séduction, voir aussi François de Smet,  Les lois du marché amoureux, Paris, Flammarion, 2019).

Il semble donc que ce féminisme trash de plus en plus agressif soit pour ces femmes à la fois une tactique pour sauver la face – l’attaque étant la meilleure défense : la meute de bouledogues aux cheveux roses crachant à la figure de cis-mecs qui ne voudraient pas d’elles de toutes façons – et pour affaiblir la concurrence – les femmes séduisantes et bien dans leur peau étant fustigées et traitées de soumises au patriarcat :

L’attribut alt de cette image est vide, son nom de fichier est 117892871_1190614361313437_8102354438131147324_n.jpg.
« – Je ne suis pas d’accord avec le féminisme.
– Elle veut l’approbation des hommes ! »

Alors il faut, pour ces femmes en déshérence, affaiblir le plus possible les autres femmes, celles qui leur font de l’ombre en vivant tranquillement leurs vies de femmes. Grâce au néoféminisme, on voit ainsi des femmes interdire à d’autres femmes de gagner leur vie : « Les «grid girls» de la Formule 1 en colère contre les féministes » (Le Figaro, 02/02/18). Aujourd’hui, elles s’en prennent au cyclisme, mais comme elles ont encore oublié de réfléchir, elles retirent du boulot à des femmes… pour le donner à des hommes, pourquoi pas, lol ! (« Tour de France : l’organisation met fin aux traditionnelles hôtesses sur les podiums », L’Express, 20/08/20). On attend maintenant qu’elles imposent la même parité dans tous les métiers quasi-exclusivement féminins, comme l’enseignement, par exemple.

Les Incels, OK… mais si on parlait des Incelles ?

Les Incels sont ces jeunes hommes « involontairement célibataires » pour cause de néoféminisme et que ces dernières n’ont de cesse de moquer et de mépriser à longueur de posts sur les réseaux sociaux.

Car oui, on le sait, les femmes de 18 à 30 ans ont le beau rôle; elles sont à un âge où leur jeunesse et leur physique leur donnent tout pouvoir pour repousser et prendre de haut les garçons et hommes du même âge. Quinze ans plus tard, elles rigolent déjà un peu moins sur les Incels – car les pouvoirs se sont inversés. Leurs compagnons sont souvent partis pour une gamine de 25 ans et il leur est de plus en plus difficile d’en trouver un qui réponde à toutes leurs exigences – en général inversement proportionnelles à l’état du marché amoureux.

Mais un phénomène nouveau semble se dessiner – et c’est ce à quoi me fait penser cette affiche et son post-scriptum. C’était la même chose pour un autre rassemblement entre filles ultra-féministes programmé cet été en région parisienne, puis déprogrammé faute de participantes (c’est rassurant) : « Université d’été féministe non-mixte pour poly et sexponautes » (lol) :

Comme on peut le décoder à travers ces lignes édifiantes, le « stage-université d’été » est surtout conçu pour réconforter et pallier la misère affective et sexuelle des participantes – quitte à leur dégoter des plans-cul dans des salles prévues à cet effet :

Tous les moyens sont donc bons pour répondre à la solitude et au célibat qui sont clairement les contrepoints de ce néo-féminisme. Alors même si, ou plutôt parce que leur modèle de vie est loin de faire rêver les autres femmes, elles cherchent à y entraîner le plus possible de filles de leur âge – histoire de n’être pas trop seules à patauger dans leur marasme.

Et c’est visiblement à cela que leur idéologie s’emploie : « Soyez les plus laides possible, cultivez votre cellulite, vos poils, vos troubles mentaux, votre intolérance, votre méchanceté, haïssez tous les hommes qui auraient pu vous rendre heureuses, ne laissez surtout aucune jeune femme espérer un jour vivre heureuse auprès d’un homme hétérosexuel… ». Vous qui entrez ici, abandonnez toute espérance…

Non merci, mais très peu pour moi ! Je suis bien plus heureuse avec un homme, vous pouvez vous mettre vos injonctions où je pense !

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[à suivre….]

Camille Paglia – Amazone d’inconfort

Camille Paglia, « Amazone d’inconfort », Le Nouveau Magazine Littéraire, n° 26, février 2020

Propos recueillis par David Haziza

En rupture avec le retour du puritanisme dans le féminisme américain, cette essayiste hors normes prône une sexualité politiquement incorrecte.

David Haziza. – Vous êtes devenue célèbre avec Sexual Personae, paru aux États-Unis en 1990. Les lecteurs français y ont pour la première fois accès. Pour commencer, qu’est-ce qu’une « persona sexuelle » ?

Camille Paglia. – Sexual Personae, le produit de vingt ans de labeur, contient ma vision du conflit entre nature et culture, qui tourmente l’humanité depuis l’âge de pierre. La voix agressive, sans compromis, du premier chapitre doit beaucoup au magistral Deuxième Sexe de Simone de Beauvoir, que j’ai lu avec admiration quand j’avais 16 ans. Persona, c’est le mot latin désignant le masque théâtral qui amplifiait la voix de l’acteur lors des performances en plein air. Les personas sexuelles, dans mon système, ce sont les artifices immuables par lesquels des cultures successives ont tenté de symboliser et en même temps de contenir le pouvoir écrasant de la nature. Ces masques, j’en suis amoureuse, et en même temps je crains et honore la nature. Or l’hommage à son pouvoir volcanique a fait de Sexual Personae un livre inacceptable aux yeux de l’orthodoxie féministe et postmoderne qui avait aveuglément embrassé le constructivisme social : à l’époque, pas moins de sept éditeurs ont rejeté mon manuscrit ! Il n’y a peut-être qu’au Brésil – avec son carnaval épique, hallucinatoire, ses paysages sublimes de monts, de jungles et de mer – que mes idées ont été complètement comprises.

Vous êtes une « féministe amazone ». Le féminisme contemporain est-il trop étranger au « pouvoir féminin » ? Comment ressusciter ce pouvoir ?

Oui, j’ai baptisé ma doctrine « féminisme amazone », ce qui signifie qu’à mes yeux la femme libérée doit assurer sa propre protection dans un monde où les dangers nous guettent tous, hommes ou femmes. Croire que la vie pourrait être parfaitement sûre, sans blessures ni risques, relève d’un fantasme puéril. Pour être libre, il faut renoncer à s’apitoyer sur son sort, il faut du courage. Ma première vision de l’Amazone m’est venue de la Diane d’Anet, cette représentation en marbre de Diane de Poitiers, princièrement étendue, son arc à la main, et de l’autre saisissant un cerf royal mais docile. Voilà une oeuvre maniériste éblouissante, qui continue de représenter pour moi l’ultime pouvoir féminin – une fusion de Vénus et de Diane, commandant à la fois le monde de l’action, public, et celui, privé, de l’amour et du désir. Le féminisme d’aujourd’hui a choisi de se restreindre à une vue étriquée de la femme, masochistement vulnérable, incapable de progresser, de survivre même, sans une protection paternaliste.

Allégorie de Diane de Poitiers (en Diane chasseresse) et de son amant le roi Henri II (en cerf). Auteur inconnu, 1550-1560, marbre (Paris, Musée du Louvre).

Colette a dit que les suffragettes la dégoûtaient et qu’elles méritaient le fouet ou le harem. Un jugement paglien avant la lettre ?

Absolument pas. Je suis une féministe de l’équité, je me bats à ce titre pour les droits politiques des femmes. Mon exigence est que toutes les barrières contre l’avancement des femmes, en politique et au travail, soient ôtées. Mais je m’oppose en même temps, parce que je les crois réactionnaires, à toutes les protections spéciales dont bénéficieraient les femmes, ainsi qu’aux quotas, et je fais une forte distinction entre les domaines privé et public. La régulation légale ne peut ni ne doit s’immiscer dans la vie privée – qui est notre véritable identité, là où nous existons dans toute l’ambiguïté des humeurs rebelles et des rêves illicites auxquels nous restons soumis. Bien que je sois critique de beaucoup d’autres féministes, mon féminisme à moi est véhément et inébranlable.

Dans un article paru dans Playboy en 1992, vous avez déploré le « retour de Carrie Nation », cette figure du puritanisme et de la prohibition du début du XXe siècle. Le féminisme contemporain est-il trop WASP ?

Le puritanisme fanatique que j’attaquais dans le féminisme anglo-américain – personnifié par les grandes inquisitrices MacKinnon et Dworkin, qui cherchaient alors à faire interdire Playboy et Penthouse – semblait avoir été défait à la fin des années 1990, notamment grâce à l’audace érotique des vidéos d’une Madonna, ma congénère italo-américaine. Mais les présupposés puritains d’alors ont resurgi avec encore plus de force dans le mouvement MeToo, qui, malgré ses bonnes intentions, a tort de décrire les femmes comme des victimes sans défense de la luxure masculine. Les féministes doctrinaires, que seuls les mots et la codification de lois répressives intéressent, manquent souvent de sens visuel. Elles réduisent l’art à son message social et semblent un peu perdues face à la nudité qui, pour elles, est, dans l’oeuvre d’artistes de sexe masculin, dégradante, ou bien percutante, mais seulement sur le plan politique : je pense à ce bizarre exhibitionnisme des manifestations de rue (les SlutWalk [Marches des salopes], par exemple). Du coup, elles semblent avoir du mal à célébrer, avec révérence, comme c’est le cas en Europe du Sud, le corps et la sensualité.

Choisissant le camp de Sade contre celui de Rousseau, vous écrivez dans Sexual Personae que « le sexe est pouvoir ». Les féministes auraient-elles dû lire Justine plutôt que le Contrat social ?

Sade a eu un impact énorme sur ma vie : sa témérité et son bel esprit, sa dédaigneuse absence de pitié, son insistance sans remords sur les froides vérités de la vie. Que les livres de Sade aient disparu des librairies américaines il y a une trentaine d’années est une chose tragique. Il a été rayé de la carte culturelle. Aujourd’hui, vu l’esprit de censure qui fait rage au sein du gauchisme américain, on voit mal comment Sade pourrait être revendiqué et réhabilité.

Vous vous êtes naguère qualifiée de pornographe, considérant depuis toujours la pornographie comme une forme d’art. Cependant, faites-vous une distinction entre, disons, Deep Throat [Gorge profonde] et le porno amateur ou industriel ?

La pornographie est un sombre miroir qui révèle les tabous secrets d’une culture. On ne peut jamais comprendre une société donnée si l’on n’a pas appréhendé la forme et les contours de sa pornographie. La pornographie est une forme d’art, à savoir une représentation fictive de la réalité. Il y a de l’art de qualité et aussi de l’art médiocre : il en va de même de la pornographie. Cela étant dit, sa crudité est essentielle : elle est là pour révéler le fond sauvage de nos appétits, qui surgissent sous le vernis de la vie sociale et policée. J’ai arrêté de m’intéresser à la pornographie quand elle est passée du cadre artistique des films et des magazines à celui d’Internet, avec ses espaces mesquins et son refus de la mise en scène. Cependant, je continuerai à la défendre, car même la pornographie en ligne est une source d’énergie et de liberté, une fenêtre sur la nature pour tous ces employés paralysés, ces prisonniers, ces galériens de la modernité, aux corps abrutis, enchaînés à leur bureau.

Vous avez grandi dans un milieu italo-américain, entourée d’hommes forts, de femmes fortes. Ce pouvoir vénérable tend à disparaître. Vous avez écrit que la masculinité était « agressive, instable, explosive », mais que « c’est aussi la force culturelle la plus créative dans l’histoire ». Dans quelle mesure assistons-nous à une crise de la masculinité, et en quoi cela regarde-t-il le féminisme ?

La crise de la masculinité du monde occidental est le résultat d’un jeu de forces économiques ayant agi sur le long terme. À l’ère postindustrielle, la classe moyenne se retrouve hypertrophiée et, les usines étant délocalisées dans le tiers-monde, les hommes qui la composent occupent des emplois de bureau impossibles à distinguer de ceux de leurs collègues féminines. L’identité masculine traditionnelle s’en trouve cantonnée au secteur secondaire, notamment au bâtiment, qui requiert force physique et bonne volonté quand il s’agit de se salir sous un temps inclément. Dans la haute technologie et le royaume hyperintellectuel des élites, les différences sexuelles ont été continûment effacées. Cela a poussé de nombreuses féministes à proclamer que la masculinité n’avait pas d’existence réelle ou qu’elle disparaîtrait bientôt. Non sans cruauté, ces femmes ignorent ce que leurs vies privilégiées doivent au travail des prolétaires masculins : c’est par lui que toutes les structures qui les entourent ont été créées, et c’est lui qui maintient des services aussi essentiels que ceux de l’électricité, de la plomberie, de la voirie et des transports.

J’ai passé ma petite enfance au sein d’une communauté très soudée d’immigrants ayant quitté l’Italie pour travailler en Amérique. Dans l’antique division du travail, il y avait le monde des hommes et celui des femmes : les sexes avaient, au quotidien, assez peu de choses à partager. À la maison, j’ai pu observer que c’étaient des femmes, plus âgées et profondément religieuses, qui dirigeaient. Aujourd’hui, les sexes travaillent côte à côte toute la journée : cette familiarité excessive, nouvelle dans l’histoire, vaut à la fois banalisation et exacerbation des tensions. Selon moi, la souffrance morale et la fatigue des femmes actives, dont elles accusent injustement les hommes d’être responsables, est le résultat de deux choses : la fin du soutien matériel et celle de la chaleureuse solidarité que les femmes se sont portée les unes aux autres chaque jour de leur vie pendant les dix mille ans de l’ère agraire. Cette solidarité grisante, je l’ai vue et ressentie durant mon enfance, et je sais ce que nous avons perdu.

L’une des nombreuses controverses qui se sont produites en France durant le mouvement MeToo est liée à une tribune signée, parmi beaucoup d’autres, par Catherine Deneuve et la critique d’art Catherine Millet sur la « liberté d’importuner ». Qu’en avez-vous pensé ? Aurait-elle pu être écrite aux États-Unis ?

J’ai été emballée en lisant ce qui concernait la tribune du Monde, qui m’a fait espérer qu’un tournant dans la lutte contre le politiquement correct au sein du féminisme était atteint. Il est peu probable qu’un journal américain ait le courage de publier un texte aussi incendiaire et audacieux. Ma propre philosophie de la sexualité a été profondément influencée par les films d’art européens que je regardais dans les années 1960. Jeanne Moreau, Catherine Deneuve et Stéphane Audran représentaient une vision sophistiquée de la sexualité, qui manquait alors cruellement aux États-Unis. D’où ma déception lorsque Deneuve, évidemment sous pression, s’est excusée au bout de quelques jours d’avoir signé cette tribune.

Vous êtes lesbienne et vous vous définissez comme transgenre. Pourtant vous critiquez souvent le mouvement trans, notamment l’idée que la chirurgie puisse changer le sexe de quelqu’un. Vous affirmez que ceux qui encouragent le transgenrisme chez les enfants se rendent coupables de maltraitance… Que signifie pour vous être transgenre ?

À aucun moment de ma vie je ne me suis sentie « féminine ». J’ai sans aucun doute souffert de ce qu’on appelle une « dysphorie de genre ». Depuis le début je me suis rebellée contre le conformisme vestimentaire qui régnait dans l’Amérique des années 1950. Dans les choix de déguisement que je faisais à Halloween, mon identification à un mode masculin d’expression était manifeste : Robin des Bois à 5 ans, le toréador de Carmen … Malgré mon hétérodoxie de genre, je ne crois pas que l’on puisse changer de sexe. Chaque cellule d’un corps, à l’exception de celles du sang, reste marquée pour toute la vie, opiniâtrement, par un certain genre. L’exclusion de la biologie du cursus féministe, causée depuis les années 1970 pour des raisons idéologiques, a mené à l’actuelle confusion, très répandue, autour de ce sujet. Il se peut qu’une réaction politique se fasse déjà sentir, mais elle est réprimée par les médias.

En tant que libertarienne, je crois que chaque individu possède un droit absolu sur son corps et sur son identité, qu’il ou elle peut les altérer, les modifier, les renommer à volonté. D’ailleurs, je soutiens l’introduction d’une catégorie « X » sur le permis de conduire et le passeport de ceux qui rejettent la bipartition traditionnelle de genre. Ce que je rejette catégoriquement en revanche, c’est l’intrusion des gouvernements et des bureaucraties universitaires en ces domaines : elle ne peut que conduire à un contrôle autocratique de la liberté d’expression. Le futur ne regardera pas avec bienveillance une époque où de jeunes enfants non conformes sexuellement (ce que j’étais moi-même) sont accompagnés sur le chemin prématuré des transformations chirurgicales, qui va de pair avec un assujettissement à vie aux médecins et à une industrie pharmaceutique rapace. Voilà pourquoi dans l’introduction de Provocations, j’exhorte ainsi les jeunes questionnant le genre : « Restez fluides ! Restez libres ! »

Vous avez écrit que, « souvent, de mauvaises personnes produisent des oeuvres d’art formidables ». Quelle est la relation entre l’art et le mal ?

Que ce soit pour Caravage, Picasso, Jackson Pollock, Woody Allen ou Roman Polanski, je n’ai aucun problème à admirer une oeuvre d’art tout en condamnant moralement la personne qui l’a produite. Je m’oppose absolument à ce que l’on bannisse des oeuvres dont les créateurs offenseraient les codes actuels du politiquement correct. Pour moi, une oeuvre d’art, même quand elle s’occupe de problèmes politiques ou sociaux, appartient à un domaine abstrait, au-delà de tout ce qui est personnel. Je vois l’histoire de l’art comme un trésor, semblable à l’inconscient collectif de Jung, un fonds d’idées qui transcendent largement leurs faillibles auteurs.

Rien ne m’empêchera de regarder avec plaisir les premières comédies de Woody Allen, des classiques. Le conflit glauque qui l’oppose à Mia Farrow ne m’intéresse pas – Farrow qui, en 1992, lui envoyait cette grotesque carte de Saint-Valentin, une photo de famille où les coeurs de leurs enfants étaient transpercés d’épingles et le sien d’un couteau de cuisine. Voilà une histoire bien plus complexe que ce que les médias en ont dit. Ayant un vrai casier de sordide exploitation sexuelle, Polanski est un cas différent. En même temps, c’est un artiste majeur. Le Couteau dans l’eau, sorti en 1962, a eu un impact colossal sur moi. Rosemary’s Baby et Chinatown sont des chefs-d’oeuvre qui n’ont rien perdu de leur puissance avec les années. Ma position sur tous ces cas est très ferme : s’il y a des preuves, oui, que l’on poursuive et punisse l’homme, mais qu’on laisse l’art tranquille.

Comment interprétez-vous le phénomène Greta Thunberg, ou, pour le dire autrement, quelle est la persona sexuelle de Greta Thunberg ?

Cette étrange momie qu’est Greta Thunberg est, en tant que persona sexuelle, une vierge folle semblable à la Miss Havisham des Grandes Espérances de Dickens : abandonnée à l’église par son fiancé, Miss Havisham continue de porter sa robe de mariée en lambeaux, vivant avec les restes de sa pièce montée pourrie dans un manoir décrépit aux horloges arrêtées. Thunberg me rappelle aussi ces poupées démoniaques qui apparaissent dans trois épisodes de La Quatrième Dimension, la série de Rod Serling : elles sont programmées par des ventriloques (les parents de Thunberg), mais bien vite elles s’en prennent à leurs propriétaires et attaquent l’espèce humaine. Greta Thunberg est la colporteuse d’une propagande apocalyptique dont elle a été nourrie par d’autres et qu’elle est incapable d’étayer au moyen de faits. Je suis depuis longtemps sceptique devant le changement climatique dans la mesure où il est en fait un trait universel de l’histoire de notre planète depuis sa formation. Je suis pourtant une fervente écologiste : nous avons l’obligation morale de préserver et de protéger nos ressources naturelles, ainsi que de purifier l’air et les cours d’eau de la pollution industrielle. Je rejette cependant ces prophéties apocalyptiques et l’hystérie actuelle. Les adultes manipulateurs qui, à cause de leurs propres intérêts politiques, ont cherché à paniquer toute la jeune génération, méritent d’être condamnés et expulsés de la société civilisée.

REPÈRES

2 avril 1947. Naissance à Endicott, dans l’État de New York.

Depuis 1984. Professeur de sciences humaines et des médias à l’université des arts de Philadelphie (Pennsylvanie).

1990. Parution aux États-Unis de Sexual Personae. Art and Decadence from Nefertiti to Emily Dickinson.

2018. Provocations. Collected Essays.

Note(s) :

Femmes libres, hommes libres, Camille Paglia, éd. Hermann, 432 p., 23 E.

Vignette de couverture : Copie de la Diane chasseresse installée dans le parc du château d’Anet (photo Ackteon)

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