Samantha Geimer : Que les féministes la laissent tranquille !

  • Samantha Geimer est la première « victime » de Polanski – sauf quelle supplie depuis des décennies qu’on abandonne les poursuites contre lui, expliquant qu’elle n’a pas souffert de cette relation et qu’elle va parfaitement bien. Les féministes la harcèlent continuellement, ne supportant pas de ne pouvoir l’instrumentaliser au service de leur « cause ».

. Voici plusieurs articles au sujet de Samantha Geimer, assignée par les féministes à être la victime à vie de Roman Polanski, et où celle-ci  démontre ce qu’est la force et la liberté de pensée d’une femme de caractère. 
. Ils sont suivis par ma traduction française d’un billet de Samantha Geimer elle-même (27/08/2019) où elle dénonce la manipulation #Metoo, cette entreprise de contrôle des femmes par le sexe et la honte.
. Ils sont précédés par un retour de ma part sur  l’affaire Polanski /Valentine Monnier  (13/11/2019) 

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L’affaire Polanski (J’accuse)/Valentine Monnier  (13/11/2019) 

Suite à l’entreprise de démolition de Valentine Monnier à l’encontre de Roman Polanski à la veille de la sortie de J’accuse (novembre 2019),  Samantha Geimer est de nouveau harcelée par les féministes pour qu’elle prenne parti en faveur de cette manipulatrice ainsi que d’Adèle Haenel, l’autre féminazie de la semaine. Sa réponse est sans appel : elle les envoie chier !

« Sous le feu des critiques pour ne pas soutenir davantage les accusatrices qui utilisent des dates de sortie de film pour programmer leurs révélations avec la presse et sont restées assises en silence alors que je me faisais traiter de menteuse, pute et chercheuse d’or en 1977, sachant qu’elles auraient peut-être pu empêcher cela, si elles avaient eu la vérité et le courage de ma mère », écrit-elle, très remontée, sur Twitter.

La coalition des putes du cinéma, par la voix de  Sand Van Roy, la supplie alors (en vain) « de ne pas les abandonner ». Elles peuvent toujours aller se frotter !

Entre alors en scène la milicienne féministe de service, la dénommée Iris Brey, « spécialiste de la représentation du genre au cinéma » (traduction : grosse débile du féminisme universitaire) qui vient bassiner pour la cent-millième fois Samantha Geimer avec sa « culture du viol« . Elle ne supporte pas que Samantha Geimer n’ait pas souffert et n’en ait pas spécialement voulu à Polanski. Elle prétend donc savoir mieux que Samantha ce que celle-ci a vécu et ressenti. Mais c’est elle qui commet un viol ! C’est elle qui dénie aux femmes leur histoire, leur personnalité, leur expérience de vie pour les inscrire de force dans sa lecture fanatique et mensongère de la réalité ! Mais quand les femmes mettront-elles enfin des bourre-pifs à ces bécasses qui prétendent écrire leur vie à leur place ? Quand dessoudera-t-on enfin ce féminisme aux méthodes totalitaires qui viole les consciences ? Je ne les supporte plus !

=> Sur les féministes et le cinéma :

[Festival de connes] – Les César 21 et les pompeuses cornichonnes

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Idées, lundi 22 janvier 2018 – 

 Samantha Geimer : « Toute cette haine, cette revanche, ne guériront pas les femmes »

[En 1977, lorsqu’elle avait 13 ans, Samantha Geimer a été violée par Roman Polanski. Elle a récemment expliqué avoir pardonné à son agresseur. Elle a demandé à la justice américaine de clore le dossier afin qu’elle puisse retrouver une vie normale, déclarant qu’elle était toujours assaillie par la presse, quarante ans après les faits et le début de la procédure. Un juge de Los Angeles a refusé d’abandonner les poursuites et continue de considérer le réalisateur comme un fugitif. Peu après l’éclatement de l’affaire, Roman Polanski avait reconnu avoir eu des relations sexuelles avec une mineure et avait passé un accord amiable avec la justice, mais craignant que l’entente ne soit subitement annulée, il a pris la fuite vers la France en 1978.]

Tribune. On peut être surpris de me voir signer ou approuver une tribune critiquant le mouvement #metoo. Je suis une féministe, défendant les droits des victimes, et l’on me connaît d’ailleurs surtout pour avoir été moi-même victime d’un viol. Mais laissez-moi vous expliquer pourquoi je suis entièrement d’accord avec la tribune « Nous défendons une liberté d’importuner », [signée, entre autres, par Catherine Deneuve, Catherine Millet et Ingrid Caven].

#metoo devrait être une plateforme de soutien pour les victimes, un espace où l’on témoigne de sa solidarité, où l’on se soutient les unes les autres. Toutes celles qui, comme nous, ont souffert de différentes (mais semblables) façons, mais ont toujours eu conscience d’appartenir à un groupe plus vaste, de mères, de sœurs ou d’amies, nesont pas une minorité. Nous nous sommes toujours soutenues.

On ne peut pas empêcher les conservateurs politiques et religieux de détourner à leurs fins les initiatives les plus louables. Pour attaquer, par exemple, Meryl Streep, Hollywood en général ou des hommes politiques qui ne leur plaisent pas, ils se serviront de #metoo ou de n’importe quel autre mouvement, sans aucun souci de ce qui est réellement en jeu, des personnes qui souffrent ou ont souffert.

« On m’accuse de faire l’apologie du viol, d’être sous le coup du syndrome de Stockholm (…) et, plus grave encore, de causer du tort à toutes les autres victimes de viol. Une dérangée, en somme »

J’ai passé quarante ans de ma vie à me défendre. Contre les attaques de ceux qui considéraient qu’il n’était pas possible de se remettre d’un rapport sexuel avec un homme beaucoup plus âgé, en l’occurrence Roman Polanski. Faut-il vraiment que je souffre pour vous donner satisfaction ? Pourquoi expliquer que ce qui m’est arrivé était affreux, épouvantable ? Ça n’a pas été le cas, mais ça n’en était pas moins un crime. Un crime pour lequel Roman Polanski a plaidé coupable et fait de la prison.

Quand je refuse de me plier à ce que l’on exige de moi en faisant état des dégâts causés, on m’accuse de faire l’apologie du viol, d’être sous le coup du syndrome de Stockholm, de m’être laissé acheter et, plus grave encore, de causer du tort à toutes les autres victimes de viol. Une dérangée, en somme. Et une traînée par-dessus le marché, puisque j’étais sexuellement active à 13 ans.

Le problème quand on est une femme forte, une survivante, c’est que les militants ne peuvent rien tirer de vous. Ils le comprennent tout de suite et tournent les talons. Ils ont besoin de victimes, pas de rescapées. Qu’on se le dise : si vous vous en sortez, pourquoi auriez-vous besoin d’eux ? Il faudrait en finir avec ce genre de militantisme. Finir de s’excuser d’être un survivant heureux et solide. Nous devrions au contraire servir d’exemples, donner du courage aux femmes qui se battent et les aider à se relever. Il n’est pas vrai que notre rétablissement nuit aux autres.

Redonner aux femmes leur pouvoir d’action

Le viol, le harcèlement sexuel et l’intimidation au travail sont des problèmes graves, qui doivent être traités avec gravité. Il faut redonner aux femmes leur pouvoir d’action, pas exiger d’elles qu’elles ressassent indéfiniment le tort « assurément indélébile » qu’elles ont subi, pour prouver que ce qui leur est arrivé est mal, ou même simplement pour nous divertir. Il est triste qu’une femme confiante, ayant survécu à un drame, soit moins intéressante que le spectacle d’une femme tordue de douleur.

Si #metoo ne sert finalement plus qu’à attaquer des gens puissants ou à tirer profit de personnes maltraitées, pour prouver quelque chose ou se valoriser, si le mouvement n’offre aucun soutien, ne permet aucune guérison, mais sert juste à « valider » votre peine comme s’il s’agissait d’un mérite, d’un atout, plutôt que d’un événement que l’on peut surmonter, alors il est temps de tourner la page de #metoo.

Mettre une simple caresse au cours d’une séance photo, une mauvaise blague, certains comportements typiques des années 1970-1980 sur le même plan qu’un viol ou un véritable harcèlement sexuel, c’est minimiser la gravité de ces crimes et de ces agissements. Quand on parle de pédophilie à propos d’avances faites à des jeunes de 17 ans, c’est faire peu de cas des véritables victimes de pédophilie. Si vous sondez votre mémoire pour essayer de savoir qui, par le passé, a eu à votre égard une attitude inappropriée, c’est que vous n’êtes pas une victime, et vous ne devriez pas souhaiter l’être.

Les femmes doivent s’affirmer telles qu’elles sont

La société valorise la faiblesse et la douleur chez les femmes, mais nous valons bien plus que cela. Si les femmesveulent l’égalité, être reconnues partout, dans tous les domaines, il va falloir qu’elles s’affirment telles qu’elles sont en réalité : comme des adultes solides, qui n’ont pas besoin de protection spéciale ou de traitement particulier parce qu’elles appartiendraient au sexe faible, des femmes capables de se défendre, parce qu’on nous l’a appris et qu’on l’attend de nous.

« Ce qui change une vie, ce n’est pas une expérience douloureuse, c’est notre résilience »

Je ne suis pas d’accord avec l’idéologie puritaine qui explique aux femmes que le sexe leur fait violence et qu’il est « capté » par les hommes. Qu’elles se résument à leur vagin, à leurs corps, d’après les critères que les hommes qui les touchent ont fixés. Il faut enseigner aux jeunes femmes d’aujourd’hui que la sexualité est quelque chose de sain, de normal, de nécessaire. Ce qui change une vie, ce n’est pas une expérience douloureuse, c’est notre résilience. Toute cette haine, cette revanche ne nous guériront pas, pas plus qu’elles n’effaceront le passé. Votre beauté, votre mérite, voilà ce qu’on ne pourra jamais vous enlever.

La cause des femmes devrait nous rendre plus fortes, pas nous transformer toutes en éternelles victimes qu’il faudrait protéger du monde, des hommes, du sexe… et d’elles-mêmes. La sexualité est quelque chose de personnel, cela fait partie de la vie : c’est compliqué et ça ne se passe pas toujours bien. Mais ça ne fait pas de mal. Il ne faut pasconfondre ceux qui nous aident à nous émanciper, à regagner du pouvoir, et ceux qui nous refusent le droit de choisir notre sexualité en dehors de celle qui correspond à ce qu’ils entendent contrôler religieusement et politiquement.

Le viol est un crime, le harcèlement sexuel au travail a des conséquences graves et cela doit prendre fin. Mais qu’on nous offense est aussi le prix à payer pour être libres. Ne confondons pas tout. Il n’est pas toujours facile d’y voir clair, mais s’il vous plaît, mesdames, ne renonçons pas aux droits et à l’égalité pour lesquels nous nous sommes si durement battues, au profit de gens qui ne veulent que nous contrôler et nous mettre en cage.

(Traduit de l’anglais par Pauline Colonna d’Istria)

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. Le Point.fr, no. 201801
Société, lundi 22 janvier 2018 –
#MeToo : victime de Polanski, elle explique son soutien à la tribune du « Monde »

Par 6Medias
Samantha Geimer reproche au mouvement MeToo d’enfermer les femmes dans leur statut de victime et de considérer celles qui s’en sortent comme des « dérangées ».

« Je suis une féministe défendant les droits des victimes. » C’est ainsi que se définit Samantha Geimer, abusée sexuellement par Roman Polanski à l’âge de 13 ans. Dans une tribune qu’elle publie dans Le Monde lundi, l’Américaine explique pourquoi elle a signé le texte publié le 9 janvier qui défendait la « liberté d’importuner » pour les hommes, corollaire indispensable à la liberté sexuelle, selon les auteurs.

Cette tribune signée par une centaine de femmes, dont Catherine Deneuve, a été très critiquée. Dans les colonnes du quotidien, Samantha Geimer affirme qu’elle sait que son choix peut surprendre. « On me connaît d’ailleurs surtout pour avoir été moi-même victime d’un viol », rappelle-t-elle. Depuis, l’Américaine a récemment affirmé avoir pardonné au réalisateur et demandé à la justice américaine de classer l’affaire. Cette agression ne l’empêche toutefois pas d’être « d’accord » avec la tribune du 9 janvier. « J’ai passé 40 ans de ma vie à me défendre. Contre lesattaques de ceux qui considéraient qu’il n’était pas possible de se remettre d’un rapport sexuel avec un homme beaucoup plus âgé », écrit-elle.

La parole des « rescapées » pas assez entendue

Samantha Geimer raconte avoir été accusée de « faire l’apologie du viol », de s’être « laissé acheter », voire « de causer du tort à toutes les autres victimes de viol », en ayant refusé de se « plier à ce que l’on exige d'[elle] en faisant état des dégâts causés ». Comme d’autres, elle déplore que le mouvement #MeToo dénonce indistinctement toutesorte de comportements comme s’ils se valaient tous : « Mettre une simple caresse au cours d’une séance photo, une mauvaise blague […] sur le même plan qu’un viol, c’est minimiser la gravité de ces crimes et de ces agissements. »

Pour elle, la prise de parole des femmes ces derniers mois a été instrumentalisée. « #MeToo devrait être une plateforme de soutien pour les victimes, un espace où l’on témoigne de sa solidarité », revendique-t-elle, avant d’observer que « le problème quand on est une survivante, c’est que les militants ne peuvent rien tirer de vous. […] Ils ont besoin de victimes, pas de rescapées. » Pour Samantha Geimer, la prise de parole des victimes ayant réussi à se reconstruire après un viol n’est pas assez entendue. Une erreur, dit-elle. « Nous devrions au contraire servir d’exemples, donner du courage aux femmes qui se battent et les aider à se relever. Il n’est pas vrai que notre rétablissement nuit aux autres. »

Tourner la page de #MeToo

C’est pour cela qu’elle plébiscite un combat quelque peu différent de celui présenté jusqu’à présent au travers des différentes prises de parole. « Il faut redonner aux femmes leur pouvoir d’action, pas exiger d’elles qu’elles ressassent indéfiniment le tort « assurément indélébile » qu’elles ont subi. » Et l’Américaine de s’agacer : « Il est triste qu’une femme confiante, ayant survécu à un drame, soit moins intéressante que le spectacle d’une femme tordue de douleur. »

Pour Samantha Geimer, si le mouvement #MeToo est revanchard, il est temps de « l’enterrer ». « S’il ne permet aucune guérison, mais sert juste à « valider » votre peine comme s’il s’agissait d’un mérite plutôt que d’un événement que l’on peut surmonter, alors il est temps de tourner la page », écrit-elle.

« Toute cette haine, cette revanche ne nous guériront pas, pas plus qu’elles n’effaceront le passé », ajoute-t-elle, avant de conclure. « La cause des femmes devrait nous rendre plus fortes, pas nous transformer toutes en éternelles victimes qu’il faudrait protéger du monde, des hommes, du sexe… et d’elles-mêmes. »

 . Samantha Geimer, « L’arme de la honte » :

 « Lorsque vous associez la honte et la culpabilité au sexe, vous facilitez les abus sexuels. J’ai atteint l’âge adulte quand l’activité sexuelle était considérée comme une dimension saine de la vie. On ne m’a jamais appris que le sexe me dévalorisait ou me causait du tort. L’idée que le sexe était pris par des hommes à des femmes qui abandonnaient quelque chose ne faisait pas partie du monde que je connaissais.
Lorsqu’un homme plus âgé m’a forcée, les réactions de nombreuses personnes m’ont déconcertée. Pourquoi n’avais-je pas honte ? Pourquoi ne m’étais-je pas sentie endommagée et salie ? J’ai pensé : pourquoi le serais-je ? Je n’ai rien fait de mal. Au cours des 42 années qui ont suivi, les temps ont changé et mon combat contre ce récit, selon lequel j’étais amoindrie à cause de ce qui s’était passé, est devenu encore plus difficile.
En quoi est-il rationnel de demander aux victimes d’agression sexuelle de maximiser leur douleur afin de prouver que l’agression sexuelle est bel et bien répréhensible ? (…) Au début, je me sentais chanceuse d’avoir été élevée avec une mentalité saine envers le sexe. J’avais vécu une mauvaise expérience, mais j’allais bien.
Au fil des décennies, le ressentiment m’a de plus en plus gagnée car je subissais constamment des pressions pour éprouver de la colère et de la douleur, de la part d’inconnus qui exagéraient – souhaitant même qu’il me soit arrivé quelque chose de pire – pour satisfaire leur propre besoin de transformer la sexualité, une chose naturelle, en quelque chose de sale et de nuisible. Lorsque nous mettons ces pensées malsaines dans l’esprit de nos jeunes, nous les aidons à souffrir ou faire souffrir. Si vous parlez des rapports sexuels comme s’ils causaient des dégâts ou des blessures, les gens l’utiliseront comme une arme. Si vous dites aux jeunes femmes que le sexe les dévalue et leur nuit, elles se sentiront honteuses et coupables, même dans les rapports sexuels consensuels. Le fardeau que vous leur demandez de porter, si elles sont un jour agressées, n’est rien moins que cruel.
Le sexe est une fonction naturelle et biologiquement impérative de l’humanité. C’est beau ; c’est drôle ; c’est une grande partie de la vie. Lorsque celles qui tentent d’imposer la moralité sexuelle à d’autres via la honte et la stigmatisation prennent le contrôle du récit, comme elles l’ont fait avec le mouvement #MeToo, elles deviennent non seulement des abuseurs, mais elles encouragent et facilitent la violence sexuelle en transformant le sexe en arme. Elles ne souhaitent pas autonomiser les femmes : elles souhaitent les contrôler. »

 

. Sur le même thème, mon témoignage :

Le Verrou de Fragonard ou l’équilibre asymétrique des désirs

 

D’un désert à l’autre

Jean-Patrick Capdevielle, Dimanche Treize (album Mauvaises Fréquentations, 1984)
Wim Wenders, Paris, Texas (1984)

L’ouverture mythique de Paris, Texas (1984) m’a toujours fait penser à la chanson Quand t’es dans le désert, sortie en 1979 (« Moi je traîne dans le désert depuis plus de 28 jours… »).

Travis Henderson (Harry Dean Stanton) dans le désert de Mojave (Ouest américain).

Impossible de savoir s’il existe un lien objectif entre les deux, mais Paris, Texas étant une production franco-allemande, rien n’empêche d’imaginer que Wenders (ou un autre ayant partie prenante au film) ait entendu ou fredonné cette chanson que tout le monde connaissait – et qui a squatté les charts pendant des mois – au début des années 80.

Le film s’inspirerait vaguement des Motel Chronicles (1982) de Sam Shepard, recueil de nouvelles sur le rêve américain déchu et l’Ouest désenchanté. Sam Shepard, écrivain lié à la Beat Generation (les inspirateurs du mouvement hippie), était, tout comme Jean-Patrick,  fortement marqué par Bob Dylan  – et je sens aussi fortement planer les images des chansons de Bruce Springsteen dans ses textes.

Des Motel Chronicles à Paris, Texas

« À l’origine de Paris, Texas, raconte Wim Wenders, il y a une image qui existait dans une seule phrase des petites histoires de Motel Chronicles. L’image de quelqu’un qui quitte le freeway et se met en marche droit dans le désert. Et puis aussi, un sentiment, une image plus qu’un sentiment : regarder l’atlas, la carte routière des États-Unis et partir, sur le moment, vers un endroit qu’on a trouvé sur la carte. C’est une seule phrase, et c’est vraiment là que le film a commencé. Avant qu’il n’ait une biographie, avant qu’il n’y ait le garçon, la femme, Travis était quelqu’un qui regardait la carte et qui était perdu. Et qui était un jour au Texas, et deux jours après on le retrouvait dans l’Illinois parce qu’il avait vu le nom d’une ville sur la carte et il voulait y aller. » (Postface de Bernard Eisenschitz à l’édition française des Motel Chronicles, 10/18, 1987, p. 148).

La nouvelle en question tient sur une page (p. 109 de l’édition française). Elle commence par :

« Il est debout immobile près de sa valise écrasée, scrutant ce qui reste de ses possessions. Les  savonnettes récupérées dans les douches de motel, écrabouillées. Les boîtes de haricots verts aplaties. Une carte déchirée de l’Utah. Du goudron chaud et des gravillons maculent la serviette pure et blanche qu’il avait gardée en réserve pour son premier bain du mois. »

Elle se termine ainsi : « Il jette tout sur la pile de débris. S’accroupit nu dans le sable brûlant. Fait flamber le tout. Puis se redresse. Tourne le dos à la Route US 608. S’enfonce dans la plaine ouverte. »

La nouvelle, datée du 17/2/80 et écrite à Santa Rosa, Californie, n’est postérieure que de quelques mois à Quand t’es dans le désert, sortie en France à l’automne 1979. On notera par ailleurs l’ouverture parallèle avec la chanson C’est dur d’être un héros (enregistrée en août 1980) : « T’as plus qu’une chemise et t’es presque zéro / T’es perché sur ta valise, tu regardes passer les métros »).

L’errance dans le désert de l’Utah fait aussi résonner The Promised Land de Bruce Springsteen (1978) : « Sur une autoroute qui serpente dans le désert de l’Utah, j’ai ramassé mon fric et suis retourné vers la ville ». De son côté, c’est seulement en 2012 que Bob Dylan exploitera cette veine, dans The Narrow Way (« La voie étroite ») : « Je marcherai dans le désert jusqu’à avoir recouvré la raison. Je ne penserai même pas à ce que j’ai laissé derrière. Il n’y a rien là-bas qui était vraiment à moi de toutes façons ».

La source d’inspiration des Motel Chronicles pour Paris, Texas reste finalement très ténue, presque tirée par les cheveux. À tel point que je me demande toujours si l’énorme succès de la chanson de Jean-Patrick n’a pas tout autant joué son rôle pour imprimer une image puissante et évocatrice dans l’esprit des uns ou des autres. 😉

Quoi qu’il en soit des influences réelles, on pourra tout au moins retenir une communauté d’inspiration, en ce début des années 80, entre les univers de JPC, de Sam Shepard et qui sait, de Paris, Texas… 

De Los Angeles à Ibiza

Quelque chose d’Ibiza, haut lieu de la communauté hippie internationale (où JP a élu domicile en 1970) flotte sur les collines de Los Angeles telles que Wim Wenders les a filmées. Le vent chaud, la végétation, les rues qui montent, les villas perchées…

Travis Henderson dans le jardin de son frère, dans la banlieue de Los Angeles.

Los Angeles, Ibiza… Jean-Patrick me dit en plus que l’acteur principal du film, Harry Dean Stanton, était par la suite devenu un ami de son fils Cyril, qui a vécu (et souffert) à Los Angeles. Ci-dessous une photo de Cyril face à JP et un autre ami (Bob Jesse ?) sous une tonnelle d’Ibiza en 1981 (j’en profite pour envoyer des pensées affectueuses à Cyril, à qui j’ai souvent pensé).

Jean-Patrick, Cyril et un ami (Ibiza, 1981)

Pensées émues aussi à David que j’avais pris en photo en 2012 avec ses chevaux :

David Capdevielle (Ibiza Horse Valley, 2012)

Parmi les sources d’inspiration de Wim Wenders pour ce film d’une beauté étourdissante, on reconnaît les toiles d’Edward Hopper. La scène où Travis revoit pour la première fois Jane (de dos) me fait penser à Nighthawks (Oiseaux de nuit), entre autres  :

Edward Hopper, Nighthawks, 1942 (Chicago Art Institute)

Par ailleurs, la tenue inoubliable de Jane (Nastassja Kinski), ce long pull-over rouge sur des collants, m’a rappelé celle de la danseuse du clip de Nancy Sinatra, These boots are made for walking (1966), ici aussi une délicieuse blonde péroxydée. On dirait que Jane a simplement enfilé le fameux pull rouge devant-derrière 🙂 . Je les ai donc réunies dans ma vidéo.

[… à suivre…]

Et si vous n’avez pas encore cliqué sur Dimanche Treize ==>

. Paris, Texas et Pleure pas, Marie

Paris,Texas m’avait déjà inspiré l’illustration de cette version oubliée (mais magnifique, avec un refrain inédit) de Gâche pas ta nuit (1980), sous la forme d’un roman-photo :

. Et pour découvrir les toiles de JP :

Feminists love islamists

https://www.youtube.com/watch?v=ecJUqhm2g08

Transcription et traduction en français

Français

Les féministes aiment les islamistes

  • Je suis un islamiste
  • Je suis une féministe

Vous ne pourriez pas croire qu’on a tellement en commun
Mais on partage essentiellement la même idéologie
Et les musulmans sont opprimés, de même que toutes les femmes

  • Je dis « haram »
  • Je dis « problématique »
  • Tu dis que tout est « offensant »
  • Et tu dis que tout est « pas dans le Coran »
  • Tu es un islamiste
  • Et tu es une féministe

Nous avons tellement en commun

  • Je dis « islamophobie »
  • Je dis « misogynie »
  • J’accuse les médias juifs
  • J’accuse le patriarcat
  • Car je suis féministe
  • Et je suis islamiste

Une belle paire de tarés geignards

Islamiste : – Tu sais ce qui me fait me sentir vraiment marginalisé ? C’est quand des ignorants me rappellent que le prophète (Allahou Allah) a eu des relations sexuelles avec une petite fille de 9 ans.
Féministe : – Mahomet a eu des relations sexuelles avec un enfant ? Oh, mais c’est super ! Ça veut dire que chaque pédophile blanc cis-genré hétéronormé, ici en Occident, est coupable d’appropriation culturelle et c’est ça, le véritable problème de la société !
Islamiste : – Ah oui !
Féministe : – Tu vois, c’est simple, quand on regarde le monde à travers des lunettes problématiques !
Islamiste : – Oh, qui aurait pensé que toi et moi on irait si bien ensemble ?

  • Je dis « Justice sociale »
  • Je dis « Jihad »
  • Je dis « Slutwalk » (« Marche des salopes »)
  • Je dis « Salope ! Où est ton hijab ? »
  • Car je suis islamiste
  • Et je suis féministe

Nous avons tellement en commun

Islamiste : – Ça te dérange si je te viole maintenant ?
Féministe : – Oh, ne sois pas stupide, ce n’est pas un viol quand c’est un musulman qui le fait !
Islamiste : – Haha, elle est bien bonne, haha.

Anglais

Feminists love islamists

I am an islamist
I am a feminist
You might not think we have
Very much in common
But we share essentially
The same ideology
And Muslims are oppressed
Just like every woman
I say « haram »
I say « problematic »
You say everything is triggering
And you say everything’s unquranic
Cos you’re an islamist
And you are a feminist
We have so very much in common

I say « islamophobia »
I say « misogyny »
I blame the Jewish media
I blame the patriarchy
Cos I am a feminist
And I am an islamist
A whiny pair of little spastics

Islamist: You know what makes me feel really marginalized, yeah? It’s when ignorant people remind me that the prophet (Allah hu Allah) had sex with a little 9 year old girl.
Feminist: Muhammad had sex with a child? Oh that’s awesome! That means that every white cis-gendered heteronormative pedophile here in the West is guilty of cultural appropriation, and that is the real societal problem!
Islamist: Oh yeah.
Feminist: See, its easy when you look at the world through problematic glasses!
Islamist: Oh, who would’ve thought you and me would get along so well

I say « Social justice »
I say « Jihad »
I say « Slutwalk »
I say « Whore, where is your hijab ? »
Cos I am an islamist
And I am a feminist
We have so very much in common

Islamist: So, do you mind if I rape you now ?
Feminist: Oh, don’t be silly, it’s not rape when a muslim does it !
Islamist: Haha, that is a good one, haha.

***

Voir aussi :

Feminists love islamists

[Violence masculine ] – Repenser le genre, la sexualité et la violence

Voici la traduction de l’article de Gideon Scopes pour Quillette, Rethinking Gender, Sexuality, and Violence.

Repenser le genre, la sexualité et la violence

Par Gideon Scopes

25 octobre 2017

Au cours des deux dernières semaines, l’Amérique a été bouleversée par la découverte que le producteur de films hollywoodien Harvey Weinstein s’était livré à de nombreux actes de harcèlement sexuel et peut-être même d’agression sexuelle. En réponse, l’actrice Alyssa Milano a lancé une campagne sur les médias sociaux afin de sensibiliser à ces formes d’abus dans le monde entier, en tweetant:

Même si Milano a pu avoir comme objectif louable d’attirer l’attention sur un problème sérieux, ce qui a suivi n’a pas été tout à fait exact, et une quantité non négligeable de laideur s’est déchaînée.

Dans le grand public et sur les médias sociaux, on nous a dit que toutes les femmes vivaient sous une menace constante et que tous les hommes faisaient partie du problème.1

Si un homme avait l’audace de dire #MeToo et de souligner qu’il avait aussi été victime, il pouvait se voir moqué d’être insensible aux femmes :

Un chroniqueur a reproché aux « nice guys », (« bons gars ») d’être plus ou moins responsables de l’essentiel du problème et qu’ils avaient la responsabilité de le régler.3

Le journaliste Benjamin Law a lancé le hashtag #HowIWillChange pour que les hommes se confessent publiquement et « assument la responsabilité de leur rôle, complaisant ou autre, dans la culture du viol », dépeignant en « bad guy » (« sale type ») tout homme ayant déjà mis en doute la véracité d’une plainte pour harcèlement 4.

Les hommes et la violence

Il est important d’évaluer l’exactitude et l’impact du stéréotype selon lequel les hommes en général seraient violents. S’il est vrai que l’écrasante majorité des crimes violents est commise par des hommes, c’est une infime minorité d’hommes qui est responsable de la majorité des actes de violence. Dans un échantillon suédois, les 1% les plus violents de la population ont commis 63% de tous les crimes violents (N = 2 393 765), soit presque deux fois plus que les 99% restant tous ensemble 5.

Il a également été démontré que le sous-ensemble de la population avec la plus grande propension à la criminalité, les « contrevenants qui persistent tout au long de leur vie », sont beaucoup plus susceptibles que la population générale de commettre un viol ou de recourir à l’agression sexuelle 6.

Les chercheurs qui ont étudié cette question avancent que la propension de cette petite minorité d’hommes à commettre de tels actes peut être causée par la génétique de ces hommes particuliers, et non par une « culture du viol » qui enseignerait aux hommes en général que la violence contre les femmes est acceptable.

Dans le domaine du harcèlement sexuel également, les récidivistes risquent de donner une mauvaise réputation à la population masculine entière. Il est fort probable qu’un très faible pourcentage d’hommes harcèle un grand nombre de femmes, causant une détresse disproportionnée. Et ce type de délinquant (contrevenant récidivant toute sa vie) est souvent résistant à la réadaptation et au traitement. En effet, certaines recherches ont montré que les tentatives de réhabilitation des psychopathes (diagnostiqués par l’échelle de psychopathie de Hare) ont augmenté leur probabilité de commettre des crimes violents tels que les agressions sexuelles.7

Considérant cette réalité, il est douteux qu’une campagne de hashtag telle que #MeToo puisse être efficace pour réduire la violence commise par ce groupe spécifique d’hommes.

Prétendre que tous les hommes sont violents n’est pas seulement inexact mais nuisible, car cela inflige des dommages considérables aux innocents en les culpabilisant. Les délinquants récidivistes ne représentent qu’un faible pourcentage des délinquants criminels, qui représentent à leur tour un faible pourcentage de la population masculine en général.

Les expériences violentes sont-elles universelles ?

L’ampleur de la réponse au tweet de Milano ne signifie pas nécessairement que son expérience est partagée par toutes les femmes. Supposons, pour les besoins de la démonstration, que seulement 5% de la population ait subi ce type d’abus. Étant donné que Milano compte 3,25 millions de followers sur Twitter, si 5% répondaient à son tweet, cela conduirait à 162 500 posts. Si chacune de ces adeptes avait à son tour 100 amies, dont 5% répondent qu’elles ont elles aussi été victimes, cela entraînerait 812 500 posts. Continuez encore sur plusieurs niveaux, et vous pourrez voir comment l’échelle d’Internet peut rendre virale une campagne de sensibilisation, avec des millions de messages, même si elle touche quelque chose qui n’affecte qu’un faible pourcentage de la population.

Bien sûr, cette analyse ne démontre pas que les abus sont rares ; elle montre seulement que le succès de #MeToo ne prouve pas le contraire. Pour répondre à la question de savoir à quel point les abus sont réellement répandus, il est crucial de définir clairement ce qui constitue exactement un abus. Avoir été « harcelée ou agressée sexuellement » peut englober n’importe quoi, d’avoir entendu une blague sexuellement explicite jusqu’à une violente récidive pendant une longue période de temps. Le premier est un affront relativement léger que la plupart des adultes de l’un ou l’autre sexe ont probablement vécu à un moment de leur vie, alors que le second est l’une des épreuves les plus terribles qu’une personne puisse subir, et il y a certainement de nombreuses nuances de gris à l’intérieur. Si nous traitons chaque blague inappropriée comme un crime violent, alors nous rendons un mauvais service à toutes les parties concernées : les vraies victimes voient leurs expériences diluées au milieu de griefs relativement insignifiants ; des hommes innocents peuvent être entraînés avec les coupables dans la panique morale qui en résulte et l’intégrité factuelle de notre compréhension de ces questions importantes est gravement compromise.

Il nous incombe également d’être conscients que les crimes violents, y compris les agressions sexuelles, sont en déclin depuis des décennies. Comme l’a illustré Steven Pinker dans son livre The Better Angels of Our Nature: Why Violence Has Declined, cette tendance est représentée dans de nombreux pays et recoupe de nombreuses catégories démographiques.8

Selon RAINN, le plus grand organisme sans but lucratif de prévention du viol aux Etats-Unis, depuis 1993, les agressions sexuelles y ont diminué de moitié 9. Même si un seul viol est un viol de trop, nous devrions également nous inquiéter de créer une panique morale lorsque les données indiquent que la situation s’améliore réellement. Cela peut interférer avec notre capacité à tirer des leçons de l’expérience et à comprendre comment nous avons acté ce déclin, et rendant plus difficile de nous assurer que nous continuons à tirer parti des progrès que nous avons réalisés pour prévenir ce crime terrible.

Les statistiques sur la violence sexuelle

Pour comprendre l’ampleur réelle du problème, nous pouvons nous reporter à l’Enquête nationale sur les partenaires intimes et la violence sexuelle (NISVS), une étude menée en 2010 par les Centers for Disease Control pour mesurer la prévalence des différentes formes d’abus.10 En examinant ces données, nous pouvons réévaluer l’affirmation comme quoi la violence sexuelle est une expérience universelle parmi les femmes et que les hommes ne seraient pas affectés.

Pour commencer, considérons la forme la plus grave de la violence sexuelle, le viol. Selon l’enquête, 18,3% des femmes et 1,4% des hommes ont été violés à un moment donné de leur vie. Cependant, le NISVS utilise une définition du viol qui exclut la plupart des victimes masculines, en y incluant uniquement celles qui ont été violées par un autre homme ou violées de manière anale en utilisant les doigts du violeur ou un objet. La plupart des hommes qui ont été violés par une femme – que ce soit par la force physique, les menaces de force physique ou qui ont été mis en incapacité par la consommation d’alcool ou de de drogues du viol – sont pour autant considérés comme étant « faits pour pénétrer », ce qui est classé comme une forme d’« autres violences sexuelles », malgré le fait qu’ils répondent à la définition commune du viol en tant que rapport sexuel forcé. La prévalence au cours d’une vie de cette forme de viol est de 4,8% pour les hommes, ce qui est un trop petit nombre pour être correctement estimé à partir des résultats de l’enquête pour les femmes. En combinant ces deux paires de chiffres, nous constatons que le viol est environ 3 à 4 fois plus fréquent chez les femmes que chez les hommes, en prenant en compte le nombre d’hommes « faits pour pénétrer » qui ont également été victimes de viol selon la définition du NISVS.

Cependant, l’écart entre les sexes disparaît complètement si l’on considère la prévalence sur une période de 12 mois au lieu de la prévalence sur la vie entière : 1,1% des femmes ont été victimes de viol, tandis que 1,1% des hommes sont « faits pour pénétrer ». Nous ne connaissons pas les raisons de cette disparité. Il est possible qu’il y ait eu un plus grand écart entre les sexes par le passé qu’aujourd’hui ou que les victimes masculines qui ont été violées plus récemment soient plus susceptibles de déclarer leur agression dans l’enquête. Quel que soit le véritable rapport entre les sexes, nous savons que le viol est loin d’être une expérience universelle pour l’un ou l’autre sexe, même si c’est un problème pour les deux. C’est simplement la chose décente à faire pour traiter toutes les victimes avec empathie et respect et ne pas écarter quelqu’un simplement à cause de son sexe.

Le NISVS a également mesuré d’autres formes de contacts sexuels non désirés qui n’atteignent pas le niveau du viol. Ces types d’abus sont un peu plus fréquents mais encore loin d’être universels, affectant 27,2% des femmes et 11,7% des hommes. Encore une fois, lorsque l’on regarde les statistiques de prévalence sur 12 mois, l’écart entre les sexes se réduit au point de disparaître, 2,2% des femmes et 2,3% des hommes déclarant avoir été victimes au cours d’une même année.

Les statistiques sur la violence conjugale

Après avoir longuement discuté des abus sexuels, tournons-nous maintenant vers la violence conjugale. Il est vrai que les femmes sont plus susceptibles de subir les formes les plus graves de violence domestique, qui peuvent aboutir au harcèlement et au meurtre. Cependant, 30% des victimes d’homicides entre partenaires intimes sont des hommes 11. Même pour cette forme de violence la plus rare et la plus grave, les victimes masculines sont loin d’être négligeables. Les formes moins graves de violence conjugale sont à la fois plus courantes et plus équitablement réparties.

La violence domestique est en effet un fléau qui affecte les personnes des deux sexes. Selon le NISVS, 32,9% des femmes et 28,2% des hommes déclarent avoir été victimes de violence conjugale à un moment de leur vie. Le rapport entre les sexes change lorsque l’on considère la prévalence à 12 mois, soit 4,0% pour les femmes et 4,7% pour les hommes. Si nous nous limitons à regarder uniquement la violence conjugale grave, nous constatons qu’elle est moins commune avec un biais de genre un peu plus grand, avec 24,3% de femmes et 13,8% d’hommes déclarant avoir été victimes à un moment de leur vie ; mais encore une fois l’écart est légèrement plus faible (2,7% contre 2,0%) sur une période de 12 mois. Qu’on la définisse de manière plus large ou plus étroite, la violence conjugale est un fléau affectant un nombre significatif de personnes des deux sexes – bien qu’il soit loin d’être universel pour l’un ou l’autre.

Les couples LGBT sont particulièrement à risque d’être victimes de violence conjugale. Selon les données du SNISV, les lesbiennes étaient significativement plus susceptibles que leurs homologues hétérosexuels d’être victimes de violence conjugale, tout comme les bisexuels des deux sexes, 61,1% des femmes bisexuelles ayant déclaré avoir été victimes 12.

Les moyens de lutte contre la violence conjugale, y compris les refuges et d’autres services, ont été fondés sur l’hypothèse que les abus vont des hommes vers les femmes ; de ce fait, les victimes LGBT déclarent souvent faire l’objet de discrimination lorsqu’elles cherchent de l’aide 13.

Les victimes masculines sont également confrontées à des obstacles liés au genre pour être prises au sérieux. ABC News a mené une expérience sociale dans laquelle une femme a battu un homme en public devant une caméra cachée 14. L’expérience a duré des heures et pas moins de 163 spectateurs des deux sexes sont passés avant que quelqu’un appelle finalement le 911. Une femme s’est même plantée devant l’agresseuse, lui disant : « Vas-y, ma fille ! ». Lorsque des témoins ont été interrogés par ABC, ils ont dit qu’ils supposaient que l’homme devait avoir fait quelque chose pour mériter cela, plutôt que de penser qu’il méritait de l’aide.

Nous voyons aussi ces attitudes jouer dans la culture populaire. Prenons par exemple le clip sorti en 2014 de la chanteuse de country Taylor Swift pour sa chanson « Blank Space » 15. On y voit Swift pousser son petit ami et lui lancer un objet lourd au visage. Vers la fin de la vidéo, il est allongé sur le sol inconscient avec elle sur lui, secouant violemment sa tête d’avant en arrière et l’embrassant érotiquement. Alors que ce qui se passe ensuite est laissé à l’imagination du spectateur, le moins qu’on puisse dire est que ce n’est pas consensuel.

Les hommes victimes de violence conjugale sont souvent confrontés à l’obstacle surprenant d’être faussement accusés du crime dont ils ont été victimes. L’une des scènes les plus poignantes du documentaire de 2016 « The Red Pill » montre une victime de sexe masculin racontant comment il a été réprimandé par un policier qui lui disait qu’il ferait mieux de sortir immédiatement si sa femme devenait à nouveau violente, car il serait emmené en prison si elle se cassait ne serait-ce qu’un ongle en le frappant.16

Une étude de 2011 confirme qu’il ne s’agit pas seulement d’incidents isolés, mais d’un problème généralisé – en fait, les hommes qui appellent le 911 pour obtenir de l’aide en matière de violence conjugale sont plus susceptibles d’être arrêtés eux-mêmes que les autres.17  La même étude a révélé que les hommes qui appellent les services d’assistance téléphonique ou d’autres fournisseurs de services ont souvent été rejetés au motif qu’ils aident uniquement les femmes, et 95% ont estimé que les prestataires de services avaient des préjugés contre eux en raison de leur sexe.

Les formes de violence examinées par le NISVS sont celles qui sont les plus susceptibles d’affecter les femmes, mais elles sont loin d’être les seules formes de violence. Pour les taux des autres crimes, nous pouvons regarder l’Enquête nationale sur les victimes de crimes (NCVS), une enquête annuelle réalisée par le Bureau of Justice Statistics qui mesure les taux de victimes pour chaque crime. Les données montrent que la majorité des victimes de crimes violents sont des hommes 18. Le seul crime non mesuré par le NCVS est le meurtre, car une victime qui a été tuée ne peut pas répondre à une enquête de victimisation. Pour les données sur le meurtre, nous nous tournons vers les Uniform Crime Reports du FBI pour constater que pas moins de 78% des victimes sont des hommes 19.

Le système de justice pénale

En plus de discuter des perspectives des victimes, il est également important de considérer l’injustice découlant des stéréotypes comme quoi les hommes en général sont violents. Pour voir cela, nous devons seulement regarder la manière différente dont les hommes et les femmes sont traités par le système de justice pénale. Selon le Registre national des disculpations, plus de 90% des personnes jugées coupables à tort de crimes qu’elles n’ont pas commis sont des hommes 20. Lorsqu’un homme est reconnu coupable d’un crime, à tort ou à raison, il peut s’attendre à recevoir une peine en moyenne de 63% plus longue que celle d’une femme reconnue coupable de la même infraction 21. La peine de mort s’applique presque exclusivement aux hommes. Alors que les femmes représentent 10% des personnes reconnues coupables de meurtre au premier degré, elles ne représentent que 2% des personnes condamnées à mort et moins de 1% de celles qui ont effectivement été exécutées 22.

Conclusion

Bien que l’on ne puisse nier que la violence a tendance à affecter différemment les hommes et les femmes, l’idée que les femmes sont toujours les victimes et que les hommes toujours les agresseurs est manifestement fausse. Toutes les victimes méritent notre empathie, qu’elles soient de sexe masculin ou féminin et que le crime qu’elles ont subi soit typique de leur sexe ou typique de l’autre. Personne ne mérite d’être considéré comme violent ou menaçant simplement à cause de l’anatomie avec laquelle il est né.

Les taux de violence envers les hommes et les femmes sont beaucoup plus bas aujourd’hui qu’ils ne l’ont été historiquement. Nous devrions travailler à trouver des solutions efficaces pour poursuivre ce progrès, plutôt que faire de de tous les hommes les boucs émissaires de la violence qui subsiste. Rivaliser quant à savoir quel sexe est le pire est contre-productif et ne sert qu’à nous diviser inutilement. Nous devons être prêts à entendre la douleur des hommes comme celle des femmes, y compris les points de vue des personnes de toutes les orientations sexuelles et identités de genre, et chercher des solutions qui construisent un monde meilleur pour nous tous. Jusqu’à ce que le jour arrive où les hommes partout puisse lever la main et dire respectueusement #MeToo.

. Pour retrouver Gideon Scopes au sujet du sexisme et du syndrome d’Asperger :

[Féminisme lacrymal] – Quand Françoise Héritier divague (encore)

Références

[1] Wilhelm, Heather. Where #MeToo Goes Off the Rails [Internet]. New York: National Review; 2017 Oct 20 [cited 2017 Oct 20]. Available from: http://www.nationalreview.com/article/452922/metoo-train-wreck-calls-all-women-victims-all-men-toxic-abusers

[2] Baker-Jordan, Skylar. I’m a man who has been sexually harassed – but I don’t think it’s right for me to join in with #MeToo [Internet]. London: The Independent; 2017 Oct 18 [cited 2017 Oct 22]. Available from: http://www.independent.co.uk/voices/harvey-weinstein-metoo-sexual-assault-male-victims-oppression-patriarchy-a8006976.html

[3] Blake, Casey. Columnist: Nice guys, #MeToo is your problem to solve now [Internet]. Asheville (NC): Citizen-Times; 2017 Oct 17 [cited 2017 Oct 22]. Available from: http://www.citizen-times.com/story/opinion/2017/10/17/blake-nice-guys-metoo-your-problem-solve-women-me-too-socialmedia-asheville/771215001/

[4] Esposito, Brad. Men Are Sharing How They Will Change In Response To #MeToo [Internet]. New York: BuzzFeed; 2017 Oct 18 [cited 2017 Oct 22]. Available from: https://www.buzzfeed.com/bradesposito/how-i-will-change

[5] Falk, Örjan; Wallinius, Märta; Lundström, Sebastian; Frisell, Thomas; Anckarsäter, Henrik; Kerekes, Nóra. The 1% of the population accountable for 63% of all violent crime convictions. Social Psychiatry and Psychiatric Epidemiology [Internet]. 2013 Oct 31 [cited 2017 Oct 22]; 49(4): 559-571. Available from: https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3969807/

[6] Boutwell, Brian B.; Barnes, J.C.; Beaver, Kevin M. Life-Course Persistent Offenders and the Propensity to Commit Sexual Assault. Sexual Abuse: A Journal of Research and Treatment [Internet]. 2012 Jul [cited 2017 Oct 24]; 25(1): 69-81. Available from: https://www.researchgate.net/profile/Brian_Boutwell/publication/229075046_Life-Course_Persistent_Offenders_and_the_Propensity_to_Commit_Sexual_Assault/links/562bfbd808aef25a2441ce13.pdf

[7] Seto, Michael C.; Barbaree, Howard E. Psychopathy, Treatment Behavior, and Sex Offender Recidivism. Journal of Interpersonal Violence [Internet]. 1999 Dec 1 [cited 2017 Oct 24]; 14(12): 1235-1248. Available from: https://www.researchgate.net/profile/Michael_Seto/publication/238432306_Psychopathy_Treatment_Behavior_and_Sex_Offender_Recidivism/links/564b8c5508ae020ae9f82e3d/Psychopathy-Treatment-Behavior-and-Sex-Offender-Recidivism.pdf

[8] Pinker, Steven. The Better Angels of Our Nature: Why Violence Has Declined. New York: Viking; 2011. 802 p.

[9] Scope of the Problem: Statistics [Internet]. Washington (DC): RAINN; [cited 2017 Oct 24]. Available from: https://www.rainn.org/statistics/scope-problem

[10] Black, Michele C.; Basile, Kathleen C.; Breiding, Matthew J.; Smith, Sharon G.; Walters, Mikel L.; Merrick, Melissa T.; Chen, Jieru; Stevens, Mark R. The National Intimate Partner and Sexual Violence Survey: 2010 Summary Report [Internet]. Atlanta (GA): National Center for Injury Prevention and Control, Centers for Disease Control and Prevention; 2010 Nov [cited 2017 Oct 22]. Available from: https://www.cdc.gov/violenceprevention/pdf/NISVS_Report2010-a.pdf

[11] Catalano, Shannon; Smith, Erica; Snyder, Howard; Rand, Michael. Female Victims of Violence [Internet]. Washington (DC): Bureau of Justice Statistics; 2009 Oct 23 [cited 2017 Oct 24]. Available from: https://www.bjs.gov/content/pub/pdf/fvv.pdf

[12] National Intimate Partner and Sexual Violence Survey: 2010 Findings on Victimization by Sexual Orientation [Internet]. Atlanta (GA): National Center for Injury Prevention and Control, Centers for Disease Control and Prevention; [cited 2017 Oct 24]. Available from: https://www.cdc.gov/violenceprevention/pdf/nisvs_factsheet_lbg-a.pdf

[13] Stafford, Zach. LGBT people face discrimination over domestic violence claims, report finds [Internet]. New York: The Guardian; 2016 Oct 18 [cited 2017 Oct 24]. Available from: https://www.theguardian.com/world/2016/oct/18/lgbt-hiv-affected-people-domestic-violence-study

[14] Reaction To Women Abusing Men In Public [Internet]. ABC News. New York (NY): ABC; [cited 2017 Oct 22]. Available from: https://www.youtube.com/watch?v=CRCS6GGhIRc

[15] Swift, Taylor. Blank Space [Internet]. [place unknown]: 2014 Nov 10 [cited 2017 Oct 22]. Available from: https://www.youtube.com/watch?v=e-ORhEE9VVg

[16] The Red Pill. United States: Jaye Bird Productions; 2016.

[17] Douglas, Emily M.; Hines, Denise A. The Helpseeking Experiences of Men Who Sustain Intimate Partner Violence: An Overlooked Population and Implications for Practice. Journal of Family Violence [Internet]. 2011 Jun 04 [cited 2017 Oct 22]; 26(6): 473-85. Available from: http://wordpress.clarku.edu/dhines/files/2012/01/Douglas-Hines-2011-helpseeking-experiences-of-male-victims.pdf

[18] Truman, Jennifer L.; Langton, Lynn. Criminal Victimization, 2014 [Internet]. Washington (DC): Bureau of Justice Statistics.; 2015 Sep 29 [cited 2017 Oct 22]. Available from: https://www.bjs.gov/content/pub/pdf/cv14.pdf

[19] Murder Victims by Race, Ethnicity, and Sex, 2015 [Internet]. Washington (DC): Federal Bureau of Investigation; [cited 2017 Oct 22]. Available from: https://ucr.fbi.gov/crime-in-the-u.s/2015/crime-in-the-u.s.-2015/tables/expanded_homicide_data_table_1_murder_victims_by_race_ethnicity_and_sex_2015.xls

[20] The National Registry of Exonerations [Internet]. Ann Arbor (MI): University of Michigan; [cited 2017 Oct 22]. Available from: https://www.law.umich.edu/special/exoneration/Pages/detaillist.aspx

[21] Prof. Starr’s Research Shows Large Unexplained Gender Disparities In Federal Criminal Cases [Internet]. Ann Arbor (MI): University of Michigan; 2012 Nov 16 [cited 2017 Oct 22]. Available from: http://www.law.umich.edu/newsandinfo/features/Pages/starr_gender_disparities.aspx

[22] Women and the Death Penalty [Internet]. Washington (DC): Death Penalty Information Center; [cited 2017 Oct 22]. Available from: https://deathpenaltyinfo.org/women-and-death-penalty

 

. Sur le même sujet :

[Féminisme lacrymal] – Quand Françoise Héritier divague (encore)

Strauch-Bonart – Fin du patriarcat : Les hommes font l’expérience d’une forme de déclin

. Laetitia Strauch-Bonart : Fin du patriarcat 5 | 5 « Les hommes font l’expérience d’une forme de déclin » 

De nombreuses recherches scientifiques démontrent qu’un nouveau fossé se creuse entre les sexes au détriment des hommes, remarque l’essayiste Laetitia StrauchBonart

Article paru dans Le Monde du 19 juillet 2018

Entretien. Laetitia Strauch-Bonart est essayiste, chroniqueuse au Point et rédactrice en chef de la revue Phébé . Elle est notamment l’auteur de Les hommes sont-ils obsolètes ?, (Fayard, 220 p., 18 euros), et de Vous avez dit ­conservateur ?, (Cerf, 2016)

Propos recueillis par Marc-Olivier Bherer

Vous affirmez dans votre livre « Les hommes sont-ils obsolètes ?» ­que la condition masculine vit en ce moment une « transformation radicale » dans le monde occidental. Qu’entendez-vous par là?

Les anglophones ont une expression qui dit bien les choses, ils parlent d’un new gender gap, un nouveau fossé entre les sexes qui se creuse à l’école, au travail, dans la vie de famille, etc. Cet écart est défavorable aux hommes. Son existence est ­démontrée par de multiples rapports et études issus de l’économie et de la sociologie quantitative. Il y a quelques décennies, nous n’aurions jamais imaginé un tel ­retournement. Les femmes ne faisaient pas d’études, elles travaillaient peu ou pas, et leur autorité était limitée à la maison. Aujourd’hui, tout cela nous semble appartenir à un passé lointain. La position des hommes a également changé. On garde cette image de la prééminence masculine mais, quand on y regarde de plus près, on s’aperçoit que les hommes font l’expérience d’une forme de déclin. Et, parallèlement, on voit une ascension féminine.

Les adeptes du masculinisme diront sans doute que le relatif déclin masculin est de la faute des femmes. C’est absurde. Il est important de comprendre que l’ascension féminine n’est pas la cause du déclin masculin. C’est plutôt que les mêmes changements structurels, économiques, technologiques, sociétaux, etc., ont un impact différent sur les deux sexes. Pourquoi? En partie parce qu’il existe des différences, comportementales et cognitives, entre les hommes et les femmes par exemple dans la maîtrise du langage, l’empathie ou le ­niveau d’agressivité. Si, hier, ces différences, dans un monde plus physique et moins verbal, favorisaient les hommes, aujourd’hui, elles favorisent les femmes. Ces différences sont établies par la psychologie comportementale et les sciences ­cognitives, donc des travaux sérieux.

Beaucoup de sociologues français ­estiment que les différences entre les sexes sont construites par l’environnement. Je me démarque de cette approche, car elle n’est pas expérimentale. Les ­travaux auxquels je me réfère que de grands scientifiques tels Steven Pinker, ­professeur de psychologie à Harvard, et Franck Ramus, chercheur au sein du Laboratoire de sciences cognitives et psycholinguistique, CNRS-ENS, ont aidé à diffuser, et qui sont publiés dans les meilleures revues internationales mettent au jour une origine partiellement naturelle de ces différences et s’appuient, eux, sur des expériences.

Par exemple, certaines d’entre elles ­consistent à tester auprès de nourrissons et d’enfants leur préférence pour les « choses », s’avérant en moyenne plus fréquente chez les garçons, et pour les « personnes », plus fréquente chez les filles. D’autres établissent un lien entre le niveau de testostérone, bien plus élevé chez les hommes, et l’agressivité. Tous ces travaux permettent d’établir des comportements moyens pour chaque sexe, mais il faut garder à l’esprit que, justement, ce ne sont que des moyennes et qu’il y a, forcément, toujours des exceptions.

Notez, enfin, que mes observations sur les hommes ne visent pas à relativiser l’exclusion et la violence que subissent un grand nombre de femmes en Occident sans ­parler d’autres régions du monde. Je les condamne fermement. Je crains toutefois que l’on ne soit pas suffisamment attentif à la situation des hommes.

L’école est, pour vous, l’un des ­lieux de ce malaise masculin. Pouvez-vous nous dire pourquoi?

Quand les filles n’allaient pas à l’école, on ignorait qu’elles étaient aussi douées. En quelques décennies, elles sont parvenues à dépasser les garçons. Les études du ­Programme international pour le suivi des acquis des élèves [PISA], conduites par l’Organisation de coopération et de développement économiques [OCDE] auprès des élèves de 15 ans, le démontrent. Par exemple, selon PISA 2012, les adolescents de l’OCDE ont en moyenne 50 % de chance de plus que les adolescentes d’avoir des difficultés à l’école dans tous les domaines testés (sciences, mathématiques, compréhension de l’écrit). Ou encore, en 2015, 24,4 % des garçons se situent parmi les moins bons en compréhension de l’écrit ceux qui ont des difficultés à bien comprendre un texte contre 15,5 % des filles. Le retard en compréhension de l’écrit se constate dans tous les pays industrialisés, membres de l’OCDE. En moyenne, à l’écrit, il est presque égal à une année scolaire.

Les études conduites par la direction de l’évaluation de la performance et de la prospective du ministère de l’éducation nationale, réitérées chaque année [Filles et garçons sur le chemin de l’égalité, de l’école à l’enseignement supérieur] montrent la même tendance. Pour ce qui est de la maîtrise du langage, on constate ce ­décalage entre les deux sexes dès le ­primaire, ce qui est très important, car c’est ce qui détermine la réussite scolaire à long terme.

L’école est-elle inadaptée aux garçons?

Dans une certaine mesure, oui. On dit trop souvent, en France, que si les garçons ne se débrouillent pas bien à l’école, c’est parce qu’ils sont trop agités, ou parce qu’ils ont intériorisé des stéréotypes de masculinité et qu’ils préfèrent ne pas travailler en classe par crainte de ressembler aux filles. Comme l’école est bien adaptée aux filles, il faudrait faire en sorte que les garçons ressemblent aux filles.

Il faut aborder la question autrement. A l’étranger, des travaux de recherche arrivent à d’autres conclusions : c’est l’école qui se serait éloignée des garçons et non l’inverse. Ne faudrait-il pas prendre en compte le retard relatif des garçons dans la maîtrise du langage, et donc redoubler d’efforts en la matière? Ne faudrait-il pas faire bouger davantage les garçons pour qu’ils acceptent plus facilement de rester assis pendant des heures à tracer des lettres? En outre, donne-t-on à lire des livres mettant en scène des personnages auxquels les garçons peuvent s’identifier?

On doit aussi insister sur l’importance de la discipline. Les garçons, particulièrement dans les milieux défavorisés, sont les premiers à en souffrir lorsqu’elle se dégrade. Il faut donc la renforcer, dans une atmosphère d’autorité bienveillante.

Certes, les garçons ont de moins ­bonnes notes, mais cela n’est pas ­nouveau et n’empêche pas les hommes d’occuper les meilleures places ­dans la société…

Les hommes continuent en effet de se maintenir à une place enviable, mais il faudra voir comment les choses évolueront. Je dirais aussi que la réussite, à l’âge adulte, de nos garçons ne nous autorise pas à ne rien faire pour nos enfants.

Il faut être attentif au fait que ce sont les garçons issus des classes populaires qui ont le plus de mal à l’école, et qu’eux n’occuperont pas demain les meilleures places. Ils s’en sortiront même moins bien que les filles des mêmes milieux. On a tendance à juger de la santé des sexes en ne regardant que les gens qui sont tout en haut. Je ne crois pas que ce soit un bon indicateur, puisqu’il s’agit d’une minorité.

Vous dites que l’évolution de ­l’économie fait mal aux hommes. ­Pouvez-vous préciser?

L’économie se tertiarise et repose de plus en plus sur des capacités relationnelles. L’étude des différences de comportement entre les sexes que j’évoquais tout à l’heure montre qu’en moyenne les femmes maîtrisent mieux le langage et font preuve d’une plus grande empathie : elles sont plus à l’aise que les hommes dans les métiers relationnels. Mieux : elles les préfèrent aux autres métiers. Pour lutter contre les conséquences de cette transformation sur les hommes, il faudrait déjà en prendre conscience. Notez cependant que la tertiarisation n’empêche pas que plusieurs secteurs restent très masculins, comme les métiers techniques et scientifiques.

La place du père est-elle aussi fragilisée?

Les pères passent en moyenne plus de temps avec leurs enfants qu’auparavant. Ils jouent avec eux, participent à leur éducation. Mais on constate une divergence en fonction du milieu socio-professionnel. La présence accrue des pères ne vaut que pour les classes moyennes et supérieures.

En outre, dans ces milieux, on se marie toujours, ce qui est moins vrai dans les milieux défavorisés, alors que cela permet de stabiliser la famille. Le mariage diminue le risque de séparation et, si le couple se défait, le fait qu’il y ait eu mariage aide à ce que les liens entre le père et les enfants restent plus étroits. Il y a plus de familles monoparentales dans les milieux défavorisés, et les enfants qui ne voient jamais leur père ont plus de chances de se trouver dans ces milieux. Les hommes peuvent donc y être pris d’un sentiment d’inutilité qui peut être aggravé s’ils n’ont pas de travail.

Certains estiment que père et mère ont le même rôle, que les divorces ne sont pas si graves. Je ne suis pas d’accord : la stabilité et la présence du père prédisent un certain nombre de choses concernant l’avenir des enfants la réussite scolaire, la santé mentale, la capacité à fonder une famille. Les dommages de l’absence du père sont importants. On s’inquiète des fractures au sein de la société, des tensions révélées par des événements comme l’élection de Donald Trump ou le Brexit. Mais n’oublions pas que la vie de famille est aussi un des éléments qui distinguent aujourd’hui de plus en plus les classes sociales et qui collaborent à creuser un fossé entre elles. En promouvant le mariage, j’ai l’air ringarde, mais je pense que le mariage est l’équivalent d’un actif! Les familles de couples mariés sont plus fortes pour affronter l’adversité. Des études de l’Insee (par exemple, « Les couples sur le marché du travail », France, Portrait Social, Insee, 2012), mais aussi les travaux de l’économiste américain Nicholas Eberstadt (par exemple le livre Men Without Work) montrent que, pour les hommes, il y a une corrélation entre le statut marital et l’emploi.

Est-on en train de vivre, selon vous, la fin du patriarcat?

Si vous entendez par patriarcat le fait qu’il existe en Occident une oppression systématique des femmes par les hommes, et que les hommes sont responsables de tous les malheurs des femmes, j’estime que ce n’est le cas ni aujourd’hui ni hier. Hier, la situation des femmes était très dure parce que nos ancêtres hommes et femmes vivaient dans des situations de grande insécurité, aggravées pour les femmes par le fait qu’elles n’avaient pas la force physique des hommes et couraient les risques liés à la maternité qu’on pense seulement à celui de mourir en couches. Mais les hommes n’étaient pas les premiers responsables de ce malheur. Les femmes ont été délivrées par le progrès technique. Si vous entendez par patriarcat le fait que le pouvoir était, encore récemment, exclusivement aux mains des hommes, car les femmes en étaient systématiquement exclues dans la loi et la pratique, alors oui, nous en vivons la fin. Et je m’en réjouis!

***

. Sur la situation des garçons à l’école, on pourra aussi se reporter à cette conférence sous-titrée de la philosophe américaine Christina Hoff Sommers qui alertait sur cette question il y a plus de 5 ans déjà :

. Sur la baudruche idéologique du « patriarcat », voir aussi : 

Le mythe du « patriarcat »

[Mensonge féministe] – Écart salarial / Gender Pay Gap : C’est un fake féministe !

Écart salarial / Gender Pay Gap : C’est un fake féministe !

Et ce n’est pas bien de mentir !

Voici quelques sources pour démonter cet énorme fake féministe : Non, l’écart salarial H/F n’a jamais été de 27% (chiffre farfelu fabriqué par les officines féministes – des femistats comme disent les américains), ni même de 9 %. Il est en réalité dérisoire, voire inexistant à l’échelle de la société car il ne concerne qu’une poignée de très hauts salaires.

  • Décembre 2019 : Le Raptor se penche sur le sujet et démonte implacablement les chiffres farfelus des officines féministo-gouvernementales. Oubliez les soi-disant 25,7% de différences salariales H/F : la réalité se situe à moins de 3% ! 2,7 % exactement en 2017 en France, selon les études très sérieuses du cabinet Korn Ferry, reprises par The Economist (« Are women paid less than men for the same work? », 01/08/17). Et encore, même ces 2,7% peuvent être réduits à 0% quand on considère certains paramètres non quantifiables comme la personnalité, la capacité à négocier, les efforts personnels, les choix de vie… Le service CkeckNews de Libération en est carrément réduit à manger son chapeau (30/12/19), obligé de reconnaître qu’il n’y a en réalité aucune différence de salaire repérable quand on compare des choses comparables ! Alors, quand cessera enfin cette mascarade ?

Égalité hommes-femmes : pour tordre le cou à quelques idées reçues – Par Laetitia Strauch-Bonart

Des féministes s’insurgent contre les inégalités de salaires entre hommes et femmes. Problème, cette inégalité est désormais un mythe. Démonstration.

On a beaucoup parlé des « fake news », s’effrayant de la dérive mensongère des hommes politiques, voire des médias. On n’hésite pas, en revanche, à faire circuler des contre-vérités notoires sans sourciller. La dernière en date est celle diffusée par un groupe féministe, Les Glorieuses, qui prétend qu’« à travail égal, pas de salaire égal » entre les hommes et les femmes. Les Glorieuses cite Eurostat, selon lequel, en France en 2015, les femmes auraient gagné 15,8 % de moins que les hommes. Tous temps de travail confondus – temps partiels et temps complets rassemblés -, ajoutent-elles, les femmes gagneraient 25,7 % de moins que les hommes.

Ces deux chiffres ont abondamment circulé dans les médias, en particulier le second. Nombre de commentateurs laissent donc entendre que lorsqu’on sélectionne au hasard un homme et une femme exerçant exactement le même métier dans une entreprise, l’un gagne 25,7 % de plus que l’autre. Ce qui est faux.

Un écart qui se réduit

La première raison est que si l’on prend en compte les différences de temps de travail, le secteur d’activité, le niveau hiérarchique, d’ancienneté et de diplôme, la part « non expliquée » des écarts de salaires entre les femmes et les hommes est de 10,5 %. Mieux, personne ne peut dire avec exactitude à quoi se rapporte cet écart : certains l’analysent comme le résultat de la discrimination des femmes; d’autres comme la propension de celles-ci à moins négocier leurs salaires et augmentations – ce que même Les Glorieuses reconnaît. Aucune étude n’a prouvé jusqu’à ce jour l’existence de discriminations. Pour ce faire, il faudrait emmagasiner les données de centaines d’entreprises et comparer, poste par poste, les salaires des uns et des autres.

Il faut ajouter à cela que l’écart de rémunération entre hommes et femmes se réduit comme une peau de chagrin pour les jeunes générations et les jeunes cadres. Enfin, comme l’a suggéré The Economist, rapportant une étude récente, il existe bien un écart important dans le haut du panier, chez les dirigeants – les salaires à plus de 6 chiffres. Ici, en effet, la négociation et les relations de pouvoir ont une importance considérable, ce dont, visiblement, les hommes savent mieux tirer parti. Mais les femmes dirigeantes, en devenant de plus en plus nombreuses, apprendront sans doute, avec le temps, à prendre leur place dans ces sphères masculines. Conclusion : oui, les femmes, dans le passé, ont été honteusement discriminées au travail; non, aujourd’hui, pour la plupart des métiers et en moyenne – car il y a toujours des exceptions malheureuses -, ce n’est plus le cas. À travail égal, aujourd’hui, hommes et femmes reçoivent un salaire égal.

Des choix différents

La seconde raison qui permet de contester l’interprétation de l’étude des Glorieuses est que, justement, hommes et femmes, le plus souvent, n’occupent pas les mêmes fonctions. Les femmes travaillent plus volontiers à temps partiel, et préfèrent des métiers qui sont compatibles avec la vie de famille. Certes, c’est parfois sous la contrainte, ce qui dans ce cas est évidemment regrettable, mais ce mode de vie est plus souvent choisi que subi : plus des deux tiers des femmes qui travaillent à temps partiel en sont satisfaites.

Ensuite, les femmes sont attirées par des secteurs et des fonctions différents des hommes : elles préfèrent les matières littéraires aux matières scientifiques et elles préfèrent les métiers relationnels, par exemple dans les services et le médico-social. Par ailleurs, elles n’ont peut-être pas envie de monter les échelons d’une entreprise comme les hommes et selon les règles qu’ils imposent, qui impliquent souvent de longues heures de travail et une compétition exacerbée. Certaines femmes choisissent malgré tout de prendre leur place dans ces milieux; d’autres choisissent de mener une carrière différente en fondant leur entreprise ou en travaillant à leur compte, car elles y trouvent plus de sens.

Stéréotypes et libre arbitre

Les analyses les plus souvent citées attribuent ces choix à des « stéréotypes » sociaux de genre. Cette interprétation est douteuse.

Premièrement, elle l’est d’un point de vue scientifique : les études citées à l’appui de cette thèse ne sont pas suffisamment rigoureuses. Or, il existe tout un arsenal d’études quantitatives en psychologie qui, très souvent répliquées, montrent la persistance de ces choix « féminins ». Il semble assez difficile d’y voir la preuve de stéréotypes, tant ces résultats sont récurrents, et tant ces choix sont indissociables de l’existence d’intérêts différents chez les hommes et les femmes que l’on peut mettre au jour dès l’enfance, à un âge où la socialisation des enfants n’a pas commencé. Par exemple, on a montré que les garçons étaient plus attirés par les « objets », et les filles par les « personnes ». Les mêmes études précisent bien qu’hommes et femmes ne diffèrent en rien en termes de capacités intellectuelles, mais d’intérêts – et c’est cela qui est important. Les choix humains, par conséquent, ne résultent pas de l’incorporation brutale de stéréotypes, mais d’une intrication complexe d’éléments naturels et culturels.

Deuxièmement, cette interprétation est douteuse, car elle nie que les femmes puissent faire preuve de libre arbitre et choisir des métiers qui leur conviennent, comme si, étant perpétuellement vulnérables et mineures, leur choix était toujours biaisé. Elle prend pour pierre de touche de la réussite la carrière typiquement masculine. Mais comment peut-on prétendre prendre la cause des femmes et douter de leur libre arbitre ?

Des féministes amnésiques

Nous ne vivons plus dans cette époque malheureuse où les femmes ne recevaient pas d’instruction et n’avaient aucune liberté professionnelle. Depuis quelques décennies, tout a changé. Mais s’attendre à ce que les hommes et les femmes fassent des choix absolument identiques est pour le moins étrange – à moins de penser que nous ne sommes que des pages blanches.

Le plus regrettable, dans tout cela, est que le mouvement féministe piétine les avancées de ses prédécesseurs : en prétendant que rien n’a changé, ces militantes font comme si les combats passés pour l’égalité n’avaient servi à rien – or, c’est tout le contraire. Ce faisant, elles justifient habilement leur utilité présente, mais elles ne servent pas la cause des femmes.

Le Point.fr, no. 201711
Lundi 6 novembre 2017

***

. On pourra également se reporter à ces articles :

Non, les femmes ne gagnent pas moins que les hommes !

Écart de salaire entre hommes et femmes : attention aux études fantaisistes

Il n’y a pas d’écart salarial hommes/femmes

. Ainsi que :

[à suivre…]

L’Éternel masculin

La vidéo confronte l’éternel masculin de la beauté grecque antique (la danse des hommes nus de la pièce de théâtre Mount Olympus de Jan Fabre (2015) est une véritable ode au corps masculin érotique) avec le Japon moderne privé de sexe.

Ce qui me frappe le plus dans ces témoignages d’hommes japonais vivant avec une poupée sexuelle qui ont inspiré la vidéo, c’est le glissement de l’objet à la personne.  Ces hommes – qui ne semblent plus faire clairement la différence entre un objet inanimé et un être humain – investissent affectivement leur poupée, lui parlent, la mettent en scène, l’emmènent en vacances voire même l’épousent ou s’auto-persuadent qu’elle est vivante. Pour autant, ils sont sains d’esprit et restent lucides quant à leur comportement.

La situation du Japon – même si la vie de couple avec une poupée y reste un phénomène marginal – est en tout cas révélatrice de la crise mondiale de la masculinité et du désir masculin. Le manque  de partenaires, de moyens financiers pour entretenir une femme ou la culpabilité d’aller voir des prostituées, entre autres, annoncent certainement ce qui nous attend en Occident. Cette crise de la masculinité est aussi une conséquence du féminisme (des femmes hyper-exigeantes qui paralysent et accablent les hommes) et un avatar post-moderne de la guerre des sexes.  Sinon qu’ici, le combat n’a même plus lieu, la femme étant totalement remplacée.

. Sex Games 

La thématique de la poupée sexuelle utilisée pour illustrer Cellophane City est inspirée d’une chanson plus tardive, Sex Games (2009), restée à l’état de maquette.

Musique : Jean-Patrick Capdevielle /Jonathan Capdevielle / Patrice Küng
Paroles : Jean-Patrick Capdevielle

Voici ma propre transcription des paroles (à corriger éventuellement et compléter) :

Come follow me… Baby…
Come follow me…
Aahh… Boy…
Sex games
Well I went to the marketplace to buy a new toy
A man said he could sell me a bundle of joy
(the) question is: he mumbled looking me in the eyes
“You think you can afford to go straight to the sky”
Sex games
Sex games
“I’ve been high as a kite” I said, “since Jesus knows when
some people call it coma, well I could call it heaven”
… ? … home and out of the box
I was ready for so much and hungry as a fox
Sex games
My highway to love
Sex games
Beside from the above
Sex games
My highway to love
Sex games
Sex games
Sex games

Come follow me… Baby…
Aahh… Boy…
I found enough on my plastidic friend
It’s heaven touched with delight
Soon she showed me all the bends
One-way trip to the sky

Sex games…
Sex games…
Boy…

She had all the required gismos
She was extra-gynecally supercharged
She had the double-action tits above
With the heat-warning net program

Boy
Sex games
My highway to love
Sex games

Beside from the above
Sex games
My highway to love
Sex games
Sex games

Come follow me baby
Come follow me…

. L’iconographie de cette seconde vidéo s’est imposée d’elle-même à la vue du Casanova de Fellini (1976) – le sujet étant pour ainsi dire le même.

La figure du Casanova vieillissant imaginée par Fellini n’est d’ailleurs pas sans rappeler celle de Dracula (incarné par Bela Lugosi en 1939), dans ma vidéo de la Naissance des Saisons) ou celle de Nosferatu se regardant lui aussi dans le miroir au moment de ses ébats dans un palais vénitien du XVIIIe siècle (Nosferatu à Venise) :

. Les femmes ne sont pas des poupées sexuelles. Mais les poupées sexuelles sont-elles des femmes ?

Les poupées sexuelles ne sont évidemment pas des femmes ; ce sont des objets inanimés. Mais dans la cervelle embrumée de certaines féministes, s’opère une confusion pire encore que chez les japonais qui épousent leur poupée : aveuglées par leur chasse à l’homme et à l’hétérosexualité, elles en viennent à attaquer des maisons de poupées. Sans doute pour délivrer ces dernières de l’enfer de la prostitution.  Allo, l’Hôpital Sainte-Anne ? Je crois que j’ai des bonnes clientes pour vous…

« Les Marquises Dolls » : la première maison close de poupées au Mans taguée par un commando féministe (mars 2019)

« Les Marquises Dolls » : la première maison close de poupées au Mans taguée par un commando féministe (mars 2019)

. Sur ce thème :

Le féminisme castrateur et les poupées sexuelles

Le Vaisseau fantôme ou le Hollandais volant

Le bateau passeur d’âmes (et de corps) est un thème universel : barques funéraires égyptiennes, Charon faisant traverser le Styx chez les grecs, l’Île des Morts du symboliste Arnold Böcklin…

Arnold Böcklin, L’Île des Morts (version de Berlin), 1880 [cliquer pour agrandir]
Le mythe réactualisé du vaisseau fantôme ou du « Hollandais volant » : c’est ce que m’a inspiré Fear God (2018), tableau où l’on voit appareiller (ou accoster ?) un cargo porte-containers au-dessus duquel plane un spectre.

Jean-Patrick Capdevielle, Fear God (188 x 230 cm, acrylique, bitume et fluo paint sur papier wenzhou sur toile), 2018 [cliquer pour agrandir]
La chanson « Fantôme de fortune » (album Vertigo, 1992) s’est alors imposée comme une évidence ; son « manteau d’étoiles » devenant le ciel du tableau dont les ondulations se confondent avec des vagues marines.

Ces vagues célestes de Fear God ne sont d’ailleurs pas sans évoquer celles de la Nuit étoilée que Vincent Van Gogh (un autre coloriste expressionniste et mystique) avait peinte depuis sa fenêtre de l’asile à Saint-Rémy-de-Provence. Ici aussi, le manteau d’étoiles a des airs marins.

Vincent Van Gogh, La Nuit étoilée (1889), New York (MoMA) [cliquer pour agrandir]
La légende du « hollandais volant », capitaine errant dans un brick fantôme autour du cap de Bonne-Espérance, remonte au XVIIe siècle. Elle a par la suite inspiré l’opéra de Richard Wagner, Le Vaisseau fantôme (1843), qui raconte l’histoire d’un capitaine fantomatique voué à naviguer sans fin sur les mers du monde afin de racheter l’amour d’une femme. On y retrouve les thèmes éternels de l’errance et de la rédemption par l’amour.

C’est aussi la rédemption par l’amour que trouvera le capitaine hollandais dans le film Pandora and the Flying Dutchman (1951). Condamné à errer sur les mers du globe jusqu’au Jugement dernier dans un yacht à l’équipage fantôme, sa malédiction ne sera levée que le jour où une femme donnera sa vie pour lui.  Ava Gardner joue Pandora, femme fatale qui succombe aux charmes du hollandais et qui n’est autre que son épouse qu’il avait assassinée au XVIIe siècle, la croyant infidèle. En attendant son retour, le capitaine,  devenu peintre, la peignait en Pandore.

Pandore et sa boîte, peinte par le hollandais volant dans Pandora and the Flying Dutchman (1951)

Il est enfin un personnage qui porte lui aussi un manteau d’étoiles…  et que le navigateur rencontrera peut-être à la fin de son périple…

[N. B. : Il va de soi que cette interprétation de Fear God est purement personnelle et subjective. Chacun est invité à y voir et ressentir ce qu’il désire 😉 ]

 

. Pour découvrir tout l’oeuvre peint de J.-P. C. :

[Peinture] – Jean-Patrick Capdevielle. L’œuvre peint

 

Germaine Greer demande à ce que la peine pour viol soit réduite

La féministe universitaire a dit au festival de Hay que « la plupart des viols sont simplement paresseux, négligents et insensibles »

Germaine Greed

Germaine Greer a appelé à un abaissement de la punition pour le viol et déclaré que la société ne devrait pas y voir un « crime spectaculairement violent », mais plutôt le considérer comme « paresseux, négligent et insensible ».

Elle a suggéré qu’une peine appropriée pour l’infraction pourrait être 200 heures de service d’intérêt général et peut-être un tatouage « r » (pour « rapist (violeur) ») sur la main, le bras ou la joue du violeur.

Prenant la parole au festival littéraire de Hay, l’universitaire féministe a soutenu que le viol était endémique dans la société et que le système juridique ne pouvait y faire face parce qu’il revenait toujours à la question du consentement, les victimes ne devenant rien de plus que des « bouts de preuves ».

Elle a dit que le système ne fonctionnait pas et qu’un changement radical était nécessaire. « Je veux renverser le discours sur le viol. Nous n’aboutissons à rien dans le tunnel de l’histoire », a-t-elle dit.

« La plupart des viols ne comportent aucune blessure », a déclaré Greer. « On nous dit que c’est un crime sexuellement violent, un expert comme Quentin Tarantino nous dira que lorsque vous utilisez le mot « viol », vous êtes en train de parler de violence, de forçage… c’est un des crimes les plus violents dans le monde. Bullshit, Tarantino ! ».

« La plupart des viols sont juste paresseux, négligents, insensibles. Chaque fois qu’un homme roule sur sa femme épuisée et insiste pour jouir de ses droits conjugaux, il la viole. Cela ne finira jamais devant un tribunal ».

Au lieu de penser que le viol est un crime spectaculairement violent, et certains viols le sont, voyez-le comme non consensuel… C’est du mauvais sexe (« bad sex« ). Du sexe où il n’y a pas de communication, pas de tendresse, pas de marques d’amour. »

Les procès pour viol s’écroulent et ne se terminent pas par des condamnations, comme le plaident les avocats, sur la question du consentement, a-t-elle dit. Pourquoi ne pas croire la femme et abaisser la peine ? « Si nous disons faites-nous confiance, croyez-nous, si nous disons que notre accusation devrait être considérée comme une preuve, alors nous devons réduire le tarif pour le viol. »

Greer a reconnu que sa thèse serait controversée. « Ce sont des moments comme ça, je peux entendre les féministes me hurler dessus, ‘vous êtes en train de banaliser le viol !’ »

« Eh bien, je vais vous dire quoi … Vous pouvez vouloir croire que le pénis est une arme mortelle et que toutes les femmes vivent dans la peur de cette arme mortelle, eh bien ce sont des conneries. Ce n’est pas vrai. Nous ne vivons pas dans la terreur du pénis… Un homme ne peut pas vous tuer avec son pénis. »

Elle a dit que, dans les cas de viols manifestement violents, les tribunaux devraient se concentrer sur la violence, qui devrait attirer des peines plus lourdes, plutôt que d’avoir de longs procès dans lesquels les femmes sont humiliées pendant de longues périodes.

Greer va publier son argumentation complète sur le viol dans un nouveau livre qui sortira en Australie en septembre.

Elle a dit que certains pourraient voir son attitude envers le viol comme désinvolte, mais elle a rappelé au public silencieux de Hay sa propre expérience quand elle avait 18 ans et a été violée. Elle a été battue à plusieurs reprises par un homme qui lui a demandé une douzaine de fois : « Dis : ‘baise-moi’ ». L’a-t-elle dit ? « Je ne pense pas que je l’ai fait, mais peut-être que je l’ai fait. Cela ressemblerait à quoi, sur mon téléphone portable, de dire au tribunal « baise-moi » ? Greer n’a pas porté plainte à la police.

Elle a remis en question une statistique selon laquelle 70% des victimes de viol auraient souffert de stress post-traumatique contre 20% des vétérans de guerre.

« Que diable racontez-vous ? Quelque chose qui ne laisse aucun signe, aucune blessure, rien du tout, serait plus dommageable pour une femme que de voir son meilleur ami explosé par un engin explosif, comme peut l’être un vétéran ? »

La société voudrait que les femmes croient que le viol les a détruites, a-t-elle dit. « Nous n’avons pas été détruites, nous avons été sacrément ennuyées, voilà ce que nous avons été. »

Greer a longtemps divisé l’opinion, depuis qu’elle a publié son ouvrage phare, The Female Eunuch, en 1970, et son discours à Hay ne montre aucun signe de changement.

Elle a dit que le monde était rempli de bad sex, que les gens ne se parlaient pas et ne s’aimaient comme ils le devraient. « Faire l’amour n’est pas une affaire d’organe, c’est une affaire de communication et, d’une manière ou d’une autre, nous devons le sauver. L’hétérosexualité est dans une crise profonde. »

C’est davantage une crise pour les femmes, a-t-elle ajouté. « Les femmes aiment les hommes, plus qu’ils [les hommes] ne les aiment. Nous sommes plus conscientes de nos hommes, plus qu’ils ne sont conscients de nous. Nous sommes plus facilement contraintes de les satisfaire ou d’essayer de leur plaire. Nous avons tendance à aimer nos fils plus que nos filles, nous espérons que cela ne se voit pas, mais c’est presque toujours le cas. »

Greer est pessimiste quant à l’affaire Harvey Weinstein, prédisant que les seuls gagnants seront les avocats. « Ils vont démolir les témoignages ».

[Traduction de l’article du Guardian :  Germaine Greer calls for punishment for rape to be reduced, 30 mai 2018]

Mon avis :

La pensée de G. Greer est rapportée de manière parfois confuse ou incomplète, dans l’intention probable de la caricaturer ou la charger.
Je suis d’accord avec elle quand elle propose de ne pas confondre le bad sex avec les violences graves ou quand elle dit qu’un pénis ne tue pas et ne peut être comparé à une mine anti-personnel. 
Qu’il faut donc repenser les peines afin que la plupart des procès pour viol ne s’écroulent pas comme ils le font actuellement.
Elle parle aussi de sauver l’amour et l’hétérosexualité, en crise.
Beaucoup de thèmes qui gagneront donc à être présentés de manière plus approfondie dans son prochain livre.

Et pour aller plus loin…  

Mon propre témoignage sur le sujet :

Le Verrou de Fragonard ou l’équilibre asymétrique des désirs

Les inégalités en défaveur des hommes passent à la trappe !

Texte intégral de l’interview de Laetita Strauch-Bonart par Eugénie Bastié parie (parue dans Figaro Vox du 26 mai 2018)

GRAND ENTRETIEN – On évoque sans arrêt les inégalités entre hommes et femmes en défaveur de ces dernières. Et si l’inverse était aussi vrai ? C’est ce que démontre magistralement l’essayiste dans son nouveau livre Les hommes sont-ils obsolètes ? .

Dans son nouveau livre Les hommes sont-ils obsolètes? (Fayard), Laetitia StrauchBonart s’appuie sur de nombreuses études scientifiques, où elle prouve le déclin irréfutable de la condition masculine à l’école, dans la famille et sur le marché du travail. Les hommes ont perdu le contrôle de la procréation, sont en retard dans les salles de classe, et la force physique qui était leur apanage n’a plus d’utilité sociale. À mille lieues des discours idéologiques convenus sur une discrimination systémique à l’égard des femmes, elle montre que l’asymétrie entre les sexes n’est pas le fruit d’un constructivisme social mais s’enracine dans des différences biologiques. Elle fournit un plaidoyer précis et stimulant contre la guerre des sexes et le féminisme victimaire.

Eugénie Bastié – LE FIGARO.- Alors que l’on évoque quotidiennement la lutte pour les droits des femmes, vous avez choisi de parler dans votre livre de l’obsolescence des hommes. Qu’est-ce qui vous fait croire que la condition masculine serait menacée?

Laetitia STRAUCHBONART. – À cela, il y a d’abord une raison structurelle: l’évolution des conditions du pouvoir des hommes. À ce sujet, les réflexions contemporaines sont souvent trop court-termistes. Elles oublient que dans un monde où la force physique et le contrôle de la procréation, qui étaient la source du pouvoir des hommes, ont bien moins d’importance que par le passé, la place des hommes est en train de changer radicalement.

La force physique d’abord: elle est moins importante sur le marché du travail. La violence ensuite: je m’appuie sur les travaux du chercheur Steven Pinker, qui a montré, dans La Part d’ange en nous, quel’usage de la violence a considérablement régressé depuis des siècles, ce qui est contre-intuitif.

Ensuite, les femmes ont pris le contrôle de la famille. Elles détiennent aujourd’hui entièrement celui de la procréation. En cas de séparation, ce sont elles qui obtiennent la garde quasi systématiquement.

L’école ensuite: c’est flagrant. Je me suis plongée dans les études Pisa. En France, le retard des garçons de 15 ans sur les filles est de trois quarts d’année scolaire en moyenne en «compréhension de l’écrit». En bout de classe, dans les très mauvais, il y a une majorité de garçons. Dans l’OCDE, cet écart atteint trois ans entre un garçon issu des classes populaires et une fille issue des catégories supérieures! C’est très préoccupant, et je suis sûre que si c’était l’inverse, si les filles étaient à la traîne, ce serait un sujet de société – ce qui serait bien évidemment légitime. Mais les inégalités en défaveur des hommes, quand elles existent, passent à la trappe! On préfère parler des «stéréotypes de genre» et de la place occupée par les garçons dans les jeux à la cour de récré plutôt que de l’inégalité criante des résultats!

Enfin, vous ne pouvez pas nier que sur le marché du travail, les femmes sont encore perdantes…

La photographie actuelle est certes en défaveur des femmes: il y a des écarts de salaires, moins de femmes PDG et plus de femmes à temps partiel. Mais la tendance de long terme va dans le sens d’une ascension spectaculaire des femmes, qu’on ne célèbre pas suffisamment. Il y a des secteurs où les femmes deviennent majoritaires: presse, communication, magistrature, médecine, enseignement. On ne parle que des dirigeants d’entreprise, mais il s’agit d’une petite minorité! Or quand on regarde l’ensemble du tableau, en excluant les dirigeants, on voit autre chose: beaucoup des métiers qui tendent à disparaître aujourd’hui, notamment en raison de la mécanisation, sont des métiers plus «masculins», tandis que les nouveaux métiers et les métiers en croissance (services à la personne, commerce) sont traditionnellement occupés par des femmes. Dans un monde moins violent, physique, et plus collaboratif et relationnel, l’économie devient féminine.

On évoque souvent les différences de salaires pour prouver l’existence d’une discrimination systémique entre hommes et femmes. Quelle est la réalité de cet écart?

La première chose qu’il faut dire, c’est qu’un écart ne signifie pas forcément une discrimination.

Aucune étude ne dit que la différence salariale est entièrement due à la discrimination. Il existe des discriminations, mais elles sont loin d’être la seule explication. Le monocausalisme, voilà l’essence de l’idéologie! Les différences de salaire ont des facteurs multiples: le secteur d’activité, la fonction, l’expérience, l’âge, le temps de travail, le pouvoir de négociation, les interruptions de travail liées à la grossesse… Ensuite, il faut analyser chacun de ces facteurs.

Oui, les femmes travaillent en moyenne moins que les hommes, mais il est faux de dire que ce temps partiel est toujours subi: il est choisi à 68 %. Oui, elles s’occupent davantage de leurs enfants, mais c’est souvent un choix! Oui, les femmes préfèrent en moyenne les métiers relationnels, où on gagne moins d’argent que les métiers techniques, comme celui d’ingénieur. Mais si ces métiers sont moins lucratifs, c’est parce que dans une société capitaliste et technologique, la richesse va à ceux qui produisent la technologie. C’est donc bien moins le résultat d’un «système patriarcal» que celui de la rationalité économique. Ne faudrait-il pas d’ailleurs reconsidérer les filières du soin?

En réalité, ce sont les choix des femmes que l’on critique. Avec à la clé, une question de valeurs: on dresse une équivalence entre le fait de réussir sa vie et de gagner de l’argent. Pourquoi travailler à son compte aurait-il moins de valeur que d’être PDG? Pourquoi être juge ou responsable des ressources humaines serait-il moins valorisant que d’être ingénieur chez Google? Nous prétendons «déconstruire la société patriarcale», mais nous avons en réalité intériorisé les valeurs masculines. Je m’interroge sur la volonté de certaines féministes de nier les aspirations des femmes – des aspirations qui ressortent des études sur le sujet et qui ne sont que des moyennes, mais qui n’en sont pas moins éclairantes. Beauvoir disait dans une interview américaine: «Aucune femme ne devrait être autorisée à rester chez elle pour élever ses enfants. La société devrait être totalement différente. Les femmes ne devraient pas avoir ce choix, précisément parce que si ce choix existe, trop de femmes vont le faire» N’est-ce pas terriblement liberticide? Ou encore, j’entends souvent les responsables politiques afficher leur volonté que dans l’enseignement supérieur, la proportion de femmes dans les matières mathématiques et technologiques augmente. Mais ils ne s’interrogent jamais sur leurs désirs profonds! Et si les femmes, même quand elles sont, très bonnes en sciences, n’avaient pas envie d’en faire leur métier? Les études sur lesquelles je m’appuie dans mon livre le prouvent: les femmes qui sont aussi bonnes ou meilleures en lettres qu’en sciences, choisissent d’abord les lettres, même quand elles sont meilleures que les garçons en sciences!

On se souvient de l’affaire du mémo de Google, où un ingénieur avait été renvoyé pour avoir expliqué les différences de carrières entre hommes et femmes. Pourquoi hommes et femmes font-ils des choix de carrière différents?

Hommes et femmes embrassent des carrières différentes, en moyenne, parce qu’ils ont en moyenne des intérêts différents – leurs choix sont donc libres et authentiques. Les «stéréotypes de genre» jouent certainement un rôle, mais certainement bien plus faible qu’on ne le dit: ils ne peuvent expliquer l’entièreté de ces différences.

On constate que les femmes se dirigent davantage, en moyenne, vers des métiers relationnels et liés au langage, et les hommes davantage vers des métiers techniques. Cela correspond à une distinction très importante observée et validée par les psychologues cognitivistes et comportementaux, celle entre l’intérêt des femmes pour les «personnes» et celui des hommes pour les «choses». Alors qu’ils ont l’opportunité de faire les mêmes études, et que les filles sont souvent meilleures que les garçons! Dans une étude récente (G. Stoet, D. C. Geary, «The Gender-Equality Paradox in Science, Technology, Engineering, and Mathematics Education», Psychological Science, 2018), des chercheurs parlent même d’un «paradoxe de l’égalité»: les différences entre les choix des deux sexes sont d’autant plus marquées que les pays sont développés et égalitaires! Plus il y a d’égalité, plus les choix sont genrés! C’est une réfutation magistrale du constructivisme social: quand on donne aux femmes le choix, elles affichent leurs différences.

Mais d’où proviennent ces différences?

C’est là qu’il faut prononcer le mot qui fâche: la nature! Je ne défends en aucun cas un déterminisme biologique, mais l’idée que les comportements des deux sexes sont en partie le résultat de différences naturelles. Ces différences sont corroborées par d’innombrables études scientifiques – psychologie cognitive et comportementale, étude des hormones et du cerveau, anthropologie et psychologie évolutionniste -, la distinction «choses/personnes» étant présente dès le plus jeune âge.

La théorie de l’évolution explique ainsi qu’hommes et femmes, confrontées à des pressions sélectives différentes, ont adopté des comportements distincts. Elle permet de comprendre notamment les racines de l’investissement supérieur des mères pour leurs enfants ou encore celles de la propension masculine à la compétition.

Malheureusement, toutes ces études sont quasiment inaudibles en France. Alors que la science s’écrit aujourd’hui en anglais, nous préférons rester repliés sur nous-mêmes, et accorder du crédit à des théories aberrantes, proférées par des universitaires qui ne connaissent rient à la biologie! On a pu le voir notamment avec les propos consternants de l’anthropologue Françoise Héritier qui affirmait que si les hommes étaient plus grands que les femmes, c’est parce qu’ils leur confisquaient la viande depuis l’âge des cavernes!

Alors que vous montrez que les femmes n’ont jamais été aussi puissantes, comment expliquez-vous que le féminisme victimaire tienne constamment le haut de l’affiche?

Je pense que ce que vous décrivez provient de ce que les chercheurs en sciences cognitives appellent des «biais». Le «biais de disponibilité» d’abord, qui consiste à privilégier et surestimer les informations qui sont immédiatement disponibles dans notre mémoire. La surexposition médiatique de certains événements peut alors donner l’impression que ceux-ci sont plus fréquents, même si c’est faux! Il y a aussi le «biais de négativité»: on a tendance à être davantage marqué par les événements négatifs que positifs. Ces deux biais empêchent de voir les progrès accomplis par les femmes depuis des décennies.

Le déclassement masculin est-il facteur de déstabilisation? Peut-il aboutir à des phénomènes de ressentiment?

Le malaise masculin m’inquiète. Alors que la place des hommes dans le monde n’est plus très claire, on leur demande de s’adapter immédiatement et radicalement. Certains hommes sont tout à fait à l’aise aujourd’hui, ceux des classes supérieures. C’est dans les classes populaires que les hommes connaissent le désarroi le plus fort. Plus généralement, je suis frappée que la masculinité ne soit invoquée, aujourd’hui, que quand elle est «toxique». Le constructivisme social qui n’invoque la différence des sexes que pour criminaliser le masculin crée à mon sens un profond malaise chez certains hommes.

Or nous n’avons aucun intérêt à ce que les hommes soient «obsolètes» car leur absence a des conséquences néfastes sur leur entourage direct, à commencer par les femmes et les enfants. Je ne crois pas à la guerre des sexes, qui considère la relation hommes-femmes comme un jeu à somme nulle: ce qu’un sexe gagne, l’autre doit le perdre. Au contraire, je pense que si les hommes vont mal, les femmes en souffrent!

Peut-il exister un féminisme conservateur?

Je crois au féminisme de l’égalité d’opportunité, pas à celui de l’égalité de résultat. Dans l’histoire, aucun gouvernement, aucun groupe social n’a obtenu d’égalité de résultat sans recourir à la coercition ou à la violence. Non seulement on ne peut pas changer fondamentalement la nature humaine, mais quand on s’y essaie, c’est toujours au prix fort.

Laetitia StrauchBonart est également rédactrice en chef de la revue hebdomadaire d’idées «Phébé par Le Point».