Dans un ouvrage paru en 2002, Humor Reference Guide: A Comprehensive Classification and Analysis, Warren Shibles, professeur de Philosophie à l’université du Wisconsin, revient sur le niveau affligeant, intellectuellement parlant, des Women’s Studies dans les universités américaines. Il présente dans l’extrait qui suit (traduit par mes soins) des paroles de féministes influentes – et pas seulement aux Etats-Unis. On est souvent consterné et incrédule à la lecture de ces sentences, et pourtant… les faits montrent que l’université française s’est elle aussi couchée depuis longtemps et a fait siennes la plupart de ces absurdités.
Chapitre IX. L’ANTIPATRIARCAT : MODÈLE DE BASE DU FÉMINISME ET DES WOMEN’S STUDIES
Tous les hommes oppriment toutes les femmes tout le temps.
Introduction
Ce chapitre sur la philosophie et l’humour féministes est un exemple d’humour pénétrant, de philosophie de l’humour et surtout d’humour de la métaphore. Il commence par établir la métaphore de base ou le modèle de l’antipatriarcat qui caractérise à la fois le féminisme radical et antipatriarcal et les enseignements des Women’s Studies. (…) La métaphore farfelue qui consiste à tout genrer (angl. : genderize) peut également générer une réduction à l’humour absurde. Ce fut aussi le cas avec Freud, dans la mesure où il voyait tout en termes de sexe ou de libido. Le modèle féministe, par son expansion de la métaphore du genre, dépasse de loin Freud ; créant une expansion de l’humour métaphorique.
Les féministes développent dans les moindres détails la métaphore féministe de l’antipatriarcat. En pratique, toutes les causes sont déterminées, toutes les questions et tous les problèmes sont résolus en référence au modèle antipatriarcal. (…) En tant que modèle fondamentalement mythique et irrationnel, il trouve sa place aux côtés d’autres métaphores telles que la religion, l’astrologie, le militarisme et les institutions qui punissent au lieu d’amender et d’éduquer. En ce sens, il rencontre un certain attrait auprès du grand public et trouve également sa place parmi les autres philosophies qui ont porté préjudice à l’humanité. A l’instar de la religion, le féminisme antipatriarcal s’oppose à l’humanisme (Cf. John Dewey and pragmatism, Shibles 1995ij, 1998b). (…)
Le féminisme n’est présenté ici ni pour l’attaquer ni pour le soutenir, mais pour le décrire et pour montrer les nombreuses façons dont l’humour est impliqué dedans. Beard & Cerf (1995) ont fait un livre à la fois descriptif et satirique, simplement en laissant les féministes s’exprimer par elles-mêmes. (…)
La définition courante du patriarcat
Le « patriarcat » est une métaphore-racine développée dans le cadre d’une vision du monde et d’une philosophie de la vie selon ce point de vue : Tous les hommes oppriment toutes les femmes tout le temps (Kate Millett 1971; 1977: 24-25). On parle ici de féminisme antipatriarcal (voir Shibles, « Le mythe du patriarcat« , 1991).
« Les hommes gouvernent les femmes », « la domination sexuelle » (Kate Millett 1971: 24-25).
« Notre société… est un patriarcat.… Dans tous les domaines du pouvoir au sein de la société… entièrement entre les mains des hommes » (Kate Millett 1971: 25 dans Kramarae & Treichler 1985: 323).
« Tous les hommes sont des violeurs et c’est tout ce qu’ils sont” (Marilyn French in Farrell 1993: 309) Dworkin (1983: 147-194) « Tous les hommes essaient de tuer toutes les femmes ».
L’utilisation d’énoncés erronés et de déclarations non fondées recourt à certaines des métaphores les plus fondamentales des féministes. Une formulation de la forme “x est y” est la suivante : « Tous les x (sociétés, logique, connaissances, langage, disciplines, écriture) sont masculins ». Ironiquement et humoristiquement, même la femme est masculine.
« Nous continuons à nommer [sic.] le patriarcat en tant que paradigme pervers et source des autres maux sociaux » (Mary Daly 1984: xii) [voir l’attaque totale des hommes appelés les sept péchés capitaux (1978: 30-31)].
L’index de Mary Daly (1984: 465) indique que « le patriarcat, comme paradigme perverti » se retrouve tout au long de son livre. Dans son livre de 1978, « patriarcal » apparaît treize fois avant même que la préface ne commence.
« Le patriarcat, c’est-à-dire la suprématie masculine institutionnalisée » (French 1992: 16).
Tout le savoir, les croyances, les institutions, la société, la langue, etc. sont masculins ; par exemple, le bien et le mal sont masculins et donc en eux-mêmes « mauvais » (Mary Daly 1978: 12). Les synonymes de « patriarcat » sont : masculin, dominer, opprimer, victimiser, haïr, etc.
« Un système d’autorité masculine qui opprime les femmes par le biais de ses institutions sociales, politiques et économiques » (Humm 1990: 159).
« Les femmes sont l’ennemi [sic.] contre qui toutes les guerres patriarcales sont menées ». (Mary Daly 1978: 31).
« Une forme d’oppression universelle et historique » (Zillah Eisenstein 1979: 17 dans Kramarae & Treichler 1985: 323-324).
« La structure politique universelle qui privilégie les hommes au détriment des femmes ; le système social que le féminisme est déterminé à détruire. Ce terme est fréquemment utilisé par les féministes contemporaines, qui ne sont pas toujours d’accord sur ce qu’elles entendent par là » (Lisa Tuttle 1986: 242).
« La religion dominante de la planète entière, et son message essentiel, est la nécrophilie » (Mary Daly 1978: 39, dans Kramarae & Treichler 1985: 323).
« Selon la vision féministe radicale, la société contemporaine est un patriarcat… un système total de domination » (Jaggar 1983).
« Le patriarcat a commencé et s’est étendu comme une guerre contre les femmes » (French 1992: 14. Cf. S. Johnson 1989: 148).
« Pour le féminisme radical, le patriarcat existe toujours en tant que fait universel, multiculturel, en tant que description de toutes les sociétés humaines et explication de la raison pour laquelle chaque société est ce qu’elle est dans tous ses aspects » (Jean Elshtain 1981: 213).
« Le féminisme radical postule que le patriarcat est le puits empoisonné d’où s’écoulent toutes les maladies et les misères » (Sonia Johnson 1989: 148).
« Le modèle masculin dominant de l’antiféminisme est pratiquement partout » (Dworkin 1983: 210).
Selon le point de vue du féminisme antipatriarcal, la solution à tous les problèmes du monde est fort simple. La métaphore simpliste est développée dans le cadre d’un système élaboré. Nous pouvons simplement, en faisant des déductions à partir de la définition de base, générer sa structure et sa théorie de la manière suivante :
- Tout genrer.
- Tout analyser comme étant masculin.
- Juger que tout ce qui est masculin est mauvais. Ainsi, faire de « patriarcat » un terme péjoratif.
- Tout négativer. Tout voir en termes de victimisation, d’esclavage, d’oppression, de harcèlement sexuel et de viol.
- Attribuer la responsabilité de tous les problèmes du monde aux hommes.
- Sensibiliser sur cette vision des choses afin d’attiser la colère et la rage.
- L’étape suivante est de punir, imposer le politiquement correct, obtenir vengeance, afin de détruire la société patriarcale, l’université, la raison et toutes les autres institutions, car toutes sont masculines, pour mettre en place une gynocratie axée sur les femmes.
Le patriarcat est un mythe ; critique du terme « patriarcat »
Dans le but de démontrer que le mot « patriarcat » est à la fois un terme non scientifique et un jugement de valeur, il a été démontré qu’il s’agissait d’un terme abusif et de « sexisme inversé » (Farrell 1993: 16, et PK: 83). Cela a été montré aussi dans « Le mythe du patriarcat » (Shibles 1991b). Alors une chose remarquable est arrivée récemment : un certain nombre de livres féministes sont parus, critiquant de manière juste et impressionnante les féministes antipatriarcales politiquement puissantes. Ce sont les livres de Christina Hoff Sommers, Daphne Patai et Noretta Koertge [PK], René Denfeld, Petra Kelly, Camille Paglia, Nadine Strossen, Ellen Klein et Katie Roiphe. Ce sont des livres courageux, car ils osent aller à l’encontre du vaste establishment féministe dans le monde universitaire.
« Utiliser le mot « patriarcat », c’est donner une distorsion de notre société et c’est une vision dogmatique » (Elshtain 1981: 216).
« Il n’y a pas de consensus sur ces questions et les féministes contemporaines utilisent le « patriarcat » de diverses manières. Certaines ont reconnu que les problèmes liés au concept sont si importants qu’il devrait être abandonné » (Pateman 1988) dans « Patriarchal Confusions »).
Ellen Klein (1996: 19) écrit : « L’argument opposé à la science traditionnelle et à la philosophie de la science, selon lequel ils seraient essentiellement biaisés en faveur des hommes, n’a pas été présenté ».
Le philosophe John Wilson (1980) a reproché aux féministes antipatriarcales d’être anti-humanistes et d’utiliser les méthodes de la force et de la coercition.
Supposons qu’en tant que femme, on vous dise : « Vous et toutes les femmes, vous opprimez tous les hommes ». Ou que les enseignantes du primaire et les infirmières sont matriarcales et donc oppriment tous les hommes, institutionnellement et personnellement. Ce serait une insulte grave.
Roiphe (1993: 46) parle de la paranoïa féministe antipatriarcale « qui croit que les hommes ne cherchent qu’à s’en prendre aux femmes d’une manière générale ».
« La présomption [est] que les hommes sont collectivement engagés pour maintenir les femmes dans le bas » (Sommers 1994: 21).
Le féminisme antipatriarcal est une « compréhension simpliste de la nature » (Elshtain 1981: 212).
Les études de genre sont du féminisme antipatriarcal
Le féminisme antipatriarcal est largement représenté, notamment à travers Andrea Dworkin, Catharine MacKinnon, Susan Faludi, Marilyn French, Monique Wittig, Gloria Allred, Andrea Nye, Alison Jaggar, Charlene Spretnack, Heilbrun, Susan McClary, Susan Harding, Adrienne Rich et Ann Ferguson.
“Le féminisme radical est le féminisme » (MacKinnon 1989: 117).
Il est souvent dénié que les Women’s Studies soient radicales. Mais le problème est maintenant clair. Dans la mesure où son idéologie et ses productions utilisent le mot « patriarcat », il est radical et il s’agit de féminisme antipatriarcal. Ses productions contiennent le mot directement ou indirectement (par exemple à travers une paraphrase) dans pratiquement tous les livres, articles et conférences. Les auteurs mentionnés ci-dessus constituent la norme dans les bibliographies des Women’s Studies. Les études féministes ne peuvent échapper à la critique selon laquelle elles font essentiellement la promotion des principes du féminisme antipatriarcal.
Il y a beaucoup d’équivoque concernant le mot « féminisme ». Il est facile de s’embrouiller. Je ferai en sorte que ce soit moins facile, moins facile de souiller le féminisme humaniste avec le féminisme antipatriarcal. La distinction entre féminisme humaniste et féminisme antipatriarcal caractérise le féminisme mieux que « féminisme radical », car tout peut être radical. Radical peut parfois être la bonne chose à faire. Les critiques des philosophes sont souvent radicalement appropriées.
« Les convictions féministes qui prévalent dans les écoles et universités des États-Unis aujourd’hui ont souvent des conséquences profondément subversives sur les meilleures traditions universitaires » (PK: 184).
« On enseigne aux étudiants à haïr » (PK: 185).
« Je suis une féministe qui n’aime pas ce que le féminisme est devenu » (Sommers 1994: 18).
« Les programmes des Women’s Studies ressemblent beaucoup à des sectes religieuses » (PK: 190. Cf. Roiphe 1993: 150).
Denfeld (1995: 305-306) écrit que dans un cours typique de Women’s Studies, on enseigne aux étudiants « qu’ils sont non seulement censés rejeter les formes ‘masculines’ du raisonnement telles que l’objectivité, mais que leur note en dépend. Ils écrivent de manière radicalement subjective des journaux non universitaires composés de rêves, de gribouillis, de poèmes, etc., mais surtout de leurs actes de rébellion montrant comment ils s’opposent à la société patriarcale. Ce programme (d’un cours de Rutgers) est considéré comme un « programme modèle » par l’Association nationale des Women’s Studies » (ibid. 306).
“Ce que nous ne savions pas, c’était à quel point ces échecs [des Women’s Studies] étaient généralisés et profondément enracinés, ni à quel point leurs effets néfastes étaient graves” (PK: 194: xv).
« La littérature anglaise et la critique littéraire sont soumises à l’idéologie antipatriarcale. Chaque cours est un cours “d’études des oppressions » (Kimball 1990: 16).
« Tout le savoir est patriarcal, alors l’étudiant n’a pas besoin d’apprendre autre chose que des études féministes » (PK: 142).
« Ce n’est pas le rôle de l’université de les parrainer [les féministes antipatriarcales]. » (PK: 214)
« Rien de ce que nous avons vu dans nos recherches sur les Women’s Studies ne suggère que les étapes les plus avancées du développement de l’identité, impliquant synthèse et intégration, se situent à l’horizon » (PK: 194).
« La majorité des cours de Women’s Studies […] sont non scolaires, intolérants à la dissidence et… une perte de temps » (Sommers 1994: 90).
« Les Women’s Studies sont gynocentriques et misandres » (Sommers 1994: 275).
« Les études féministes ne favorisent pas, et ne représentent en aucun cas une enquête ouverte, une exploitation critique de multiples perspectives (même menaçantes) » (PK: 1994: xvii).
« Le féminisme dans le monde universitaire devrait abandonner sa notion simpliste et dégradée du « politique »… et revenir à des pratiques professionnelles conformes aux principes de l’éducation libérale » (PK: 211).
« À l’université, l’une des raisons d’être des Women’s Studies est l’objectif politique d’éliminer les stéréotypes. Les cours doivent être dispensés de manière non sexiste, sans harcèlement sexuel. L’usage féministe du terme « patriarcat » dans les textes montre que les études féministes promeuvent plutôt le sexisme et les stéréotypes » (cf. Sommers 1994: ch. 5 « Le cours féministe »).
Déclaration d’un étudiant à propos d’un cours d’introduction aux Women’s Studies : « Le groupe faisait penser à un sketch des Monty Python, avec un jeu-questionnaire où la réponse à chaque question était « porc ». Et peu importe que l’animateur de l’émission de questions-réponses demandait, par exemple : « Quelle est la capitale de la Pennsylvanie ? ». La réponse était « porc ». Dans le cours que j’ai suivi, la réponse était toujours « les hommes »… « Qui est responsable de tout ce que nous endurons ? » « les hommes » (PK: 83).
« Toutes les données sont conformes à la théorie de l’oppression patriarcale » (Sommers 1994: 96).
{à suivre…]
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