Le bateau passeur d’âmes (et de corps) est un thème universel : barques funéraires égyptiennes, Charon faisant traverser le Styx chez les grecs, l’Île des Morts du symboliste Arnold Böcklin…
Le mythe réactualisé du vaisseau fantôme ou du « Hollandais volant » : c’est ce que m’a inspiré Fear God (2018), tableau où l’on voit appareiller (ou accoster ?) un cargo porte-containers au-dessus duquel plane un spectre.
La chanson « Fantôme de fortune » (album Vertigo, 1992) s’est alors imposée comme une évidence ; son « manteau d’étoiles » devenant le ciel du tableau dont les ondulations se confondent avec des vagues marines.
Ces vagues célestes de Fear God ne sont d’ailleurs pas sans évoquer celles de la Nuit étoilée que Vincent Van Gogh (un autre coloriste expressionniste et mystique) avait peinte depuis sa fenêtre de l’asile à Saint-Rémy-de-Provence. Ici aussi, le manteau d’étoiles a des airs marins.
La légende du « hollandais volant », capitaine errant dans un brick fantôme autour du cap de Bonne-Espérance, remonte au XVIIe siècle. Elle a par la suite inspiré l’opéra de Richard Wagner, Le Vaisseau fantôme(1843), qui raconte l’histoire d’un capitaine fantomatique voué à naviguer sans fin sur les mers du monde afin de racheter l’amour d’une femme. On y retrouve les thèmes éternels de l’errance et de la rédemption par l’amour.
C’est aussi la rédemption par l’amour que trouvera le capitaine hollandais dans le film Pandora and the Flying Dutchman (1951). Condamné à errer sur les mers du globe jusqu’au Jugement dernier dans un yacht à l’équipage fantôme, sa malédiction ne sera levée que le jour où une femme donnera sa vie pour lui. Ava Gardner joue Pandora, femme fatale qui succombe aux charmes du hollandais et qui n’est autre que son épouse qu’il avait assassinée au XVIIe siècle, la croyant infidèle. En attendant son retour, le capitaine, devenu peintre, la peignait en Pandore.
Il est enfin un personnage qui porte lui aussi un manteau d’étoiles… et que le navigateur rencontrera peut-être à la fin de son périple…
[N. B. : Il va de soi que cette interprétation de Fear God est purement personnelle et subjective. Chacun est invité à y voir et ressentir ce qu’il désire 😉 ]
. Pour découvrir tout l’oeuvre peint de J.-P. C. :
La féministe universitaire a dit au festival de Hay que « la plupart des viols sont simplement paresseux, négligents et insensibles »
Germaine Greer a appelé à un abaissement de la punition pour le viol et déclaré que la société ne devrait pas y voir un « crime spectaculairement violent », mais plutôt le considérer comme « paresseux, négligent et insensible ».
Elle a suggéré qu’une peine appropriée pour l’infraction pourrait être 200 heures de service d’intérêt général et peut-être un tatouage « r » (pour « rapist (violeur) ») sur la main, le bras ou la joue du violeur.
Prenant la parole au festival littéraire de Hay, l’universitaire féministe a soutenu que le viol était endémique dans la société et que le système juridique ne pouvait y faire face parce qu’il revenait toujours à la question du consentement, les victimes ne devenant rien de plus que des « bouts de preuves ».
Elle a dit que le système ne fonctionnait pas et qu’un changement radical était nécessaire. « Je veux renverser le discours sur le viol. Nous n’aboutissons à rien dans le tunnel de l’histoire », a-t-elle dit.
« La plupart des viols ne comportent aucune blessure », a déclaré Greer. « On nous dit que c’est un crime sexuellement violent, un expert comme Quentin Tarantino nous dira que lorsque vous utilisez le mot « viol », vous êtes en train de parler de violence, de forçage… c’est un des crimes les plus violents dans le monde. Bullshit, Tarantino ! ».
« La plupart des viols sont juste paresseux, négligents, insensibles. Chaque fois qu’un homme roule sur sa femme épuisée et insiste pour jouir de ses droits conjugaux, il la viole. Cela ne finira jamais devant un tribunal ».
Au lieu de penser que le viol est un crime spectaculairement violent, et certains viols le sont, voyez-le comme non consensuel… C’est du mauvais sexe (« bad sex« ). Du sexe où il n’y a pas de communication, pas de tendresse, pas de marques d’amour. »
Les procès pour viol s’écroulent et ne se terminent pas par des condamnations, comme le plaident les avocats, sur la question du consentement, a-t-elle dit. Pourquoi ne pas croire la femme et abaisser la peine ? « Si nous disons faites-nous confiance, croyez-nous, si nous disons que notre accusation devrait être considérée comme une preuve, alors nous devons réduire le tarif pour le viol. »
Greer a reconnu que sa thèse serait controversée. « Ce sont des moments comme ça, je peux entendre les féministes me hurler dessus, ‘vous êtes en train de banaliser le viol !’ »
« Eh bien, je vais vous dire quoi … Vous pouvez vouloir croire que le pénis est une arme mortelle et que toutes les femmes vivent dans la peur de cette arme mortelle, eh bien ce sont des conneries. Ce n’est pas vrai. Nous ne vivons pas dans la terreur du pénis… Un homme ne peut pas vous tuer avec son pénis. »
Elle a dit que, dans les cas de viols manifestement violents, les tribunaux devraient se concentrer sur la violence, qui devrait attirer des peines plus lourdes, plutôt que d’avoir de longs procès dans lesquels les femmes sont humiliées pendant de longues périodes.
Greer va publier son argumentation complète sur le viol dans un nouveau livre qui sortira en Australie en septembre.
Elle a dit que certains pourraient voir son attitude envers le viol comme désinvolte, mais elle a rappelé au public silencieux de Hay sa propre expérience quand elle avait 18 ans et a été violée. Elle a été battue à plusieurs reprises par un homme qui lui a demandé une douzaine de fois : « Dis : ‘baise-moi’ ». L’a-t-elle dit ? « Je ne pense pas que je l’ai fait, mais peut-être que je l’ai fait. Cela ressemblerait à quoi, sur mon téléphone portable, de dire au tribunal « baise-moi » ? Greer n’a pas porté plainte à la police.
Elle a remis en question une statistique selon laquelle 70% des victimes de viol auraient souffert de stress post-traumatique contre 20% des vétérans de guerre.
« Que diable racontez-vous ? Quelque chose qui ne laisse aucun signe, aucune blessure, rien du tout, serait plus dommageable pour une femme que de voir son meilleur ami explosé par un engin explosif, comme peut l’être un vétéran ? »
La société voudrait que les femmes croient que le viol les a détruites, a-t-elle dit. « Nous n’avons pas été détruites, nous avons été sacrément ennuyées, voilà ce que nous avons été. »
Greer a longtemps divisé l’opinion, depuis qu’elle a publié son ouvrage phare, The Female Eunuch, en 1970, et son discours à Hay ne montre aucun signe de changement.
Elle a dit que le monde était rempli de bad sex, que les gens ne se parlaient pas et ne s’aimaient comme ils le devraient. « Faire l’amour n’est pas une affaire d’organe, c’est une affaire de communication et, d’une manière ou d’une autre, nous devons le sauver. L’hétérosexualité est dans une crise profonde. »
C’est davantage une crise pour les femmes, a-t-elle ajouté. « Les femmes aiment les hommes, plus qu’ils [les hommes] ne les aiment. Nous sommes plus conscientes de nos hommes, plus qu’ils ne sont conscients de nous. Nous sommes plus facilement contraintes de les satisfaire ou d’essayer de leur plaire. Nous avons tendance à aimer nos fils plus que nos filles, nous espérons que cela ne se voit pas, mais c’est presque toujours le cas. »
Greer est pessimiste quant à l’affaire Harvey Weinstein, prédisant que les seuls gagnants seront les avocats. « Ils vont démolir les témoignages ».
La pensée de G. Greer est rapportée de manière parfois confuse ou incomplète, dans l’intention probable de la caricaturer ou la charger.
Je suis d’accord avec elle quand elle propose de ne pas confondre le bad sex avec les violences graves ou quand elle dit qu’un pénis ne tue pas et ne peut être comparé à une mine anti-personnel.
Qu’il faut donc repenser les peines afin que la plupart des procès pour viol ne s’écroulent pas comme ils le font actuellement.
Elle parle aussi de sauver l’amour et l’hétérosexualité, en crise.
Beaucoup de thèmes qui gagneront donc à être présentés de manière plus approfondie dans son prochain livre.