Abigail Shrier : « Ados transgenres, un aller sans retour possible » (Le Figaro)

Le Figaro (site web)
vendredi 29 avril 2022
Abigail Shrier : « Ados transgenres, un aller sans retour possible »
Ungemuth, Nicolas

EXTRAITS EXCLUSIFS – Dans Dommages irréversibles, un saisissant essai jamais idéologique mais purement factuel, la journaliste au Wall Street Journal montre comment des adolescentes américaines décident de changer de sexe sous l’influence d’internet. Un phénomène qui pourrait bientôt toucher la France.

La dysphorie de genre, anciennement appelée « trouble de l’identité de genre », se caractérise par un malaise profond et persistant vis-à-vis de son sexe anatomique. […]. Historiquement, elle n’a concerné qu’une infime partie de la population (environ 0,01 %) et presque exclusivement des garçons. Au cours de la dernière décennie, la donne a changé de façon spectaculaire. L’Occident a vu une augmentation subite du nombre d’adolescents affirmant souffrir de dysphorie de genre et s’identifiant comme « transgenres ».

Pour la première fois dans l’histoire de la médecine, des adolescentes de sexe féminin à la naissance ne sont pas seulement présentes parmi ceux qui s’identifient ainsi, mais constituent la majorité du groupe. Pourquoi ? Que s’est-il passé ? Comment un groupe d’âge (les adolescents) qui avait toujours été minoritaire parmi les personnes concernées en est-il venu à constituer la majorité ?

La solitude des ados à l’ère numérique

Aux États-Unis, l’adolescence est pratiquement synonyme chez les filles d’angoisse de ne pas être physiquement à la hauteur. […] Les personnages des réseaux sociaux – c’est-à-dire les «amis» les plus intéressants pour les ados d’aujourd’hui et avec lesquels ils passent le plus de temps – ne présentent pas de telles imperfections. Soigneusement choisies et «facetunées», leurs photos définissent un standard de beauté qu’aucune fille réelle ne peut atteindre. Et elles sont constamment dans la poche des adolescentes, nourrissent leurs craintes de ne pas être à la hauteur, alimentent leur obsession pour leurs propres défauts ou ce qu’elles perçoivent comme tels, tout en les exagérant considérablement. Beaucoup d’adolescentes de la génération Z qui tombent dans les filets du phénomène transgenre appartiennent à la classe moyenne supérieure.

Maternées par des parents pour qui «élever» est un verbe actif, voire l’œuvre d’une vie, elles sont souvent des élèves brillantes. Jusqu’à ce que la folie transgenre les frappe, ces adolescentes se distinguent par leur gentillesse, leur serviabilité et leur absence totale de rébellion. […] Internet ne leur laisse jamais un jour, ni même une heure, de répit. Elles veulent ressentir les émotions fortes de l’amour adolescent, mais la plus grande partie de leur vie se passe sur un iPhone. Elles essaient l’automutilation. Elles tâtent de l’anorexie. Les parents les envoient chez des psychiatres qui leur prescrivent des médicaments en guise de ouate pour amortir leurs humeurs, ce qui aide – à moins que ressentir quelque chose n’ait été le but.

Gayatri, un cas problématique parmi d’autres

Gayatri a toujours été «très fille», m’a dit son père, immigrant indien et médecin. Enfant, elle adorait Dora l’exploratrice et les princesses de Disney. Au collège, une de ses amies de l’école primaire a «transitionné»: elle a commencé à se bander la poitrine, a annoncé qu’elle avait un nouveau nom, et a demandé aux autres d’utiliser les pronoms masculins pour s’adresser à elle. Les parents de Gayatri se présentaient comme progressistes. À l’époque, ni l’un ni l’autre n’a fait grand cas de ce changement, qui n’a pas semblé impressionner leur fille. Mais l’année suivante, en troisième, les parents de Gayatri lui ont acheté un ordinateur portable et – après maintes discussions – un smartphone. Elle s’est mise à passer beaucoup de temps sur Tumblr et DeviantArt, le site de partage artistique qui séduit une grande audience transgenre.

Elle a commencé à parler d’identité de genre à sa mère. Ses parents ne se doutaient pas de la corrélation entre ses propos et le temps passé sur internet. L’été est arrivé et les longues journées se sont profilées devant elle comme une main tendue. Tous ses moments libres, Gayatri les passait sur internet. Un jour, Gayatri a lancé l’idée de commencer un traitement à la testostérone et de subir une « chirurgie du haut ». Ses parents se sont alarmés. Elle agissait à leur insu. Ex-balourde de la classe, Gayatri s’était réinventé une personnalité d’ado transgenre branchée. Les « likes » et les émojis qui pleuvaient sur son profil Instagram parlaient d’eux-mêmes: cette nouvelle identité était une version upgradée d’elle-même. En tant que « garçon trans », Gayatri avait des amis – beaucoup d’amis.

Chiffres et tendances

En 2016, Lisa Littman, gynécologue-obstétricienne devenue chercheuse en santé publique et mère de deux enfants, parcourait les réseaux sociaux lorsqu’elle a remarqué une singularité statistique : plusieurs adolescents, pour la plupart des filles, de sa petite ville du Rhode Island se déclaraient transgenres – tous au sein du même groupe d’amis […]. Le Dr Littman ne connaissait pratiquement rien à la dysphorie de genre. […] Mais elle en savait suffisamment pour constater que les chiffres étaient beaucoup plus élevés que la prévalence attendue. […] La hausse, effectivement, s’est révélée sans précédent. Aux États-Unis et dans le monde occidental, on constatait un pic soudain d’adolescentes déclarant une dysphorie de genre – la pathologie associée à la désignation sociale « transgenre ».

Entre 2016 et 2017 aux États-Unis, le nombre d’interventions en chirurgie transgenre pour les jeunes femmes a quadruplé, cette population représentant soudain – comme on l’a vu – 70 % de toutes les interventions en chirurgie transgenre. En 2018, le Royaume-Uni a signalé une augmentation de 4400 % par rapport à la décennie précédente du nombre d’adolescentes cherchant à obtenir des traitements de genre. […] Au cours de la dernière décennie, comme le Dr Littman l’a découvert, les chiffres de la dysphorie de genre chez les adolescents ont bondi dans l’ensemble du monde occidental. Aux États-Unis, la prévalence a augmenté de plus de 1000 %. 2 % des lycéens s’identifient aujourd’hui comme « transgenres », selon une enquête menée en 2017 auprès des adolescents par les Centres pour le contrôle et la prévention des maladies. En 2016, les personnes assignées femme à la naissance représentaient 46 % de toutes les chirurgies de réattribution sexuelle aux États-Unis. Un an plus tard, ce pourcentage était de 70 %.

YouTube et testostérone : le rôle des influenceurs du net

Alex Bertie, un youtubeur anglais FtMFemale to Male», NDLR), sans doute le plus populaire (300.000 abonnés), a tenu un vlog (blog vidéo) sur sa première année de testostérone. « C’est le jour que je n’aurais jamais osé espérer, s’enthousiasme-t-il, adorable garçon à la mâchoire ombrée. Ça fait officiellement un an que je suis sous testostérone. Avant les hormones, je souffrais de la haine de soi, de la jalousie et de l’envie, je voulais constamment m’isoler du reste du monde… Aujourd’hui, un an après avoir commencé les hormones, je ne pourrais pas être plus heureux ! Les changements apportés par la testostérone ont vraiment amélioré ma qualité de vie et redessiné mes projets d’avenir. » Sa voix est plus grave. Ses épaules sont plus larges, ses bras plus imposants, sa mâchoire carrée. Sa graisse est redistribuée (moins dans les cuisses et les hanches). Et le plus réjouissant pour lui : ses règles ont disparu. « Heureusement, après deux mois de T, elles se sont complètement arrêtées, Dieu merci. Cette année, j’ai aussi fait la chirurgie du haut. C’est un truc à part. Je pourrais consacrer un million de vidéos à la chirurgie du haut. Associé aux hormones, cela a carrément fait disparaître ma dysphorie de genre. Donc, en gros, la testostérone… c’est génial. » […]

Tous les vlogueurs trans ne partagent pas la modération de Chase. Le gourou Instagram MtF (Male to Female, NDLR) Kaylee Korol, femme frêle aux cheveux bleus comme ses yeux et qui ressemble à une adolescente ordinaire, offre ce « conseil trans » : « Vous n’avez pas besoin d’être sûrs à cent pour cent d’être trans pour essayer les hormones, vraiment, assure Kaylee à ses followers. Vous pouvez essayer les hormones pendant trois mois. Après cette période, il commence à y avoir des effets permanents, mais avant, vous pouvez simplement tester et voir comment vous vous sentez. C’est génial, c’est aussi simple que ça. Les hormones ne doivent pas vous effrayer. » Inutile, donc, d’avoir la certitude d’être trans pour prendre des hormones. En fait, Kaylee ajoute que le traitement hormonal est « probablement le meilleur moyen de savoir si vous êtes trans ou non ». Il est prouvé que la testostérone a des effets secondaires néfastes, mais vous en entendrez rarement parler. Les gourous de YouTube et d’Instagram sont là « pour le fun », et les risques accrus de divers cancers et d’hystérectomie prophylactique ne sont pas vraiment fun.

Des traitements loin d’être anodins

La testostérone épaissit le sang. Les filles transidentitaires reçoivent une dose de testostérone 10 à 40 fois supérieure à ce que leur corps pourrait normalement supporter pour produire les changements qu’elles recherchent. Selon certaines indications, les femmes biologiques recevant ces doses de testostérone auraient un risque de crise cardiaque près de cinq fois supérieur à celui des femmes, et deux fois et demie supérieur à celui des hommes. Le dosage étant déterminé par l’apparence physique désirée – plutôt que par le traitement d’une maladie -, il obéit à des critères esthétiques et non pas médicaux. On justifie généralement la testostérone comme un traitement de la « dysphorie de genre », mais les endocrinologues qui la prescrivent semblent rarement évaluer ses effets sur la dysphorie du patient. Ils examinent plutôt son taux sanguin pour s’assurer que la testostérone reste dans la fourchette normale pour un homme. […] Peu de temps après la prise d’hormones mâles, des changements permanents se produisent.

Si une fille biologique regrette sa décision et arrête la testostérone, sa pilosité corporelle et faciale restera probablement en place, tout comme son excroissance clitoridienne, sa voix grave et peut-être même la masculinisation de ses traits faciaux. Même si des doses massives de testostérone doivent être maintenues pour que les effets de la transition se poursuivent, l’élimination de la T ne ramène pas l’adolescente à son point de départ. La testostérone s’accompagne également de douleurs et de désagréments. Il y a le problème de l’atrophie vaginale, mais aussi des douleurs musculaires, des crampes sévères dues à l’endométriose, une hausse de la sudation, des sautes d’humeur et de l’agressivité. Les effets à long terme comportent une augmentation des taux de diabète, d’accidents vasculaires cérébraux, de caillots sanguins, de cancers et, comme nous l’avons vu, de maladies cardiaques. Globalement, le risque de mortalité augmente. Il existe un dernier risque, inévitable, dû au fait qu’aucune patiente sur la Terre ne prend son traitement exactement à la même heure: à un moment donné, une jeune fille sous T se fera une injection un jour ou deux après la prise prévue. […] Après tous ces risques et ces sacrifices insensés, au moins la dysphorie a disparu, non ? En fait, il n’existe aucune étude à long terme indiquant que la dysphorie de genre ou les idées suicidaires diminuent après une transition médicale. Souvent, la dysphorie d’une jeune femme augmente avec la testostérone, car elle se rend compte que même avec une voix d’homme, des poils, une mâchoire carrée, un nez rond et une barbe fournie, elle ne ressemble pas tout à fait à un homme.

Les « détransitionneuses » : celles qui tentent de faire machine arrière

Presque toutes les détransitionneuses à qui j’ai parlé sont percluses de regrets. Si elles ont pris de la testostérone quelques mois seulement, elles ont une voix étonnamment masculine qui restera grave. Si elles ont été sous T pendant plus longtemps, elles souffrent de la gêne d’avoir une géographie intime inhabituelle : un clitoris élargi qui ressemble à un petit pénis. Elles détestent leur barbe naissante et leur pilosité corporelle. Elles vivent avec une poitrine lacérée et des tétons masculins (oblongs et plus petits) ou des rabats de peau qui ne ressemblent pas à des tétons. Chez celles qui ont conservé leurs ovaires, une fois privé de testostérone, le tissu mammaire se gonfle au retour des règles d’un liquide qui, souvent, n’est pas correctement drainé. […] Les désisteuses et détransitionneuses à qui j’ai parlé m’ont toutes dit qu’elles étaient sûres à 100 % d’être trans à vie – jusqu’à ce que, soudainement, elles ne le soient plus. Presque toutes reprochent à leur entourage adulte, en particulier les professionnels de la santé, d’avoir encouragé et facilité leur transition.

10 réponses sur “Abigail Shrier : « Ados transgenres, un aller sans retour possible » (Le Figaro)”

  1. Merci votre article!!
    Cela permet de replacer un peu de bon sens.
    Je travaille en psychiatrie de l’adolescence et il semble qu’une forme d’absence de pensée sur ces questions s’empare également des professionnels pour tant s’orientant avec la psychanalyse.
    Mais sous certains principes de modernité et de puissance du discours actuel cela abrase la pensée clinique.
    Merci!

    1. Merci pour votre comm !
      Cet article est le premier que je lis (n’étant pas spécialiste de ce sujet) sur les dangers de la testostérone pour la santé de centaines, voire de milliers de jeunes femmes qui se font entrainer dans ces parcours mutilants d’une violence incroyable.
      Le profil sociologique de ces filles, souvent brillantes, perfectionnistes et très anxieuses, est aussi très bien cerné.
      Il faut absolument que ces choses se sachent; et oui, sous l’influence d’une propagande très agressive, certains professionnels de santé font des sorties de route et commettent des actes qui pourraient un jour leur être vertement reprochés.

    1. Je suis d’accord en partie avec cet article. Je considère aussi que l’idéologie du genre – une invention féministe, ne l’oublions jamais – est en train de se retourner contre celles-là mêmes qui l’ont promue; celles qui nous les brisent depuis plus de 50 ans avec ces conneries, ne l’oublions pas. Donc quelque part, je trouve qu’il y a une justice. Il se trouve aussi que les trans qui vous emmerdent le plus, les féministes, sont toujours des hommes. Votre problème est toujours localisé au même endroit, dans le slip des hommes, rien ne change, en fait. Les FtM vous posent beaucoup moins de problèmes. Moi je n’ai en soi rien contre les trans, hommes ou femmes, du moment qu’ils sont heureux de leurs choix et qu’ils n’essaient pas d’imposer à la société entière une « dictature des minorités ». Ce que je déplore, par contre, comme dans cet article, ce sont les dégâts qu’ils causent à des jeunes gens fragiles, manipulés, poussés à commettre l’irréparable avec des opérations sans retour possible. Je vois autour de moi des vies ruinées avant même d’avoir été vécues et ça, ce n’est pas acceptable.
      Ensuite, là où je ne suis pas l’article, c’est sur sa vision misérabiliste et victimaire (féministe, donc) du statut des femmes. Moi, je suis une femme et je n’ai jamais été une victime des hommes – et ce n’est pourtant pas faute de les avoir côtoyés -; simplement, je ne fais pas partie de la corporation des geignardes devant l’éternel. Cette complainte de genre (« femme = victime parce que femme ») me sort par les yeux – d’où ce site.
      Je vous signale également que je considère que le patriarcat est une baudruche idéologique, une fantasmagorie : https://eromakia.fr/index.php/la-supercherie-du-patriarcat/

  2. Encore une fois, ce n’est pas parce que je vous indique un article que j’adhère à tout ce qui est écrit dedans. Je connais votre position vu que ça fait au moins deux ans que je vous lis, et sur ce sujet comme sur d’autres je la partage. Si j’avais trouvé un article écrit par un antiféministe qui soit aussi détaillé et informatif sur ce sujet, croyez bien que je vous aurais indiqué le lien sans aucun souci. Or, à l’heure actuelle, c’est le plus abouti que j’aie pu lire.

    1. D’accord, merci, pas de souci 😉
      Il se trouve juste que j’ai (dans la tête) un détecteur à éléments de langage néoféministes qui ne laisse plus rien passer. Donc le petit voyant rouge a clignoté sur presque tout ^^

        1. Mais pas de souci ! C’est moi qui suis partie au quart de tour 😉 Désolée si j’ai été un peu rude, c’est à force de fréquenter les neofem (les vraies) 😉

  3. Punaise ça c’est un article vraiment très intéressant. Merci pour votre travail et vos précisions 🙂
    à mon humble opinion, le LGBTQ+ est né grace à la révolution sexuelle des sixties. Et cela par les études menaient par les tordus tel que : Alfred Kinsey et ses rapports. Je rappel qu’il avait les supports des puissants et financement des puissantes familles : Rockefeller, Rothschild.
    Alfred Kinsey et ses rapports, complètement la folie, des études réalisées entre des prisonniers prédateurs de l’époque et des petits enfants voir des bébés mêmes. C’est grave.
    Le LGBT vient quelque part de cette perversion.
    Ils sont entrains de sexualiser les enfants également à travers la propagande LGBT.
    « Et voyez ce que le PDG de Disney disait récemment : Ne pas vouloir endoctriner ses enfants au LGBT c’est une atteinte au droit de liberté.  »

    Confierez vous vos enfants a ce genre de personnes? Moi jamais.

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